Question de M. TODESCHINI Jean-Marc (Moselle - SOCR) publiée le 22/02/2018
M. Jean-Marc Todeschini attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur les fermetures programmées de nombreuses classes dans la ruralité pour la rentrée 2018. La question des fermetures de classes est au cœur des préoccupations de nos concitoyens dans tous les territoires. Personne ne méconnaît l'implication et le dévouement des élus locaux pour garantir un égal accès à l'enseignement de tous les élèves. Si l'on en croit les premières remontées du terrain à la suite des réunions qui se sont déroulées depuis le début de l'année 2018 dans tous les territoires, le ministère de l'éducation nationale a décidé d'accabler la ruralité cette année.
Force est de constater que les faits contredisent les déclarations d'intention du Président de la République quant au maintien des enseignants et des classes, notamment dans les espaces ruraux. Le ministre de l'éducation nationale avait aussi déclaré son attachement à la présence de l'école dans le monde rural lors de son intervention au congrès des maires le 22 novembre 2017.
En Moselle, malgré le contexte socio-économique et contrairement aux années précédentes, ce sont plus de cinquante postes qui seraient retirés dans l'enseignement primaire dans les écoles situées dans la ruralité.
Ces décisions vont à l'encontre des investissements réalisés par les collectivités, au premier rang desquelles les communes qui font tout leur possible pour améliorer les conditions d'enseignement, n'hésitant pas à se regrouper et à mutualiser leurs moyens lorsque cela est nécessaire.
En contrepartie des efforts budgétaires et politiques réalisés par ces communes pour notamment mettre en place des regroupements, le ministère de l'éducation nationale procède à des retraits de postes pour la rentrée 2018. Ce type d'approche ne peut qu'être mal vécue par la ruralité.
En conséquence, il lui demande quelles mesures il entend prendre afin de permettre au monde rural de maintenir de bonnes conditions d'apprentissage pour tous les élèves qui y vivent.
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Réponse du Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse publiée le 13/02/2019
Réponse apportée en séance publique le 12/02/2019
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le ministre, la question des fermetures de classes est au cur des préoccupations de beaucoup de nos concitoyens dans les territoires. Si l'on en croit les premières remontées du terrain à la suite des réunions qui se sont déroulées ces derniers temps, vous avez décidé, cette année encore, d'accabler la ruralité.
Malgré la force du mouvement social et le message qu'il porte quant à la situation des territoires ruraux ou périurbains, malgré les déclarations d'intention du Président de la République quant au maintien des enseignants et des classes, notamment dans les espaces ruraux, force est de constater que nous n'y sommes pas.
En Moselle, malgré le contexte social et économique, nous enregistrons dans l'enseignement primaire essentiellement dans les écoles situées en secteur rural ou dans les espaces périurbains 78 fermetures de classes pour seulement 31 ouvertures.
Je ne vous lirai pas la longue liste des classes qui fermeront, mais j'ai été saisi ces derniers jours par de nombreux élus mécontents : ceux d'Abreschviller, de Richeling, d'Holving, de Kirsch-lès-Sierck, de Montenach, et je m'arrête là.
Souvent, ces décisions vont à l'encontre des investissements réalisés par les communes qui font tout leur possible pour améliorer les conditions d'enseignement, n'hésitant pas à se regrouper et à mutualiser leurs moyens. Ces fermetures s'inscrivent en contradiction avec les besoins exprimés par l'ensemble du monde éducatif
La réalité du monde scolaire, ce sont des classes surchargées malgré des chiffres qui tendent à démontrer que le taux d'encadrement en Moselle augmente. En effet, on fait de l'habillage en comptabilisant les créations de postes dans la prise en charge des élèves à besoins éducatifs particuliers ou encore ceux qui sont liés à des besoins spécifiques.
Vous en conviendrez, ce type d'approche ne peut qu'être mal vécu par nos concitoyens, qu'ils expriment ou non leur mécontentement depuis plusieurs semaines.
Monsieur le ministre, pourriez-vous nous indiquer les mesures que vous entendez prendre afin de permettre au monde rural de maintenir de bonnes conditions d'apprentissage pour tous les élèves qui y vivent ? La ruralité n'attend plus des déclarations d'amour, mais jugera par les faits toute l'attention qui lui est portée par le Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur, si j'approuve le sens de vos propos, je ne suis d'accord ni sur les chiffres je vous apporterai peut-être de ce point de vue de bonnes nouvelles ni sur les qualificatifs que vous utilisez.
J'ai eu l'occasion de le rappeler hier de manière assez forte à l'Assemblée nationale, les classes rurales ont évidemment besoin de notre bienveillance et de notre soutien. Je l'ai dit hier et je le redis devant vous aujourd'hui : l'école primaire rurale française réussit mieux que la moyenne des autres écoles primaires. Elle doit donc être soutenue, qu'il s'agisse de mettre en place, au cas par cas, de façon pragmatique, des regroupements pédagogiques intercommunaux ou des classes multiniveaux. C'est résolument le sens de notre politique, qui vise notamment à créer des postes et ouvrir des classes afin d'accompagner le monde rural.
J'insiste très solennellement sur un point au sujet duquel nous devrions tous être d'accord : le vrai problème, c'est la démographie. Il importe que nous mettions en place une stratégie, en particulier dans le secteur rural. Pour ce faire, nous devons articuler quelques facteurs notamment celui de l'école , afin de rendre ces territoires plus attractifs et de faire en sorte que des familles s'y installent. C'est à mes yeux la vraie réponse, car, quelle que soit notre bienveillance, que faire quand il n'y a plus d'élèves ?
Selon vous, nous aurions décidé « d'accabler la ruralité ». Nous n'avons pas accablé la Moselle, tant s'en faut, pas plus que nous avons accablé la ruralité en général !
À la rentrée 2018, 20 emplois supplémentaires ont été créés pour 544 élèves de moins. À la prochaine rentrée, 12 emplois seront créés pour 1 000 élèves de moins. Il s'agit donc non pas de suppressions, mais de créations !
Le taux d'encadrement du département mesuré par le nombre d'enseignants pour 100 élèves est passé de 5,45 en 2017 à 5,57 en 2019. La progression est donc considérable. Ce dont nous pouvons débattre, c'est la façon dont nous répartissons les postes. C'est pourquoi nous avons signé un contrat de ruralité à l'échelle de la Moselle. Je suis tout à fait disposé à en discuter avec la rectrice et avec le directeur académique des services de l'éducation nationale, le DASEN. Bien souvent en effet, les moyens supplémentaires sont davantage consacrés à la formation des maîtres, afin de réussir le rebond qualitatif de l'école rurale, qu'au maintien de classes avec trop peu d'élèves dans certains endroits.
Ces choix qualitatifs seront discutés dans le cadre du contrat départemental, mais ne dépeignez pas la réalité sous de fausses couleurs. Ce serait ajouter inutilement du désespoir, alors que l'éducation nationale apporte tout son soutien aux écoles rurales, en particulier dans votre département.
M. le président. Monsieur le ministre, je vous demanderai de prêter davantage attention au chronomètre.
La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour répondre à M. le ministre.
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais elle est technique et relève de l'habillage, comme je l'ai déjà souligné. La réalité vécue sur le terrain par les élus locaux et les parents dans les communes rurales est tout autre : leur ressenti, ce sont les fermetures de classes !
Vous nous parlez de l'amélioration du taux d'encadrement. Mais vous avez reconnu qu'il s'agissait de créer des postes répondant à des besoins qualitatifs. Par exemple, vous créez 5 postes de RASED, les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté, 6 postes de liaison école-collège, 1 poste pour le service militaire volontaire, 1 poste de conseiller pédagogique, 2 postes d'accueil des professeurs d'allemand, 2 formateurs aux usages numériques, mais tout cela se traduit par des fermetures de classes !
Le monde rural a le sentiment de payer le dédoublement des CP-CE1 dans les zones prioritaires, même si c'est une mesure que j'approuve. En tout état de cause, il faut être plus attentif.
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