Question de Mme LASSARADE Florence (Gironde - Les Républicains) publiée le 22/03/2018

Mme Florence Lassarade appelle l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le fonctionnement de la société commerciale MédecinDirect. Cette société revendique 1 600 téléconsultations par mois. Des médecins y sont joignables par courrier électronique ou par téléphone vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept pour diagnostiquer et rédiger une ordonnance. L'article R. 4127-19 du code de la santé publique dispose que « la médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce ». Par ailleurs, la téléconsultation médicale est inscrite à l'article R. 6316-1 du même code qui précise qu'elle « a pour objet de permettre à un professionnel médical de donner une consultation à distance à un patient. » La loi dit qu'une téléconsultation est une consultation à distance. Elle permet au professionnel de santé médical requis de réaliser une évaluation globale du patient, en vue de définir la conduite à tenir à la suite de cette téléconsultation. Or, avec MédecinDirect, le patient et le médecin s'écrivent ou se parlent mais ne se voient jamais. La question se pose de savoir si cette société commerciale est un établissement de santé soumis à l'autorisation de l'agence régionale de santé (ARS). Le cas échéant, elle souhaiterait savoir si une ARS est en mesure d'autoriser une société commerciale relevant du code du commerce à prodiguer des actes médicaux.

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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 20/06/2018

Réponse apportée en séance publique le 19/06/2018

Mme Florence Lassarade. Madame la ministre, ma question porte sur le fonctionnement de la société commerciale MédecinDirect.

La télémédecine s'implante dans le paysage médical français, ce qui est une très bonne chose. Toutefois, le fonctionnement de la société MédecinDirect m'a alertée. Cette société revendique 1 600 téléconsultations par mois. Des médecins y sont joignables par mail ou par téléphone 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 pour effectuer un diagnostic et rédiger une ordonnance.

L'article R. 4127–19 du code de la santé publique dispose que la médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce.

D'autre part, la téléconsultation médicale figure à l'article R. 6316–1 de ce même code, qui précise que la téléconsultation « a pour objet de permettre à un professionnel médical de donner une consultation à distance à un patient ». Selon la loi, une téléconsultation est donc une consultation à distance qui permet au professionnel de santé médical requis de réaliser une évaluation globale du patient, en vue de définir la conduite à tenir à la suite de cette téléconsultation.

Or, avec MédecinDirect, le patient et le médecin s'écrivent ou se parlent, mais ils ne se voient jamais.

La question se pose donc de savoir si cette société commerciale est un établissement de santé soumis à l'autorisation de l'Agence régionale de santé, ou ARS, compétente.

Le cas échéant, madame la ministre, je souhaiterais savoir si une ARS est en mesure d'autoriser une société commerciale relevant du code de commerce à prodiguer des actes médicaux.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Lassarade, la société MédecinDirect a signé un contrat de télémédecine avec l'Agence régionale de santé d'Île-de-France le 14 décembre 2015 ; ce contrat a été renouvelé le 14 décembre dernier. Ses activités de télémédecine n'ont débuté qu'en septembre 2016, après l'obtention de l'autorisation de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. MédecinDirect est une plateforme qui permet la mise en relation d'un patient, par écrit, téléphone ou vidéotransmission, suivant son choix, avec un médecin pour un conseil personnalisé ou une téléconsultation.

Ses principaux clients sont des assureurs complémentaires santé et des mutuelles, qui offrent ce service à leurs adhérents ou bénéficiaires. Il n'y a donc pas, pour le patient, de reste à charge directement lié à la consultation.

La délivrance d'un conseil ou d'une information, même assortie d'une prescription, n'entre pas dans le champ d'application de la télémédecine. Le contrat signé avec l'Agence régionale de santé a seulement pour objet de déterminer les objectifs et les modalités de réalisation des téléconsultations de MédecinDirect.

Ce contrat permet la déclinaison des orientations régionales fixées dans le projet régional de santé : améliorer l'accessibilité de tous à des soins de qualité sur l'ensemble du territoire, consolider la permanence de soins, renforcer la prise en charge des maladies chroniques et viser au développement des usages de la téléconsultation en garantissant la qualité et la sécurité des soins.

L'article 54 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 précise que « les actes de téléconsultations remboursés par l'assurance maladie sont effectués par vidéotransmission ».

A contrario, la vidéotransmission n'est pas une obligation dans une téléconsultation qui n'est pas prise en charge par l'assurance maladie.

Je vous confirme, enfin, que les téléconsultations de médecins directs constituent une pratique médicale soumise aux règles de l'exercice de la médecine en France, qui imposent notamment l'inscription auprès d'un conseil ordinal.

Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour répondre à Mme la ministre.

Mme Florence Lassarade. Madame la ministre, je vous remercie pour votre réponse détaillée. Néanmoins, prenons garde de ne pas préférer, à l'excellence de la téléexpertise à laquelle les Français auraient droit, la marchandisation de la santé, avec tous les excès que cela peut impliquer !

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