Question de Mme PEROL-DUMONT Marie-Françoise (Haute-Vienne - SOCR) publiée le 01/03/2018
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les violences éducatives ordinaires, constituées par l'ensemble des pratiques coercitives ou punitives tolérées, voire recommandées culturellement, pour éduquer les enfants.
En France, ces violences sont pratiquées par 85 % des parents et sont de nature physique, verbale ou psychologique. De nombreuses études scientifiques démontrent pourtant les effets néfastes et contre-productifs de ces violences sur les enfants, qui peuvent manifester par la suite des troubles psychologiques et des comportements antisociaux. Les conséquences de ces violences constituent donc un fléau sociétal et une urgence de santé publique pour les enfants et les adultes qu'ils deviendront.
Par ailleurs, la jurisprudence française n'a, semble t-il, toujours pas abandonné l'application du « droit de correction » coutumier, qui a pourtant été supprimé du code civil en 1958. Les parents peuvent ainsi être exonérés de leur responsabilité dès lors que la punition corporelle infligée est dite « légère ». Ces violences « banalisées » entraîne pourtant chaque année le décès d'environ 700 enfants par maltraitance ou négligence.
De nombreuses associations réclament ainsi des dispositions dans le droit français interdisant toute forme de violence envers les enfants.
Elle lui demande donc de lui faire part de son opinion en ce sujet et quelles dispositions elle entend mettre en œuvre pour y répondre.
- page 922
Réponse du Ministère de la justice publiée le 26/07/2018
Le Gouvernement est particulièrement sensible à la problématique des violences faites aux enfants, notamment celles commises dans le cadre intrafamilial. Ces violences peuvent entraîner, outre des troubles psychologiques, des troubles psychopathologiques, cognitifs et comportementaux, de personnalité avec un impact sur l'insertion scolaire, socio professionnelle et sociale ainsi que les relations affectives. Plusieurs mesures du plan interministériel de mobilisation et de lutte contre les violences faites aux enfants (2017-2019) concernent précisément la promotion d'une éducation sans violence et la prévention des décès d'enfants suite à des violences intrafamiliales. Ces questions font aussi actuellement l'objet d'échanges au sein du conseil national de la protection de l'enfance (CNPE), dont le ministère de la justice est un membre actif. Le principe selon lequel l'éducation ne peut reposer sur un droit de correction est défendu par les services de la justice. Notre droit punit sévèrement les violences sur les enfants, particulièrement quand elles sont commises par les parents ou par une personne ayant autorité sur l'enfant. Dès qu'une situation de danger est caractérisée, la saisine du juge des enfants permet d'ordonner des mesures d'assistance éducative visant à protéger l'enfant et à accompagner les parents dans leur action éducative, sans recourir à la punition corporelle. Ces mesures ne permettent pas d'éradiquer l'ensemble des violences corporelles et 67 décès d'enfants suites à des violences intrafamiliales ont été dénombrés en 2016. C'est pourquoi les travaux en cours, tant au sein du CNPE qu'au sein des diverses instances interministérielles, mettent l'accent sur la prévention et le repérage précoce des situations de maltraitance, ainsi que sur le développement des actions de soutien à la parentalité, qu'il convient de mettre en uvre dès le plus jeune âge. En outre, une proposition de loi relative à l'interdiction des violences éducatives ordinaires déposée le 7 mars 2018 sur le bureau de l'Assemblée nationale prévoit l'inscription dans le code civil d'une prohibition des recours aux violences corporelles. Une telle réforme aurait le mérite d'inscrire dans la loi un principe essentiel et de responsabiliser les parents et futurs parents sur leurs pratiques éducatives.
- page 3889
Page mise à jour le