Question de Mme CANAYER Agnès (Seine-Maritime - Les Républicains) publiée le 03/10/2019
Mme Agnès Canayer attire l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur les contraintes pesant sur les communes de la Seine-Maritime liées à l'application du règlement départemental de défense incendie et secours.
L'aménagement de la commune et les autorisations de construire sont des préoccupations majeures des maires. Ces prérogatives permettent de définir l'avenir de la commune et de répondre aux attentes des administrés et aux enjeux de territoire. Malheureusement, de nombreuses contraintes sont venues entraver la libre administration des collectivités territoriales.
Le transfert aux intercommunalités de la compétence en matière d'urbanisme et de la maîtrise du foncier par les communes, désormais prise en compte par le projet de loi n° 677 (2018-2019) relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, éloigne les centres de décisions de la commune. Dans les zones littorales, ces contraintes urbanistiques et de maîtrise du foncier sont accentuées malgré les petites avancées de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
À cela s'ajoutent les contraintes de sécurité imposées par l'obligation de mise en œuvre du règlement départemental de défense extérieure contre l'incendie en Seine-Maritime pris en application du référentiel national de la défense extérieure contre l'incendie tel que fixé par l'arrêté du 15 décembre 2015. L'une des difficultés majeures réside dans la réglementation relative à l'emplacement des bornes incendie qui exige une distance maximale obligatoire entre les points de raccordement au réseau d'eau et les habitations. Désormais, toute nouvelle construction doit se situer à moins de 200 mètres d'une borne incendie, ou à moins de 400 mètres si l'habitation est isolée. Ce principe, appliqué sans aucune souplesse et adaptation aux spécificités de chaque commune, a des conséquences désastreuses sur la capacité des communes à délivrer de nouveaux permis de construire tout en générant des coûts lourds à supporter pour les communes.
Aussi, elle souhaite connaître les intentions du Gouvernement pour lever ces contraintes normatives et ainsi rendre aux élus locaux toute leur latitude pour mener leurs projets au service de leurs concitoyens.
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Transmise au Ministère de l'intérieur
Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales publiée le 16/10/2019
Réponse apportée en séance publique le 15/10/2019
Mme Agnès Canayer. Ma question porte sur les contraintes fortes liées à l'application du règlement de défense incendie et secours dans le département de la Seine-Maritime, et plus généralement sur les lourdeurs des normes qui pèsent sur les communes.
En application de la loi Warsmann du 17 mai 2011, dont l'objectif premier est la simplification du droit, le maire « assure la défense extérieure contre l'incendie ».
Or, en Seine-Maritime, force est de constater que les modalités d'application du référentiel national d'incendie et de secours sont loin de simplifier la vie des maires ! À tel point que le préfet a dû s'y reprendre à deux fois pour élaborer le règlement départemental incendie et secours, finalement adopté le 26 octobre 2017. Depuis, sa mise en uvre crée toujours autant de difficultés, notamment dans les communes rurales.
La sécurité des habitants est une priorité pour tous les maires. Mais l'interprétation souvent très stricte et peu pragmatique des dispositions de ce règlement départemental en Seine-Maritime génère des contraintes disproportionnées sur certains territoires.
L'appréciation de la distance entre le point d'eau et l'habitation est en effet source de difficultés. Le règlement dispose que toute nouvelle construction doit se situer à moins de 200 mètres d'une borne à incendie ou à moins de 400 mètres si l'habitation est isolée. Ce principe d'interprétation très stricte a des conséquences désastreuses sur la capacité des communes à délivrer de nouveaux permis de construire.
De même, l'interprétation du calibrage des réserves à incendie suscite de fortes incompréhensions chez les élus.
Les maires, dépossédés de leurs prérogatives d'urbanisme au profit des intercommunalités, contraints en zone littorale par la protection des rivages et limités par l'application stricte du règlement départemental incendie et secours, n'ont plus aucune marge de manuvre pour l'aménagement du territoire communal. Cette situation favorise le sentiment d'impuissance et d'inutilité régulièrement soulevé par ces élus.
Pourquoi le référentiel national fait-il l'objet d'une réglementation beaucoup plus stricte en Seine-Maritime que dans les autres départements ? Comment mieux prendre en compte l'avis des maires dans la détermination des modalités d'application dudit règlement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Madame la sénatrice, chère Agnès Canayer, je vous prie d'excuser l'absence de M. le ministre de l'intérieur ; je répondrai à sa place.
La défense extérieure contre l'incendie (DECI) a pour objet d'assurer l'alimentation en eau des moyens des services d'incendie et de secours. Elle est placée sous l'autorité du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI).
La réforme de la DECI conduite en 2015 instaure une approche novatrice : la DECI ne répond plus à une norme nationale, mais relève d'un règlement départemental élaboré par le préfet. L'objectif est double : une concertation renforcée avec les collectivités territoriales et une plus grande souplesse pour des mesures adaptées à chaque territoire.
Ce règlement est élaboré par le service départemental d'incendie et de secours (SDIS), en concertation avec les maires et l'ensemble des acteurs concourant à la DECI. Il est arrêté par le préfet du département ; nous connaissons évidemment tous la double tutelle des SDIS. Ses préconisations s'appuient sur des objectifs de sécurité et sur une analyse des risques répondant de la manière la plus adaptée à la diversité des risques au sein du département.
Une fois le règlement départemental de la DECI arrêté, une de ses dispositions essentielles peut se révéler impossible à appliquer dans certaines communes. Dans ce cas, il peut être modifié.
Dans le département de la Seine-Maritime, l'adoption du règlement de la DECI en février 2017 a suscité de nombreuses réactions de la part des élus. En conséquence, la préfecture l'a révisé en octobre 2017 après concertation avec les représentants des collectivités territoriales. Cette révision a recueilli le soutien des élus locaux.
Par ailleurs, les communes ou les EPCI peuvent mettre en place un schéma communal ou intercommunal de DECI. Ce document permet notamment de détailler la DECI du territoire et de planifier sur plusieurs années les équipements à mettre en place. Il est soumis à l'avis du SDIS.
Il n'appartient pas au ministère de l'intérieur de modifier les préconisations s'agissant des compétences relevant des collectivités territoriales. Je rappelle que toutes les possibilités juridiques et techniques offertes dans le cadre de la DECI doivent être utilisées dans les territoires pour déployer des réponses réalistes et adaptées.
Enfin, le ministère de l'intérieur n'élaborera pas de dispositions qui contraindraient le contenu des règlements départementaux. Cela serait évidemment en opposition avec les fondements mêmes de la réforme de 2015, déployés sur le terrain de 2016 à 2017. Il convient de laisser le temps nécessaire à cette mise en place et à la réalisation d'éventuels ajustements corrélatifs ; il est toujours possible d'en effectuer.
Mme la présidente. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour la réplique.
Mme Agnès Canayer. Madame la ministre, j'entends votre volonté de prendre en compte l'intérêt des communes et d'adapter les dispositions à leurs spécificités.
Mais force est de constater que la situation en Seine-Maritime reste assez problématique. Les maires que nous rencontrons se sentent très contraints par le règlement départemental. Un certain nombre d'ajustements supplémentaires s'imposent donc.
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