Question de M. GILLÉ Hervé (Gironde - SOCR) publiée le 10/10/2019
Question posée en séance publique le 09/10/2019
M. Hervé Gillé. Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, voilà quelques jours, plus de 20 000 policiers manifestaient pour exprimer leur malaise.
La crise dans la fonction publique hospitalière est telle que Mme la ministre des solidarités et de la santé reconnaît elle-même que le pacte de refondation des urgences sera insuffisant pour calmer les esprits. Médecins, infirmiers, pompiers sont tous exposés, en première ligne, à la précarité, aux violences de la société.
Les drames récents dans l'éducation nationale illustrent également ce désespoir lié à l'absence de reconnaissance en l'occurrence des personnels enseignants.
Dans ce contexte de défiance, la réforme territoriale de la direction des finances publiques, menée au pas de charge, vise en réalité à supprimer plus de 2 000 postes dès l'année prochaine, et 15 000 à terme.
Monsieur le ministre, personne n'est dupe : derrière l'annonce de cette réforme se dissimule un nouveau transfert de charges vers les collectivités territoriales. Or, vous le savez pertinemment, les dotations financières de l'État pour le fonctionnement des maisons France services seront largement insuffisantes.
Les seuls interlocuteurs de nos concitoyens seront des animateurs généralistes dont ne nous savons rien aujourd'hui de leur formation ou de leurs compétences. Avec cette privatisation déguisée du service public, vous n'offrez aucune garantie, et notamment celle de la confidentialité, surtout quand ces tâches sont confiées à des buralistes, de moins en moins nombreux dans un monde rural une nouvelle fois discriminé.
Comment ne pas évoquer un risque d'aggravation de la fracture sociale si vous ignorez la fracture numérique 20 % de la population en décrochage numérique, comme le rappelle le Défenseur des droits , alors que c'est une des clés de vos économies ? Rien n'est prévu pour la prise en charge de cette population, qui reviendra dans les accueils des mairies, lesquels assument, sans moyens affectés, le rôle d'écrivain public et numérique.
Monsieur le ministre, quels sont vos objectifs de réduction d'effectifs et de maintien des services publics de proximité ? Quelles garanties nous apportez-vous ? Comment repensez-vous le rôle des communes et des EPCI, qui devront pallier les difficultés d'accessibilité numérique ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR et sur des travées du groupe CRCE.)
Réponse du Ministère de l'action et des comptes publics publiée le 10/10/2019
Réponse apportée en séance publique le 09/10/2019
M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le sénateur Gillé, je vous souhaite la bienvenue, avant de répondre à votre question, concernant votre département de la Gironde en particulier, et la réforme des finances publiques en général.
La direction générale des finances publiques est née de la fusion de la comptabilité publique et du service des impôts. Ce qui se passe aujourd'hui, dans la continuité de ce qui s'est produit les années précédentes, quels que soient les gouvernements, à savoir la fermeture de 200 trésoreries par an, n'est pas acceptable. Nous avons dû nous adapter, par un supplice chinois territorial je le sais pour être moi-même élu local , à un manque de vision sur l'organisation d'une partie de nos réseaux. La suppression des effectifs n'est pas pour grand-chose, monsieur le sénateur, dans les perspectives de refonte des trésoreries.
Des transformations de ce réseau, que chacun de nos concitoyens a pu constater, sont nées de la transformation de Bercy, avec l'impôt à la source, souhaité notamment par votre groupe politique, voilà quelques mois encore, la déclaration tacite du revenu à partir de l'année prochaine et la suppression de la taxe d'habitation. Je rappelle que 4 000 agents des finances publiques s'occupent de la taxe d'habitation et de son contentieux, qui est le premier en volume à arriver dans les bannettes des agents des services publics. Quand nous aurons supprimé cette taxe, un certain nombre d'agents devront, à l'évidence, faire autre chose ou en tout cas agir différemment.
Nous sommes bien loin, monsieur le sénateur, de la question du numérique. Les maisons France services pourvoiront en partie, mais pas totalement, à ce que nous faisons mal jusqu'à présent. Ainsi, je regardais votre département, où au moins quatre trésoreries rurales dans votre sphère d'influence pardon de le dire ainsi ! sont ouvertes deux après-midi seulement par semaine, jusqu'à seize heures trente. Les Français souhaitant s'y rendre doivent donc prendre une demi-journée de congés, ce qui, à mon sens, ne correspond pas au bon service public que nous devons leur assurer. Nous devons adapter ce service public.
J'ai pris l'engagement qu'il n'y aurait aucune fermeture de trésorerie en 2020. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes Les Républicains, SOCR et CRCE.) Je sais que vous êtes surpris, mesdames, messieurs les sénateurs, car cela n'est pas arrivé depuis vingt et un ans. (Nouvelles exclamations. MM. Martin Lévrier et François Patriat applaudissent.)
J'y insiste, en 2020, il n'y aura aucune fermeture de trésorerie, et nous signerons avec les présidents de conseil départemental qui accepteront les nouvelles cartes. Une quinzaine d'entre eux m'ont déjà donné leur accord ; pour les autres départements, y compris la Gironde, nous continuons de discuter. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour la réplique. Je vous accorde trois secondes supplémentaires, mon cher collègue, comme cadeau d'anniversaire. (Rires.)
M. Hervé Gillé. Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je crains simplement que ces mesures ne continuent à creuser la fracture territoriale, à renforcer l'insécurité financière et juridique des citoyens et des élus locaux, surtout ceux qui sont éloignés des centres de décision. C'est en total contresens avec les attentes actuelles ! (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR. M. Éric Bocquet applaudit également.)
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