Question de Mme BLONDIN Maryvonne (Finistère - SOCR) publiée le 26/10/2017
Mme Maryvonne Blondin interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur la prise en charge des mineurs non accompagnés.
Depuis plusieurs années, le nombre de mineurs non accompagnés (MNA) ne cesse de croître : en 2010, ils étaient environ 4 000, pris en charge par les conseils départementaux français, à la fin de cette année, ils devraient être 25 000.
Face aux arrivées massives, une cellule nationale répartit ces jeunes dans les départements. À titre d'exemple, le Finistère doit accueillir chaque année 1,34 % des mineurs étrangers non accompagnés recensés au niveau national : en 2016, ce sont 109 nouveaux arrivants qui ont ainsi été pris en charge en Finistère et les projections portent ce nombre à 180 pour 2017.
Très vulnérables, ces jeunes sont orientés, dès leur arrivée, vers les dispositifs de protection de l'enfance qui doivent, dans un délai de cinq jours pris en charge par l'Etat (250 euros), procéder à l'évaluation de leur âge, de leur situation et à leur mise à l'abri. Or, si les conseils départementaux ont pour mission de protéger les mineurs en situation de danger, ils n'ont pas celle de déterminer leur âge qui nécessite des actes d'imagerie médicale coûteux. Chacun d'entre eux a donc mis en place, tant bien que mal, des méthodes d'évaluation dont les résultats s'avèrent disparates et contrastés selon les territoires. De ce manque de fiabilité découlent la hausse des recours et l'allongement des délais qui rendent la procédure d'autant plus longue et coûteuse.
Les services départementaux ont dû réorganiser toute leur filière de prise en charge pour y intégrer ces jeunes isolés toujours plus nombreux. Ils se trouvent parfois placés dans des structures classiques d'hébergement d'urgence qui sont inadaptées et leur accompagnement par les professionnels est de plus en plus difficile à assurer ; le recours à des prestataires extérieurs spécialisés est possible mais accroît les coûts.
Face à cette situation, les départements se trouvent aujourd'hui en grande difficulté. D'une part, les budgets alloués aux MNA ont explosé : alors qu'en 2015 le Finistère octroyait 2 millions d'euros à l'accueil de ces jeunes, il a porté son budget à 5,6 millions en 2017 ! Les coûts s'avèrent très variables selon les durées d'évaluation, les types de prise en charge et selon les territoires. En outre, les mineurs arrivent de plus en plus jeunes et nécessitent une prise en charge plus longue.
Les départements supportent la quasi-totalité des financements alors même que ces situations dépendent aussi de politiques plus larges relevant de compétences nationale et européenne en matière migratoire. S'ils ont marqué leur désir de travailler conjointement avec l'État à une amélioration de cette politique d'accueil, ils souhaitent fortement qu'elle ne soit pas limitée à la question évaluative. Le Premier ministre devait revenir sur cette question cruciale lors du congrès des départements du vendredi 20 octobre 2017.
La prise en charge de ces jeunes est primordiale : parce qu'ils ont fui des conflits et des conditions de vie insoutenables et sont issus de parcours traumatiques, il est de notre responsabilité de leur assurer une protection totale et un accompagnement pluridisciplinaire à même de leur offrir des opportunités dans notre pays et des conditions de vie et d'intégration décentes. Il apparaît aujourd'hui urgent que l'État s'engage davantage, tant du point de vue financier qu'organisationnel, aux côtés des départements pour la mise en œuvre de cette politique d'accueil fondamentale.
Elle l'interroge donc sur les mesures qu'elle entend mettre en œuvre pour permettre un accueil efficace et adapté à ce public et pour soutenir les départements dans cette mission.
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Réponse du Ministère de la justice publiée le 21/12/2017
Une augmentation notable du flux de personnes se déclarant mineurs non accompagnés est constatée depuis la fin du mois de juin 2017. À l'issue de l'évaluation de la minorité et de l'isolement réalisée par les départements, près de 12 000 personnes ont été déclarées mineurs non accompagnés à ce jour. En comparaison, elles étaient 8 000 au 31 décembre 2016 ou encore 6000 au 31 décembre 2015, soit une augmentation de plus de 100 % par rapport à 2015. Les ministres de la justice et des solidarités et de la santé ont co-présidé, le 15 septembre dernier, le comité de suivi des mineurs non accompagnés, en présence des conseils départementaux, des magistrats et des associations concernées. Les ministres ont réaffirmé l'engagement de l'État aux côtés des départements, conformément aux annonces du gouvernement en juillet dernier. Au-delà de l'abondement du Fonds national de financement de la protection de l'enfance à hauteur de 6,1 millions d'euros pour le remboursement de l'évaluation et de la mise à l'abri assumé par les départements, l'État remboursera aux départements 30 % du coût correspondant à la prise en charge par l'aide sociale à l'enfance des mineurs non accompagnés supplémentaires au 31 décembre 2017 par rapport au 31 décembre 2016. Par ailleurs, les ministres ont annoncé l'ouverture d'une phase de concertation avec les départements et les associations afin d'aboutir à la définition d'un plan pour améliorer l'accueil des mineurs non accompagnés. Les directives de ce plan d'action s'articuleront autour de quatre grands axes : la phase d'évaluation et de mise à l'abri, la limitation des réévaluations, la lutte contre les trafics de migrants, les réseaux de passeurs et la lutte contre la traite des êtres humains, l'amélioration de la qualité de la prise en charge et du dispositif de sortie de l'aide sociale à l'enfance. Enfin, le 20 octobre dernier, lors du congrès de l'Assemblée des départements de France, le Premier ministre a indiqué que conformément aux engagements du président de la République, l'État assumera l'évaluation et l'hébergement d'urgence des personnes se déclarant mineurs entrants dans le dispositif jusqu'à ce que leur minorité soit confirmée. Une mission paritaire (État et départements) a été chargée de réfléchir, d'une part, à la mise en place des dispositifs d'accueil et d'un processus de prise en charge spécifique, et d'autre part, à l'adaptation des dispositions législatives et à la clarification de la question des coûts. Les conclusions devront être rendues d'ici le début de l'année 2018. L'État demeure conscient de ses devoirs auprès des plus vulnérables que sont les mineurs non accompagnés et vient ainsi en soutien des départements qui en assument la charge dans le cadre de la politique décentralisée de protection de l'enfance.
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