Question de M. CHAIZE Patrick (Ain - Les Républicains) publiée le 19/07/2018
M. Patrick Chaize appelle l'attention de M. le ministre de la cohésion des territoires sur les modalités de déploiement de la fibre optique au sein des lotissements neufs, conformément à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.
Malgré ce texte, le déploiement de la fibre optique est souvent bloqué sur les zones d'aménagement en général et sur les lotissements en particulier. Les promoteurs et leurs représentants refusent d'appliquer l'article 118 de cette loi, arguant de l'absence d'un décret d'application spécifique aux lotissements. Ainsi, trois situations sont relevées : soit les lotissements ne sont pas fibrés lors de leur construction, ce qui engendre une perte de temps considérable pour le raccordement des habitants concernés. Soit les lotissements sont fibrés mais sans tenir compte des spécifications techniques et d'architecture de l'opérateur qui sera en charge de les exploiter, d'où une impossibilité d'utiliser les fibres pourtant déployées. Ou, dans le dernier cas, les lotissements sont fibrés mais les fibres optiques sont rétrocédées au titulaire du service universel, alors que celui-ci n'est pas l'opérateur chargé de déployer le FttH (de l'anglais : Fiber to the Home, ce qui signifie « Fibre optique jusqu'au domicile ») sur le restant de la commune, conduisant de facto à un doublonnement des réseaux.
Ces freins, difficilement justifiables, pourraient être levés en clarifiant l'application de l'article 118. En effet, la loi qui est sans ambiguïté aucune, stipule que « II.- Les lotissements neufs sont pourvus des lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique nécessaires à la desserte de chacun des lots par un réseau de communications électroniques à très haut débit en fibre optique ouvert au public. » Or certains acteurs de la construction appuient leur argumentaire sur la promulgation d'un seul décret en Conseil d'État pris en application de ce texte : le décret n°2016-1182 du 30 août 2016 limité aux immeubles neufs et maisons individuelles neuves ne comprenant qu'un seul logement ou qu'un seul local à usage professionnel, sans viser les lotissements. Force est de constater également qu'il n'existe pas de vérification au titre du permis d'aménager, texte relevant du code de la construction et de l'habitation, d'où l'absence de contrôle de l'application de la loi en matière d'obligation de pose de cette fibre optique. Enfin, il existe de réelles confusions liées à la délivrance du service universel, qui n'explique pas comment doit-être tarifée la fibre optique de la boucle locale optique mutualisée (BLOM) pour le simple fait de distribuer un tel service universel, ce qui contribue au statu quo.
Dans ce contexte, il lui demande si le Gouvernement entend préciser son interprétation de l'article 118 de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, et adopter des mesures pour permettre le fibrage des lotissements, en prenant en compte les spécificités des zones d'initiative publique et celles de la zone AMII (Appel à manifestation d'intention d'investissement).
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Transmise au Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales
Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales publiée le 13/02/2020
L'article 118 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a inséré dans le code de la construction et de l'habitation les articles L. 111-5-1-1 et L. 111-5-1-2, qui étendent l'obligation d'équipement en ligne de communications électroniques en fibre optique des bâtiments neufs, à trois cas : les immeubles neufs et les maisons individuelles neuves ne comprenant qu'un seul logement ou qu'un seul local à usage professionnel, les immeubles groupant plusieurs logements ou locaux à usage professionnel faisant l'objet de travaux soumis à permis de construire conformément à l'article L. 111-1, les lotissements neufs. Le décret n° 2016-1182 du 30 août 2016 porte en effet sur les modalités de mise en oeuvre de l'obligation d'équiper les immeubles neufs et les maisons individuelles de lignes en fibre optique permettant le raccordement de chacun des logements. Ce décret a été pris en application de l'article L. 111-5-1-1 du code de la construction et de l'habitation. Le décret n° 2017-832 du 5 mai 2017 a quant à lui été pris en application de l'article L. 111-5-1-2 du code de la construction et de l'habitation. Il traite du fibrage des immeubles regroupant plusieurs logements ou locaux professionnels faisant l'objet de travaux de rénovation soumis à permis de construire, sauf lorsque le coût des travaux d'équipement, y compris les travaux induits, est supérieur à 5 % du coût des travaux faisant l'objet du permis de construire. Ce décret ne comprend en effet aucune disposition s'agissant des lotissements neufs. À ce jour, aucun décret d'application n'a été pris quant à l'obligation spécifique d'équiper les lotissements neufs en fibre optique. Cette absence de texte réglementaire concernant l'équipement en fibre optique des lotissements neufs s'explique par le fait que le II de l article L. 111-5-1-2 du code de la construction et de l'habitation, qui impose cette obligation, a été jugé suffisamment explicite. Le Gouvernement a estimé que le texte réglementaire n'aurait fait que reprendre l'obligation légale sans l'expliciter et n'était donc pas nécessaire. Il convient de souligner que l'absence de décret d'application ne fait pas forcément obstacle à l'application de la loi. En effet, une disposition législative peut être considérée comme applicable dès le lendemain de sa publication, si elle apparait suffisamment précise et ce, alors même que la loi aurait expressément prévu un décret d'application et que celui-ci ne serait pas intervenu. En outre, le Conseil d'État considère qu'un décret d'application n'est pas nécessaire si l'obligation légale n'apparait pas manifestement impossible à réaliser en l'absence de mesure réglementaire. En l'espèce, les promoteurs et leurs représentants ne peuvent donc pas se prévaloir de l'absence de décret d'application pour ne pas respecter leurs obligations légales en matière de fibrage des lotissements neufs car l'obligation légale est suffisamment précise et sa réalisation n'apparait pas manifestement impossible.
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