Question de Mme BONNEFOY Nicole (Charente - SOCR) publiée le 22/05/2019

Question posée en séance publique le 21/05/2019

Mme Nicole Bonnefoy. Monsieur le ministre de l'agriculture, le 11 avril dernier, la justice reconnaissait Monsanto responsable du dommage causé à l'agriculteur Paul François, victime du Lasso, un puissant herbicide. Voilà quelques jours, aux États-Unis, Monsanto était de nouveau condamné à indemniser les victimes du Roundup.

Depuis près de deux ans, le groupe socialiste du Sénat demande avec insistance la création d'un fonds d'indemnisation pour les victimes des produits phytosanitaires et, depuis près de deux ans, le Gouvernement refuse cette création.

En effet, le 1er février 2018, nous votions ici même, à l'unanimité, la création de ce fonds d'indemnisation. Monsieur le ministre, vous siégiez alors sur nos travées et vous l'aviez également approuvée.

Nous formulions de nouveau cette demande dans le projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dit Égalim, mais votre prédécesseur la rejeta.

En décembre dernier, ce fut à votre tour, en tant que ministre, de la rejeter, cette fois dans la loi de finances pour 2019. Nous sommes en mai 2019 et, dix-huit mois après l'adoption de la proposition de loi sénatoriale, rien n'a avancé. Même votre promesse de remise d'un rapport au 30 avril 2019 n'a pas été honorée.

Vous connaissez pourtant l'inutilité d'un tel rapport, monsieur le ministre, celui-ci étant nécessairement redondant avec les travaux menés par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, l'Inserm, en 2013, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, l'Anses, en 2016 et trois inspections générales en 2018. À cela, il faut ajouter le récent rapport de l'ONU sur l'état de la biodiversité ou encore le scandale Monsanto et la découverte de pratiques de lobbying insupportables.

Monsieur le ministre, pour toutes ces raisons, il est temps de sortir du déni politique et industriel, en faisant en sorte que les grandes firmes prennent et assument toutes leurs responsabilités. C'est comme cela aussi que nous changerons durablement les pratiques.

Parce que les malades attendent, souffrent et sont livrés à eux-mêmes, pouvez-vous nous dire précisément quand ce fonds d'indemnisation verra le jour ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 22/05/2019

Réponse apportée en séance publique le 21/05/2019

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Nicole Bonnefoy, je voudrais commencer par saluer le travail des parlementaires engagés sur ce sujet, députés comme sénateurs.

Plusieurs mesures, vous le savez, ont déjà permis de réduire l'utilisation des produits phytosanitaires. Avec François de Rugy, Frédérique Vidal et Didier Guillaume, j'ai installé officiellement le 10 avril dernier le comité d'orientation stratégique et de suivi du plan national de réduction des produits phytosanitaires.

S'agissant de la création du fonds d'indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques, il convient d'être justes et attentifs à la souffrance des victimes. Il convient aussi d'être responsables en mettant en place un dispositif d'indemnisation cohérent avec les connaissances scientifiques actuelles – nous attendons en effet les rapports – et les voies d'indemnisation préexistantes, en particulier dans le cadre des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Lors de l'examen de la proposition de loi à l'Assemblée nationale en janvier dernier, j'ai proposé que la discussion reprenne lors des débats sur les lois de finances ou lors de la poursuite de l'examen de la proposition de loi. J'ai pris l'engagement qu'y figurent des articles tendant à créer ce fonds, sur la base des discussions ayant eu lieu lors de l'examen de votre proposition de loi.

En attendant, un rapport sur le financement et les modalités de création d'un fonds d'indemnisation doit vous être rendu d'ici à la fin du mois de juin. J'ai souhaité que ce délai de quelques mois soit mis à profit pour travailler avec le ministère de l'agriculture sur le financement du fonds. J'invite tous les parlementaires à rester mobilisés ; nous aurons l'occasion de débattre de nouveau de ce sujet cette année.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour la réplique.

Mme Nicole Bonnefoy. Je vous remercie, madame la ministre, de rappeler le travail important qui a déjà été réalisé sur cette question, en particulier au Sénat. Nous attendons avec impatience le rapport qui sera remis à la fin du mois de juin.

Vous évoquez le futur projet de loi de financement de la sécurité sociale pour la création du fonds. Nous serons particulièrement vigilants sur sa création, mais aussi sur son périmètre et ses modalités de mise en œuvre. Nous regrettons cependant d'avoir perdu deux ans ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

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