Question de Mme LASSARADE Florence (Gironde - Les Républicains) publiée le 30/04/2020
Mme Florence Lassarade appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la situation de la filière laitière. La situation déjà difficile des producteurs de lait s'est aggravée en raison de la crise sanitaire. Le marché des produits laitiers et du lait de vache est profondément déséquilibré. Les indicateurs globaux du marché, les prix du marché spot, les contrats sur les marchés à terme pour le beurre et le lait en poudre, ainsi que les déclarations des transformateurs et producteurs de toute l'Europe annoncent tous une forte dégradation du marché. Les prix risquent de plonger et d'entraîner les exploitations dans leur chute. Dans ce contexte exceptionnellement dramatique de la pandémie de SARS-CoV-2, les producteurs demandent la mise en œuvre urgente du programme de responsabilisation face au marché (PRM). Il s'agit d'un instrument de l'Union européenne (UE), soutenu par les organisations de producteurs de lait de toute l'Europe et capable d'empêcher un effondrement du secteur. Le PRM permet une réduction volontaire de la production. Les producteurs qui produiraient moins dans la situation actuelle que lors de la même période de l'année dernière recevraient un bonus par litre de lait non produit. Dans le même temps, les autres producteurs doivent être tenus de ne pas augmenter leur production sur la même période. Cela peut permettre d'éviter la chute des prix, qui devient de plus en plus imminente, et de protéger les agriculteurs de ce secteur d'une crise grave. Elle souhaiterait donc savoir si le Gouvernement envisage de mettre rapidement en œuvre le programme de responsabilisation face au marché.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 11/06/2020
La crise sanitaire actuelle a des impacts importants pour de nombreuses filières agricoles et agroalimentaires. C'est notamment le cas de la filière laitière, et en particulier pour les petites entreprises fromagères, souvent dans des filières sous indication géographique, et les producteurs laitiers fermiers, dont l'activité est si importante pour le patrimoine et l'économie des territoires. Cette filière fait face à des difficultés liées à des pertes de débouchés, compte tenu de la fermeture d'une majorité du secteur de la restauration hors domicile, de celle d'un nombre important de marchés, et de l'orientation des achats alimentaires vers des produits de première nécessité et moins d'achats festifs par les consommateurs. En outre, la période de forte production laitière (du fait du pic de collecte annuel) aggrave la problématique. Au niveau local, des réorganisations de collecte du lait et de leurs débouchés ont été mises en place pour optimiser les capacités de valorisation du lait, avec notamment la mobilisation de certaines grandes entreprises, en particulier coopératives. Il convient de saluer la solidarité exemplaire qui s'exerce dans la filière laitière et permet d'atténuer les difficultés rencontrées par les plus petites entreprises pour lesquelles les alternatives sont réduites. De plus, des efforts sont entrepris par les enseignes de grande distribution pour maintenir ouverts les rayons à la coupe et préserver la diversité des produits proposés aux consommateurs. La filière laitière, du producteur au transformateur, maille l'ensemble du territoire, avec une production souvent issue de très petites entreprises (TPE) et de petites et moyennes entreprises (PME), dont certaines qui apparaissent durement touchées par la crise. C'est bien pour préserver ce type d'entreprise que le Gouvernement a annoncé des mesures immédiates de soutien, dont peuvent bénéficier les exploitations agricoles et les entreprises de transformation, notamment les TPE et PME. Les outils européens de gestion des marchés sont essentiels pour faire face aux aléas des marchés agricoles. C'est pourquoi le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a porté au plan européen la nécessité que des mesures rapides et adaptées à chaque filière soient activées, en particulier des mesures de gestion des marchés laitiers de la politique agricole commune (PAC) prévues par le règlement de l'organisation commune de marché « OCM » (règlement (UE) n° 1308/2013) concernant les stockages privés. Le ministre chargé de l'agriculture a demandé par ailleurs, pour l'ensemble des secteurs agricoles, l'activation de l'article 222 du règlement « OCM ». Cet article permet, durant les périodes de déséquilibres graves sur les marchés, que la Commission adopte des mesures permettant, par dérogation aux règles de la concurrence, que des accords ou décisions puissent être pris notamment par des organisations interprofessionnelles ou des organisations de producteurs reconnues, en vue de stabiliser les marchés, notamment pour planifier temporairement la production. Il était en effet indispensable que la Commission européenne active ces outils et le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a mobilisé l'ensemble des partenaires européens pour porter conjointement cette demande. Pour le secteur laitier, la Commission européenne a apporté des réponses en proposant fin avril d'activer pour six mois, à compter du 1er avril, l'article 222 pour le lait pour permettre la planification de la production et des mesures de stockages privés pour la poudre de lait écrémé, le beurre et l'ensemble des fromages, sous indication géographique ou non. Pour soutenir les efforts des producteurs de modération de la collecte laitière, le centre national interprofessionnel de l'économie laitière, l'interprofession laitière nationale, souhaite mettre en place un dispositif d'aide à la réduction volontaire de la production, dont il a demandé la validation préalable à la Commission européenne. Ce dispositif pourra s'appuyer sur l'article 222 de l'OCM qui vient d'être activé par la Commission européenne, comme le demandait la France. Par ailleurs, à plus long terme, la France demande, dans le cadre de la négociation en cours sur la future PAC, la mise en place de seuils d'alerte pour une meilleure réactivité et une meilleure efficience des outils d'intervention sur les marchés. Elle porte également l'ajout dans la réglementation européenne d'une mesure de réduction volontaire de la production en cas de difficultés sur les marchés, à l'instar de la mesure européenne mise en place en 2016 dans le cadre de la crise laitière. Ces demandes sont en phase avec certains objectifs du programme de responsabilisation face au marché. L'ensemble du Gouvernement, dont le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, reste pleinement mobilisé pour suivre l'évolution de la situation pour l'ensemble des filières agricoles et apporter les solutions appropriées le plus rapidement possible. La propagation mondiale du covid-19 place le monde entier dans une situation inédite avec un double défi, sanitaire et économique auquel il convient de faire face collectivement.
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