Question de Mme BENBASSA Esther (Paris - CRCE-R) publiée le 01/11/2018
Mme Esther Benbassa attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les indemnités de responsabilité destinées aux préfets et sous-préfets et entérinées par décret n° 2008-1144 du 6 novembre 2008 relatif à la modulation de l'indemnité de responsabilité attribuée aux préfets et aux sous-préfets en poste territorial. Par cette prime, les préfets et sous-préfets seraient soumis chaque année, au même titre que dans le fonctionnement des entreprises privées, à une culture du résultat.
En effet, s'agissant notamment des sous-préfets, les parts seraient attribuées lors de leur évaluation individuelle : elles dépendraient des objectifs à atteindre chaque année en matière de sécurité publique, de sécurité routière et d'aide à l'emploi.
Dans un premier temps, elle souhaite l'alerter sur les risques d'inégalités et de dangers engendrés par cette rétribution aux résultats, qui tend à mettre la pression davantage sur l'administration dans la course aux chiffres dans le domaine de la délinquance et de la sécurité sur leur territoire.
Ainsi s'interroge-t-elle quant à l'éventuelle corrélation entre les chiffres d'expulsions de personnes migrantes et les montants des primes de résultats. À ce sujet, il avait apporté une réponse insatisfaisante : les expulsions ne feraient pas partie des critères fixés directement aux préfets, mais elles pourraient être évoquées dans le cadre de l'évaluation des activités.
Enfin et dans l'objectif de dissiper ce flou qui réside dans la procédure d'octroi des primes de fonction et de résultat, elle souhaite savoir si de telles primes pourraient être rendues publiques par le ministère. Dès lors qu'elles viseraient à promouvoir l'efficacité des missions des préfets et sous-préfets, il semble en effet pertinent dans un objectif de transparence des dépenses publiques de publier le montant des indemnités de chaque préfet et sous-préfet.
Le 31 mars et le 4 septembre 2017, le préfet des Alpes-Maritimes a été condamné à deux reprises par le tribunal administratif de Nice pour atteinte au droit d'asile de migrants. Partant de ce cas précis, elle souhaiterait savoir si les condamnations administratives des préfets pour violation du droit d'asile dans les cas d'expulsions illégales de personnes migrantes, entrent en compte de manière positive ou négative lors de l'affectation de la prime, ou si elles sont dénuées d'effet sur ladite prime.
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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 11/04/2019
Depuis le 1er janvier 2018, le régime indemnitaire des membres du corps préfectoral a évolué. Conformément aux dispositions de l'arrêté du 21 avril 2017, ils bénéficient, depuis cette date, du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP), à l'instar d'une grande partie des corps de la fonction publique. Antérieurement, ils percevaient deux primes : l'indemnité forfaitaire pour frais de représentation, qui ne comprenait qu'une part fonctionnelle et dont le montant n'était pas soumis à fiscalisation, et l'indemnité de responsabilité du corps préfectoral, qui comprenait une part fonctionnelle et une part variable. Le RIFSEEP est composé de deux parts : une indemnité de fonction, de sujétions et d'expertise, part fixe, versée mensuellement liée à la nature du poste et à son groupe de classement RIFSEEP et un complément indemnitaire annuel (CIA), part variable versée en fin d'année. Avec la mise en place du RIFSEEP, les modalités d'attribution des primes ont été revues dans un principe de déconcentration et de responsabilisation des préfets de région. Désormais, le ministre de l'intérieur fixe à chaque préfet de région des lettres d'objectifs d'envergure interministérielle (lutte contre le terrorisme, respect du droit d'asile, développement économique, préservation de l'environnement, etc.) et portant sur leur périmètre géographique. Ces objectifs sont ensuite déclinés aux préfets de départements et aux préfets délégués relevant de leur périmètre. Les préfets de région les évaluent sur la base de la lettre d'objectifs qui leur a été notifiée et formulent une proposition de CIA. Ces propositions sont ensuite harmonisées et validées en comité de rémunération des préfets. À l'instar des préfets, les sous-préfets font également l'objet d'une évaluation chaque année, sur laquelle s'appuie le préfet de département pour octroyer un montant de CIA dans le respect des plafonds réglementaires. Par ailleurs, dans un arrêt du 10 mars 2010, le Conseil d'État a conclu que les arrêtés d'attribution de primes ne peuvent être communiqués à des tiers que si les noms sont occultés et, le cas échéant, toute mention permettant d'identifier les personnes concernées car ils constituent une appréciation sur la manière de servir et sur le comportement des agents. Enfin, il n'y a pas de corrélation automatique entre le nombre et le sens des décisions de justice dirigées contre les décisions d'un préfet et le montant des primes. Néanmoins, le retentissement ou les conséquences éventuelles de certaines décisions de justice sont susceptibles d'être pris en compte dans l'appréciation globale de la manière de servir d'un préfet ainsi que de l'atteinte des objectifs qui lui ont été fixés.
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