Question de M. LABBÉ Joël (Morbihan - RDSE-R) publiée le 16/05/2018
Question posée en séance publique le 15/05/2018
M. Joël Labbé. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture. Elle concerne la mortalité catastrophique qui touche en ce moment les abeilles.
Voilà dix jours, j'étais avec les apiculteurs bretons, à Rennes, pour assister à l'arrivée d'un « convoi mortuaire », organisé pour alerter sur les pertes massives de colonies. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 20 000 colonies perdues en Bretagne, 3 000 dans le département de la Dordogne, 1 000 dans celui de la Charente, pour ne citer que quelques exemples
Sachant que la perte moyenne, pour chaque ruche, s'élève à 400 euros, je vous laisse imaginer la détresse, à la fois économique et humaine, de nos apiculteurs.
Monsieur le ministre, ma question est double.
Un plan d'urgence va-t-il être mis en œuvre pour soutenir les apiculteurs, compenser les pertes de marge brute et aider à reconstituer les cheptels ?
Sur un plan plus structurel, les causes de cette mortalité sont connues : elles sont en grande partie liées à notre modèle agricole intensif, fondé sur l'agrochimie. Dans ce contexte, quelles mesures le Gouvernement va-t-il mettre en place pour assurer et accélérer la transition de notre agriculture ? (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe La République En Marche, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 16/05/2018
Réponse apportée en séance publique le 15/05/2018
M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur, effectivement, les apiculteurs de Bretagne et d'ailleurs ont récemment fait état d'une situation sanitaire dégradée dans leurs ruchers en sortie d'hiver. Les mécanismes de surveillance dont disposent actuellement les pouvoirs publics ne permettent pas de corroborer une généralisation de cette dégradation. (Protestations sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)
M. Simon Sutour. Ça suffit !
M. Stéphane Travert, ministre. Cependant, une enquête menée en sortie d'hiver 2018 par le GIE Élevages de Bretagne fait apparaître de manière incontestable que certains apiculteurs sont confrontés à une situation sanitaire préoccupante.
À la fin de l'année 2017, l'État a mis en place, dans deux régions pilotes Bretagne et Pays de la Loire, un observatoire des mortalités et des affaiblissements de l'abeille mellifère, ou OMAA. L'objectif est de mieux prendre en compte la situation sanitaire et d'identifier les facteurs de risque. Tous les apiculteurs bretons ayant constaté des mortalités ou des affaiblissements dans leurs ruchers sont invités à les déclarer au guichet unique qui a été mis en place. Cette déclaration déclenchera une visite vétérinaire.
Les résultats de la première année de fonctionnement de cet observatoire seront présentés au cours du dernier trimestre de 2018. Il convient d'ores et déjà de réfléchir aux perspectives d'amélioration du protocole de surveillance. C'est la priorité de la filière. Nous devons aborder cette question avec l'Institut technique de l'abeille, que nous avons redressé ces derniers temps.
En France, un dispositif de surveillance des mortalités massives aiguës des abeilles existe depuis plusieurs années. Il a été évalué par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, l'ANSES. Sa révision est désormais engagée ; y sont associés les experts et les représentants professionnels de l'apiculture. Il alimente le dispositif de pharmacovigilance animé par l'ANSES.
Le 25 avril dernier, le Gouvernement a présenté son plan d'action sur les produits phytopharmaceutiques concernant les pollinisateurs. Sur la base d'un avis de l'ANSES, qui sera saisie prochainement, il est prévu de renforcer les dispositions relatives aux conditions d'utilisation des produits phytopharmaceutiques, en vue de protéger les abeilles domestiques et les insectes pollinisateurs.
M. Simon Sutour. C'est mal barré !
M. Jean-Pierre Grand. Il va falloir agir dare-dare ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour la réplique.
M. Joël Labbé. Monsieur le ministre, derrière les abeilles, il y a l'ensemble des pollinisateurs, les insectes, les oiseaux, les vers de terre, bref toute la vie du sol ! C'est tout notre écosystème qui est mis à mal !
Les pratiques doivent être remises en cause. Des études, il y en a, en particulier une, récente, réalisée conjointement par le CNRS et le Muséum national d'histoire naturelle, qui démontre l'existence d'un lien entre cette mortalité et les pratiques agricoles.
Nous aurons l'occasion d'en débattre lors de l'examen du prochain texte relatif à l'agriculture et à l'alimentation. Nous ferons alors des propositions, et nous espérons que des réponses concrètes seront apportées pour protéger la biodiversité et les équilibres environnementaux ! (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
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