Question de M. RAPIN Jean-François (Pas-de-Calais - Les Républicains) publiée le 05/07/2018
M. Jean-François Rapin attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le sentiment d'insécurité grandissant chez les professionnels de santé.
Dernièrement, le Conseil national de l'Ordre des médecins annonçait un triste record : en 2017, plus de 1 000 cas d'agressions ont été rapportés. Un chiffre inquiétant qui ne peut qu'alerter, d'autant plus que certains professionnels ne déclarent pas les incidents dont ils sont victimes, souvent par manque de temps.
Des patients en colère, une prise en charge qui ne leur convient pas, des prescriptions non conformes à leurs attentes, des temps d'attente jugés trop longs, qui se transforment en insultes, menaces, harcèlement, vols, coups. Ces agressions se généralisent et génèrent un fort sentiment d'insécurité chez les praticiens. Les professionnels de santé, en premier lieu les femmes et les médecins généralistes, subissent alors une pression grandissante et avouent, pour certains, se sentir totalement démunis.
Notre pays souffre d'un phénomène de désertification médicale, d'autant plus inquiétant en milieu rural, ce qui nuit à l'efficacité même de notre système de santé. Un tel problème d'incivilité voire de violence n'encourage en rien la volonté de certains d'exercer dans ce domaine, ni même l'installation des plus jeunes. La médecine de proximité ne peut pâtir de telles difficultés et il ne faut en aucun cas renforcer les inégalités d'accès aux soins, d'ores et déjà criantes sur le territoire national.
Aussi, il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement afin d'assurer la sécurité des professionnels de santé, sans pour autant trop alourdir leurs tâches administratives.
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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 01/08/2018
Réponse apportée en séance publique le 31/07/2018
M. Jean-François Rapin. Madame la ministre, j'attire votre attention sur un sujet inquiétant, l'insécurité grandissante à laquelle font face les professionnels de santé dans leur exercice quotidien.
En effet, dernièrement, le Conseil national de l'Ordre des médecins annonçait un triste record. En 2017, plus de 1 000 cas d'agressions ont été rapportés. Ce chiffre inquiétant ne peut qu'alerter, d'autant plus que certains professionnels ne déclarent pas les événements agressifs dont ils sont victimes, souvent par manque de temps, parfois par peur.
La colère de patients - pour une prise en charge qui ne leur convient pas, des prescriptions non conformes à leurs attentes, des temps d'attente jugés trop longs - entraîne insultes, menaces, harcèlement, vols, coups. Ces agressions se généralisent et suscitent un fort sentiment d'insécurité chez les praticiens. Les professionnels de santé, en premier lieu les femmes et les médecins généralistes, subissent une pression grandissante et avouent, pour certains, se sentir totalement démunis.
Notre pays souffre d'un phénomène de désertification médicale, très inquiétant en milieu rural, qui nuit à l'efficacité même de notre système de santé. Une telle violence décourage certains d'exercer dans ce domaine, les plus jeunes hésitant même à s'installer. La médecine de proximité ne peut pâtir de telles difficultés et il ne faut en aucun cas aggraver les inégalités d'accès aux soins, d'ores et déjà criantes sur le territoire national.
Madame la ministre, que compte faire le Gouvernement pour renforcer la sécurité des professionnels de santé et leur permettre d'exercer sereinement leur mission ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Jean-François Rapin, je vous remercie de votre question et je vous confirme que le ministère des solidarités et de la santé est évidemment très attentif à la protection des médecins et à celle de l'ensemble des professionnels de santé, qu'ils exercent en secteur libéral ou en établissement. Cette protection est primordiale pour leur assurer des conditions de travail décentes, sans lesquelles ils ne peuvent offrir des soins d'une qualité optimale à nos concitoyens.
Les questions d'incivilité, voire de violence, que vous évoquez ne sont pas tolérables et je puis vous assurer que des mesures sont prises depuis plusieurs années par le ministère de la santé, en relation étroite avec les ministères de la justice et de l'intérieur.
Tout d'abord, l'ensemble des professionnels de santé bénéficient de dispositions pénales spécifiques leur offrant un régime de protection identique à celui de certaines fonctions et professions, comme les personnes investies d'un mandat électif public, les magistrats ou toute autre personne dépositaire de l'autorité publique.
Les ordres professionnels de santé bénéficient également en vertu de la loi de certaines prérogatives de soutien à leurs membres. Les conseils nationaux, régionaux et départementaux des ordres peuvent par exemple exercer tous les droits réservés à la partie civile en cas de préjudice direct ou indirect à l'intérêt de leur profession, y compris en cas de menaces ou de violences commises en raison de l'appartenance à l'un de ces métiers.
Au-delà de la protection pénale que je viens d'évoquer et du soutien, au besoin par la constitution de partie civile de l'ordre professionnel, il existe des séries de protocoles nationaux associant les ministères de la santé, de l'intérieur et de la justice, qu'il faudra certainement continuer à approfondir.
Par ailleurs, cinq fiches réflexes du ministère de l'intérieur, mises à jour en 2017, délivrent une série de conseils pratiques sur la protection des professionnels de santé travaillant en secteur libéral et sur les réactions à avoir en cas d'agression.
Enfin, depuis 2005, un membre du corps de conception et de direction de la police nationale est détaché auprès de la direction générale de l'offre de soins et a notamment en charge les questions d'incivilités et de violences.
Sous l'égide de l'Observatoire national des violences en milieu de santé, un guide pratique a été publié en 2017 : La prévention des atteintes aux personnes et aux biens en milieu de santé.
Aujourd'hui, il importe de mieux former les médecins à la gestion des agressions verbales et physiques. Des méthodes se développent à l'hôpital, mais encore trop peu dans le cadre de l'exercice libéral.
Il est vrai également que le déploiement du regroupement des professionnels de santé devrait atténuer la sensation d'insécurité.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour répondre à Mme la ministre.
M. Jean-François Rapin. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, en particulier des éléments juridiques.
Demandons simplement aux juges d'appliquer le code pénal ! La publication des condamnations est importante et pourrait rassurer les médecins, même si elle ne peut, à elle seule, modifier les comportements dans notre société et mettre fin aux incivilités.
Ayant eu la chance de m'entretenir avec vous tout à l'heure, permettez-moi de poursuivre l'échange que nous avons eu sur la permanence des soins.
Aujourd'hui, c'est souvent dans le cadre de l'exercice de la permanence des soins que surviennent les agressions. Il est important de maintenir des permanences à taille humaine. Ne développons pas des systèmes de taille XXL, dans lesquels les médecins seraient complètement perdus. Il est important que les médecins connaissent bien leur secteur et leurs patients. Je vous invite donc à être attentive à cette question, les ARS ayant actuellement la volonté de regrouper les permanences des soins. Ne changeons pas les équipes qui gagnent. Laissons les systèmes fonctionner correctement lorsque c'est le cas.
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