Question de M. PEMEZEC Philippe (Hauts-de-Seine - Les Républicains) publiée le 22/02/2018
M. Philippe Pemezec interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la question de l'administration des médicaments dans les établissements pour les jeunes enfants (EAJE). Depuis plus de dix ans cette question est sujette à controverses et interprétations. Elle mérite d'être clarifiée précisément, notamment concernant les responsabilités.
Deux circulaires de 1999 et 2011 mais aussi dernièrement le guide ministériel sur les EAJE, publié en avril 2017, ont tenté d'apporter des précisions sans toutefois parvenir à expliquer clairement qui peut ou ne peut pas donner des médicaments aux enfants accueillis dans les crèches et surtout dans quelles conditions.
Il existe une contradiction entre le cadre légal, défini par le code de la santé publique, et le cadre réglementaire qui oblige chaque établissement à en faire sa propre interprétation. S'il est autorisé une « aide à la prise » de médicaments sur prescription médicale dans la mesure où cela est assimilé à un acte de la vie courante, qu'en est-il dans le cas de jeunes enfants, trop jeunes pour effectuer ces actes eux-mêmes et pour lesquels les professionnels doivent « administrer les médicaments » ?
Dans la pratique, chaque EAJE élabore un règlement de fonctionnement dans lequel sont précisées les modalités de délivrance de soins spécifiques, occasionnels ou réguliers : notamment, des protocoles (validés par les médecins de crèche) définissent un cadre général d'actions et les conduites à ternir en cas de fièvre, d'érythème fessier, de crise d'asthme; des PAI (Projet d'Accueil Individualisé) en cas d'allergie alimentaire, maladie chronique sont également établis pour les enfants nécessitant des soins spécifiques et, également, il est question de la prise de médicaments dans le cadre d'une prescription médicale ponctuelle (otite, rhinite, angine
) nécessitant plus de deux prises par jour.
Cependant la problématique réside dans le fait que toutes les structures de petite enfance ne disposent pas d'une infirmière ou d'une puéricultrice pouvant être présente sur la totalité de l'amplitude horaire d'accueil pour administrer un médicament usuel.
Dans le secteur social et médico-social, n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (article L. 313-26 du code de l'action sociale et des familles) a défini clairement les conditions dans lesquelles les personnels des établissements sociaux ou médico-sociaux peuvent aider à la prise de traitement lorsque les personnes ne disposent pas d'une autonomie suffisante pour prendre seules le traitement prescrit par un médecin. En effet, elle stipule que « l'aide à la prise de traitement constitue une modalité d'accompagnement de la personne dans les actes de sa vie courante. L'aide à la prise des médicaments peut, à ce titre, être assurée par toute personne chargée de l'aide aux actes de la vie courante dès lors que, compte tenu de la nature du médicament, le mode de prise ne présente ni difficulté d'administration ni d'apprentissage particulier ».
Aussi, il lui demande de faire le nécessaire pour que des clarification juridiques soient apportées concernant l'administration des médicaments dans les établissements pour les jeunes enfants (EAJE) et qu'ainsi la sécurisation juridique de ces personnels soit garantie à l'image de ce qui a été fait pour le secteur médico-social.
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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 15/11/2018
La réglementation qui encadre l'aide à la prise de médicaments dans les modes d'accueil est distincte selon qu'il s'agisse d'un établissement d'accueil du jeune enfant (EAJE) ou d'un assistant maternel. La Circulaire DSS/MCGR/DGS n° 2011-331 du 27 septembre 2011 relative à la rationalisation des certificats médicaux précise que dans le cas d'un médicament prescrit, lorsque son mode de prise ne présente pas de difficultés particulières ni de nécessité d'apprentissage, et lorsque le médecin n'a pas prescrit l'intervention d'un auxiliaire médical, l'aide à la prise du médicament est considérée comme un acte de la vie courante. Ainsi, l'autorisation des parents, accompagnée de l'ordonnance médicale prescrivant le traitement, suffit à permettre aux assistants maternels d'administrer les médicaments requis aux enfants qu'ils gardent. Concernant les modes d'accueil collectif, le guide ministériel à destination des services de Protection maternelle et infantile, paru en avril 2017 et intitulé « Établissement d'accueil du jeune enfant », a été établi suite à l'expertise du groupe de travail composé de représentants des collectivités territoriales et des gestionnaires publics, associatifs et commerciaux, ainsi que d'un architecte spécialisé. Ce document non opposable, vise à éclaircir, à droit constant, les éléments de réglementation via des fourchettes de pratique, des conseils d'organisation ou de coordination inter-administrative. La question de l'administration des médicaments y est abordée en page 50. Il y est précisé que le cadre réglementaire actuel permet une aide à la prise de médicaments. Celle-ci se distingue de l'administration de médicaments non en raison des gestes opérés par les professionnels (le geste occasionné par une aide à la prise étant naturellement différent en ce qui concerne un tout-petit qu'en ce qui concerne un adulte), mais par le fait que les professionnels ne décident ni de la substance ingérée, ni de ses quantités, et se limitent à appliquer les prescriptions de l'ordonnance. L'aide à la prise de médicaments se fait en accord avec les parents et à condition que l'établissement soit en possession du double de l'ordonnance. Cette modalité doit être précisée dans le règlement de fonctionnement. Les professionnels peuvent souhaiter réaliser une aide à la prise sous la supervision d'un infirmier, notamment un infirmier libéral auquel l'établissement ferait ponctuellement appel à cette fin. Le guide recommande de tenir un registre quotidien précis d'aide à la prise de médicament. De plus, il précise que, dans le cadre des formations des professionnels, il est important de rappeler que les enfants porteurs de maladies chroniques ont vocation à être accueillis en milieu ordinaire sous réserve de la formalisation d'un Projet d'accueil individualisé (PAI). Les médecins de PMI peuvent encourager les professionnels/gestionnaires à former leurs équipes pour des situations qui nécessitent la maîtrise d'un geste particulier (administration d'un médicament en cas de crise d'épilepsie, par exemple ou en cas de choc allergique). Les médecins de PMI sont donc invités, en même temps qu'ils étudient le projet d'établissement, à vérifier le plan de formation proposé pour les professionnels. Par ailleurs, une reprise approfondie du cadre normatif des modes d'accueil du jeune enfant est actuellement en cours de concertation, suite à la promulgation de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance (ESSOC) qui habilite le Gouvernement à prendre des ordonnances afin de faciliter l'implantation, le développement et le maintien de modes d'accueil de la petite enfance. Ces travaux réunissent les principaux acteurs du secteur de la petite enfance et des politiques familiales ; ils seront conduits jusqu'au début de l'année 2019. Le cadre juridique de l'aide à la prise de médicaments dans le cas de l'accueil individuel et de l'accueil collectif de jeunes enfants sera abordé lors de ces réunions de travail.
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