Question de M. HERVÉ Loïc (Haute-Savoie - UC) publiée le 11/10/2018
M. Loïc Hervé attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'accueil en Haute-Savoie des mineurs non accompagnés.
Le nombre de mineurs non accompagnés confiés au département de la Haute-Savoie a augmenté de plus de 240 % entre 2015 et 2018, et représente désormais plus de 25 % des mineurs placés sous sa responsabilité. Sur 305 mineurs placés, plus de la moitié sont de grands adolescents et 90 % des garçons.
Au regard de ces chiffres inégalés, en constante progression, le département de la Haute-Savoie a développé des offres d'hébergement, fait appel au réseau hôtelier et, ponctuellement, aux familles de parrainage.
Malgré cela, les hébergements sont saturés par l'afflux continu de mineurs isolés. Le personnel, majoritairement féminin, est épuisé et demeure en difficulté face à un public ayant parfois atteint largement la majorité.
Aussi, il souhaite savoir si le Gouvernement envisage un véritable plan d'urgence pour répondre à l'arrivée massive de migrants mineurs. Malgré l'inscription d'un budget de 10 millions d'euros en 2018, le département haut-savoyard n'a plus les moyens suffisants d'assurer sa responsabilité dans des conditions dignes. Il lui demande quelle compensation financière prévoit le Gouvernement pour faire face aux surcoûts engendrés par cet accueil.
Cette problématique demande une action forte et efficace du Gouvernement, tant sur les plans social, économique, judiciaire que dans le domaine de l'éducation nationale pour répondre aux failles de notre dispositif actuel.
L'avenir de ces enfants mérite une politique migratoire juste et réalisable.
- page 5090
Réponse du Ministère de la justice publiée le 24/10/2018
Réponse apportée en séance publique le 23/10/2018
M. Loïc Hervé. Madame la ministre, j'appelle votre attention sur l'accueil des mineurs non accompagnés, les MNA, ou « mineurs étrangers isolés » selon l'ancien vocable, en particulier en Haute-Savoie. Le nombre de mineurs non accompagnés confiés à ce département a augmenté de plus de 240 % entre 2015 et 2018. Ils représentent désormais plus de 25 % des mineurs placés sous sa responsabilité. Sur 305 mineurs placés, plus de la moitié sont de grands adolescents et 90 %, des garçons.
Au regard de ces chiffres inégalés, en constante progression, le département de la Haute-Savoie a développé des offres d'hébergement, fait appel au réseau hôtelier et, ponctuellement, aux familles de parrainage. Malgré cela, les hébergements sont saturés par l'afflux continu de mineurs isolés je rappelle que la Haute-Savoie est un département frontalier. Le personnel, majoritairement féminin, est épuisé et demeure en difficulté face à un public ayant parfois atteint la majorité depuis longtemps.
Aussi, je souhaite savoir si le Gouvernement envisage un véritable plan d'urgence pour répondre à l'arrivée massive de migrants mineurs.
Malgré l'inscription d'un budget de 10 millions d'euros en 2018, le département de la Haute-Savoie n'a plus les moyens suffisants pour assumer sa responsabilité dans des conditions dignes. Quelle compensation financière le Gouvernement envisage-t-il pour faire face aux surcoûts entraînés par cet accueil ?
Cette problématique demande une action forte et efficace du Gouvernement, tant sur les plans social, économique et judiciaire que dans le domaine de l'éducation nationale, pour répondre aux failles de notre dispositif actuel. L'avenir de ces enfants mérite une politique migratoire juste et réalisable.
Madame la ministre, je vous interroge au nom des élus du département, notamment du président du conseil départemental, qui a récemment interpellé M. le Premier ministre sur cette même question.
Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur Loïc Hervé, vous abordez un sujet extrêmement difficile, tant pour les départements qui doivent assumer la prise en charge de ces mineurs non accompagnés que pour l'État, qui est très sensible aux problèmes que vous soulevez.
Le nombre de MNA est aujourd'hui plus important et plus élevé que l'an dernier à la même époque. Pour vous donner quelques chiffres, entre le 1er janvier et le 5 octobre 2018, 12 200 MNA ont été confiés aux conseils départementaux sur l'ensemble du territoire métropolitain, contre 10 162 en 2017.
Évidemment, l'État est conscient des difficultés financières que cela entraîne. C'est pourquoi il a souhaité se mobiliser.
Par communiqué de presse en date du 17 mai 2018, l'Assemblée des départements de France a accepté les propositions du Gouvernement, lesquelles confirment une aide financière accrue, concentrée sur la phase d'accueil et d'évaluation de la minorité et de l'isolement, à compter du 1er janvier 2019. Chaque évaluation sera financée à hauteur de 500 euros et chaque mise à l'abri à hauteur de 90 euros par jour pendant quatorze jours, puis de 20 euros du quinzième au vingt-troisième jour. C'est donc un financement accru pour la phase d'évaluation.
Par ailleurs, le Gouvernement a accordé un financement exceptionnel aux départements à hauteur de 30 % du coût des frais de prise en charge du nombre de MNA supplémentaires accueillis au 31 décembre 2017 par rapport au 31 décembre 2016. Le montant de ce financement exceptionnel de l'État a été fixé par un arrêté du 23 juillet 2018, qui prévoit que le département de la Haute-Savoie sera indemnisé à hauteur de 900 000 euros. L'ensemble représente un financement à hauteur de 132 millions d'euros.
Pour renforcer les outils à disposition des départements dans la phase d'évaluation de la minorité et de l'isolement, et afin de limiter les situations de réévaluation, qui sont coûteuses pour les départements et qui sont nocives pour les mineurs, l'article 51 de la loi du 10 décembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie prévoit la possibilité d'un relevé d'empreintes digitales qui feront l'objet d'un traitement automatisé.
Enfin, un travail interministériel sur un référentiel d'évaluation est en cours afin de permettre une harmonisation des pratiques et de consolider, à l'égard de tous, la légitimité des évaluations.
Voilà ce qui est proposé actuellement.
Mme la présidente. La parole est à M. Loïc Hervé, pour répondre à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, en trente-six secondes.
M. Loïc Hervé. Madame la ministre, je vous remercie de vos réponses ; je sais l'attention que vous portez à la question des mineurs non accompagnés et, particulièrement, à la situation de la Haute-Savoie. Je salue les décisions ponctuelles qui ont été prises et qui sont importantes. Je les transmettrai aux élus de la Haute-Savoie.
Je profite de cette intervention pour attirer votre attention sur la coopération avec la Police aux frontières. Je rappelle que la Haute-Savoie est un département frontalier : lorsque des jeunes arrivent à des postes-frontières, notamment le poste-frontière du tunnel du Mont-Blanc, des contrôles de majorité, mais aussi des contrôles liés aux visas biométriques sont réalisés. Je n'irai pas plus loin ce matin, mais je vous transmettrai les éléments, madame la garde des sceaux, car il faut une harmonisation à l'échelon national afin d'améliorer la situation et la coopération entre la Police aux frontières et le conseil départemental.
- page 14017
Page mise à jour le