Question de M. KANNER Patrick (Nord - SOCR) publiée le 20/03/2020

Question posée en séance publique le 19/03/2020

M. Patrick Kanner. Monsieur le Premier ministre, 89 décès supplémentaires, doublement des cas infectieux en vingt-quatre heures : nous devons aborder les questions liées à cette épidémie dans un esprit de responsabilité.

Rien n'est plus remarquable que l'attitude de nos soignants qui, en dépit d'un danger possible, et même presque certain, n'en continuent pas moins d'exercer leur profession, parce que nous avons tous besoin de leurs compétences et de leur savoir-faire. Ils savent que leur vie a pour vocation de permettre aux autres de vivre.

Soutenir le monde de la santé est une priorité, en particulier pour le Gouvernement. Je souhaite qu'il nous apporte des informations précises sur les moyens qui sont déployés, à l'heure où nombre de professionnels de santé sont obligés de « bricoler », si vous me permettez cette expression. Y aura-t-il assez de respirateurs, de brancards, de médecins, d'infirmières ? Combien de lits de réanimation sont-ils aujourd'hui ouverts ? Combien le seront dans les prochaines semaines ? D'autres hôpitaux de campagne sont-ils prévus dans notre pays ? Pourquoi les soignants de ville, qui sont également mobilisés dans cette « guerre », pour reprendre le mot du Président de la République, ne reçoivent-ils pas de kits de protection ? Qu'en est-il des bénévoles associatifs, auxquels on demande d'aller au contact de la population la plus fragile et la plus exposée sans leur délivrer de masques ni de gel ? Pourquoi les personnels de l'aide à l'enfance ne figurent-ils pas dans la liste des professions prioritaires, alors que l'on sait que les enfants représentent un vecteur important de transmission du virus ? Nous ne pouvons que nous interroger, monsieur le Premier ministre, sur le travail d'anticipation du Gouvernement.

Enfin, le manque de tests pose un problème majeur, car si nous en disposions en grande quantité, nous pourrions repérer les individus suspects et les isoler de leurs contacts potentiels. Pour sortir de l'étape du confinement, il faudra des tests ! Il ne faut pas opposer la stratégie de confinement à l'utilisation des tests. L'OMS insiste sur ce point : ce sont deux phases qui doivent se succéder rapidement. Il faut tester, tester et encore tester ! Le professeur Delfraissy l'a rappelé hier lors du journal du soir de France 2. J'espère, monsieur le Premier ministre, que nous aurons des réponses satisfaisantes à ces questions, dans l'intérêt des Français. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)


Réponse du Premier ministre publiée le 20/03/2020

Réponse apportée en séance publique le 19/03/2020

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président Kanner, il y a beaucoup de questions dans votre question, et c'est bien légitime.

Notre objectif principal, aujourd'hui, est de contenir l'évolution du nombre de cas graves, ceux-ci ayant malheureusement souvent vocation à être accueillis dans les services de réanimation et de soins intensifs, dont la capacité est forcément limitée : c'est vrai en France comme partout dans le monde. Aucun système de santé au monde n'est capable de faire face à un afflux massif de patients dont l'état justifie leur admission au même moment dans un service de réanimation ou de soins intensifs.

C'est la raison pour laquelle nous avons pris des mesures pour ralentir la circulation du virus. Nous avions aussi, bien avant, commencé à augmenter nos capacités d'accueil dans les services de réanimation et de soins intensifs, en transformant des lits, d'une part, et en déclenchant le Plan blanc, d'autre part, afin de déprogrammer des opérations non urgentes pour accroître l'offre de lits en services de réanimation et de soins intensifs. Hier soir, grâce à ces déprogrammations et à l'effort de reconversion de lits que nous avons réalisé, 3 700 lits de soins critiques adultes et 300 lits pédiatriques étaient disponibles pour les malades du Covid-19.

Cette augmentation de la capacité permettra-t-elle de faire face à l'afflux de nouveaux patients ? C'est l'enjeu du moment. Les mesures de confinement strictes qui ont été prises devraient avoir un impact massif dans les jours qui viennent. Elles ont vocation à lisser le pic.

Dans le même temps, nous nous mobilisons, avec l'industrie française, pour faire en sorte que le matériel nécessaire puisse être disponible. Je pense notamment aux respirateurs. Je ne suis pas médecin et je ne veux surtout pas donner le sentiment que je maîtrise ces sujets – à supposer que j'y arrive ! –, mais il y a respirateur et respirateur. On ne peut pas utiliser tous les types de respirateurs pour des malades dont la situation est très grave et l'état général très affecté, sauf à leur faire courir de réels dangers. Il faut donc pouvoir équiper les lits de respirateurs adaptés. Nous avons relancé les commandes, les entreprises vont augmenter leur production. Cela nous ramène au sujet de la continuité de la vie économique : si nous voulons pouvoir disposer de tests, de respirateurs et de tout le matériel nécessaire, il faut que les lignes d'approvisionnement et les chaînes logistiques continuent de fonctionner. Sinon, nous n'y arriverons pas ! C'est pourquoi il est indispensable d'assurer la continuité de la vie économique, en prenant évidemment toutes les dispositions nécessaires pour garantir la sécurité et la santé des salariés et de nos concitoyens.

Au-delà de l'augmentation de la capacité d'accueil des services de réanimation, notre stratégie consiste aussi à utiliser des moyens militaires pour déplacer les malades, avec toutes les garanties de sûreté nécessaires, depuis les zones où la pression sur le système sanitaire est très forte vers des régions où il peut encore faire face à l'afflux de nouveaux patients. Des malades ont ainsi été transportés de Mulhouse à Toulon. Nous avons également choisi d'installer à Mulhouse un hôpital de campagne d'une capacité de trente lits de réanimation, afin d'aider le système de santé local.

Les priorités sanitaires sont la limitation du nombre de cas graves et l'augmentation de la production des matériels nécessaires. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM. – M. Franck Menonville applaudit également.)

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