Question de M. FÉRAUD Rémi (Paris - SOCR) publiée le 15/02/2019

Question posée en séance publique le 14/02/2019

M. Rémi Féraud. Dans la guerre contre Daech, ce sont les Kurdes qui ont neutralisé plus de 30 000 djihadistes et chassé cette organisation terroriste de tous les territoires qu'elle occupait. Ils ont, pour ce faire, sacrifié des milliers de combattants et se sont révélés être des alliés remarquables. Alors, comment accepter qu'à l'heure de la victoire militaire les Kurdes soient abandonnés par la coalition internationale ?

Après le retrait annoncé de l'armée américaine, une fois privés de défense aérienne et d'armes lourdes, les Kurdes, mais aussi leurs alliés arabes et chrétiens, se retrouveront seuls face à une prévisible agression du Président turc et de ses supplétifs islamistes. Nous ne pouvons pas l'accepter ! L'invasion du canton d'Afrine, il y a tout juste un an, a déjà entraîné des crimes, des destructions et des déplacements de la population kurde qui s'apparentent à un véritable nettoyage ethnique.

Face à une situation très inquiétante, il est indispensable que la France et l'Europe s'engagent aujourd'hui avec force. Des voix s'élèvent pour appeler à une initiative européenne soutenant la création par l'ONU d'une zone de protection dans le nord de la Syrie. Cette zone de protection dissuaderait toute invasion de l'armée turque, ainsi que le retour des troupes du régime syrien. Elle empêcherait l'expansion de l'influence russe et iranienne. Enfin, elle favoriserait une meilleure protection des minorités dans les négociations sur l'avenir de la Syrie.

La France a là une occasion historique de sauver l'honneur de la coalition contre Daech en se mobilisant réellement avec ses alliés européens. Pouvons-nous compter sur le Président de la République et sur le Gouvernement pour agir en ce sens ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – M. François Bargeton et Mme Françoise Laborde applaudissent également.)

- page 2479


Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre des armées publiée le 15/02/2019

Réponse apportée en séance publique le 14/02/2019

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d'État auprès de la ministre des armées. Monsieur le sénateur, comme vous l'avez rappelé, nous sommes à la veille d'une étape décisive au Levant.

L'engagement militaire de la communauté internationale dans la région vise à défaire Daech et à permettre aux forces irakiennes de contenir sa résurgence. L'opération Chammal, en formant les forces irakiennes et en appuyant les Kurdes syriens et leurs partenaires, permet d'achever la reconquête de l'ultime bastion de Daech. Cependant, je le dis aujourd'hui, les terroristes s'accrochent aux quelques enclaves qu'il leur reste ou se dissimulent au milieu des populations civiles.

Nos alliés américains ont annoncé leur retrait. Néanmoins, à la suite de discussions, ils ont conditionné ce retrait à la défaite du califat territorial. Il est également essentiel que ce désengagement de Syrie ne soit pas précipité, et ce pour deux raisons : nous entrons dans une phase difficile de vérification de terrain, d'une part, et la situation humanitaire s'aggrave et nous préoccupe, d'autre part.

Nous poursuivons donc nos discussions avec les Américains, au sein de la coalition, pour donner des garanties aux Kurdes de Syrie, contrer les ambitions iraniennes et éviter la dispersion des combattants étrangers.

Bien sûr, nous continuerons d'apporter notre soutien aux efforts menés en faveur de la stabilité de la région. Nous ne pouvons abandonner les forces arabes et kurdes, qui ont combattu vaillamment. Une solution négociée sera nécessaire ; elle devra préserver leur sécurité, mais aussi répondre aux préoccupations de sécurité légitimes de la Turquie.

Dans ce contexte, dont vous conviendrez qu'il est très complexe, nous restons naturellement attachés à ce qu'une solution politique puisse être apportée globalement à la crise syrienne et nous poursuivrons les échanges avec nos partenaires.

M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour la réplique.

M. Rémi Féraud. J'entends l'intention, mais je crois qu'il faudra, à un moment, passer de l'intention aux actes ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

- page 2480

Page mise à jour le