Question de M. LAURENT Pierre (Paris - CRCE) publiée le 05/07/2018
M. Pierre Laurent attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères au sujet des ressources minérales et de l'énergie dans le monde.
Selon le rapport de l'alliance nationale de coordination de la recherche pour l'énergie (ANCRE) de 2015 la transition énergétique actuelle est et sera au moins dans un premier temps une cause de surconsommation d'énergie fossile et de métaux et ce d'autant plus si la population mondiale s'accroît comme prévu à 9 milliards en 2050 et que la pauvreté recule. Elle estime que pour satisfaire ces besoins notamment il faudra extraire du sous-sol plus de métaux que l'humanité n'en a extraits depuis son origine.
En ce qui concerne le secteur minier à la base de l'extraction des métaux et en particulier des métaux rares, les pays européens notamment se sont désintéressés de leur production et l'ont délocalisée vers d'autres pays, comme la Chine et la République démocratique du Congo (RDC) par exemple, avec des conséquences sociales, environnementales et sanitaires très graves. Cela a eu également pour conséquences une diminution du soutien à la recherche publique dans les domaines miniers mais aussi de la métallurgie, ainsi qu'une perte de savoir-faire et de compétences sur ces sujets.
L'ANCRE souligne que la seule utilisation des métaux issus du recyclage ne permettra pas de répondre aux besoins de la transition énergétique et que l'augmentation de la production primaire sera nécessaire. Le rapport souligne également, à ce sujet, que dans l'état actuel du monde et de l'organisation économique qui y prévaut il est à prévoir une massification de l'exportation massive de ces déchets vers des pays asiatiques et africains, où le recyclage se fait dans de très mauvaises conditions.
Par conséquent il apparaît de plus en plus évident dans l'intérêt des populations qui subissent ces nuisances et d'une nécessaire sauvegarde de l'environnement qu'il ne faut plus se contenter d'apprécier les produits finis en termes écologiques mais qu'il est nécessaire d'examiner si le processus d'extraction de leurs composants et ceux de leur fabrication industrielle ainsi que de leur recyclage sont respectueux ou non de l'environnement. Cela met en évidence un angle mort de la conférence de Paris sur le climat (COP 21) et le fait que l'organisation mondiale actuelle de ces productions ne peut rester en l'état.
Il lui semble que la France devrait être à l'initiative au niveau de l'Union européenne (UE) et de l'organisation des Nations unies (ONU) pour, dans un premier temps, établir une évaluation détaillée des impacts décrits ci-dessus pour les exploitations existantes et accompagner la mise en place de nouvelles exploitations par de telles évaluations. Il lui demande également si la France ne devrait pas aux niveaux national, européen et international participer à un développement de la recherche en matière minière et à la mise en place d'un cadre légal qui oblige les entreprises à respecter, pour le moins, des règles comparables à celles en cours dans l'UE tant en ce qui concerne l'extraction que le recyclage.
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Transmise au Ministère de la transition écologique et solidaire
Réponse du Ministère de la transition écologique et solidaire publiée le 01/11/2018
La demande en métaux est appelée à croître très significativement dans le monde d'ici 2050. Les facteurs habituels de croissance (démographie, augmentation du niveau de vie moyen dans les pays fortement peuplés ) sont renforcés par la transition énergétique et par la transformation numérique de nos sociétés. Cette croissance des besoins est étayée par de nombreux travaux académiques en France, en Europe et à l'international. Le groupe international des experts sur les ressources (l'équivalent du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) pour les ressources) a publié de nombreux rapports sur ce sujet et contribue, par son expertise, à développer progressivement, un diagnostic partagé sur ces questions au niveau mondial. Cette croissance de la demande, les transformations économiques qu'elle engendre dans les chaînes d'approvisionnement font l'objet, en France, d'une attention particulière du Comité pour les métaux stratégiques (Comes). Sur le thème de la transition énergétique, depuis le side-event organisé lors de la COP 21, le Comes a organisé en 2017 un séminaire dédié aux métaux de la transition énergétique suivi d'une note de position sur ce sujet. Parmi les pistes d'actions, le recyclage des métaux est identifié comme un des axes prioritaires, repris dans les programmes investissement d'avenir. De nombreux projets ont d'ores et déjà été menés dans ce cadre, ils contribuent à développer les compétences en particulier dans la métallurgie pour l'émergence de nouvelles filières. Par ailleurs, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) a réalisé dans le cadre des travaux du Comes, une cartographie des acteurs de la recherche française et a mis en évidence le fort dynamisme de ces acteurs publics et privés. La « feuille de route économie circulaire » (FREC) appuyée du « plan ressources pour la France » souligne l'importance des ressources minérales pour nos sociétés et vise avec la mesure 5 à gérer les ressources de façon plus soutenable. Sur la base des recommandations du Comes pour le développement de compétences industrielles françaises dans le recyclage des métaux critiques, la FREC vise une politique industrielle ambitieuse de valorisation du stock de matières, en particulier les métaux critiques, contenues dans les déchets. La Commission européenne également consciente de ces enjeux a lancé depuis 2008 le Partenariat européen pour l'innovation dédiée aux matières premières. Cette initiative a insufflé une forte dynamique de recherche et renforcé les collaborations entre acteurs européens. Au-delà des critères d'innovation, les projets de recherche doivent démontrer qu'ils s'inscrivent dans une démarche d'éco-conception. En miroir de cette initiative, la France s'est doté d'un groupe pour la coordination pour la recherche, du développement et de l'innovation des matières premières primaires et secondaires. Si les enjeux de maîtrise de l'accès à la ressource sont considérables, ils concernent également les impacts environnementaux et énergétiques associés à son extraction. La valorisation des matières premières primaires et secondaires sur le territoire est une opportunité de produire selon un cadre environnemental et social parmi les plus exigeants, de créer de la valeur ajoutée dans les territoires et enfin de contribuer à sécuriser les approvisionnements. Le respect des meilleurs standards en dehors de l'Union européenne est aujourd'hui en voie de progrès par l'application des principes directeurs de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour les entreprises et leurs relations d'affaires. Dans cette même dynamique, la France a adopté la loi sur le devoir de vigilance (2017). Plus spécifiquement au secteur de l'extraction minière, la France va mettre en uvre le règlement de l'Union européenne (2017) sur le devoir de diligence de la chaîne d'approvisionnement en minerais et métaux de l'étain, du tantale, du tungstène et de l'or.
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