Question de M. GROSPERRIN Jacques (Doubs - Les Républicains) publiée le 30/07/2020
M. Jacques Grosperrin attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation au sujet du marché de la plaquette forestière.
Les plaquettes forestières sont traditionnellement produites à partir de bois sec déchiqueté issu des activités de gestion durable des forêts ou du débardage effectué des forestiers. Alors que les résidus de bois de scierie (dont la qualité est supérieure) est appelée à être valorisée dans l'industrie des matériaux à base de bois dans la production de panneaux de particules par exemple.
La crise sanitaire liée au virus Covid-19 a créé des désordres conjoncturels sur les débouchés énergétiques des plaquettes forestières par une baisse évidente des consommations. Les producteurs de plaquettes forestières ne comprennent pas la précipitation avec laquelle certains gestionnaires ont rapidement basculé l'alimentation de certaines chaudières sur les énergies fossiles, alors même que des mesures organisationnelles avaient été mises en place par les professionnels pour assurer, en sécurité, la continuité des approvisionnements.
Depuis la fin du confinement, d'autres problèmes sont apparus : les débouchés traditionnels pour les connexes de scieries que sont les panneaux de particules, se sont également fortement restreints. Les scieries se tournent donc vers la filière énergétique des chaufferies bois afin d'écouler leurs sous-produits. L'offre explose, les prix plongent, la filière se congestionne. Au détriment des producteurs habituels dont l'activité principale est la production de plaquettes forestières.
Parallèlement, certaines chaufferies refusent les plaquettes forestières issues de l'évacuation des bois malades des forêts franc-comtoises, tels que les épicéas scolytés, les hêtres secs et les frênes atteints de chalarose. La filière a besoin de ce débouché, maintenant.
La filière craint ainsi que les équilibres établis entre les approvisionnements en plaquettes forestières et les connexes issus de la première transformation soient sur le point d'être rompus.
Or, la filière forêt-bois a besoin de la valorisation économique de certaines récoltes en bois énergie pour équilibrer financièrement des interventions sylvicoles tout au long de la vie des peuplements. Ces interventions sylvicoles, génératrices d'activité économique et d'emploi pour de nombreuses entreprises forestières, permettent d'atteindre l'objectif principal qui est de produire du bois d'œuvre dans le cadre d'une gestion durable de nos forêts.
Initialement, des équilibres avaient été trouvés pour chacune des chaudières bois de notre territoire afin de garantir un approvisionnement durable et responsable en produits d'origine forestière. Or cet équilibre en matière d'approvisionnement est menacé. Il souhaiterait donc connaître les mesures qu'il compte prendre afin de rééquilibrer la filière.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 12/11/2020
Les plaquettes forestières et produits connexes de scierie, respectivement produits annexes de la sylviculture et connexes de l'industrie de première transformation du bois connaissent actuellement une crise liée à un déséquilibre important entre l'offre et la demande. Le revenu généré par ces produits, en dépit des qualificatifs « annexes » et « connexes », s'avèrent déterminants dans l'équilibre économique des activités tant de l'amont que de l'aval de la filière. La pérennité de l'activité de certaines entreprises, à l'équilibre financier fragile, peut être en jeu. La crise des scolytes est à l'origine d'une offre pléthorique en plaquettes forestières bien au-delà du niveau actuel de la demande. Pour une partie importante des bois exploités à l'état sec dans le contexte de lutte phytosanitaire, la valorisation énergétique constitue la seule valorisation possible. Les besoins exprimés par les gestionnaires des chaufferies collectives et des unités de cogénération sont très en-deçà des volumes disponibles. Ils privilégient, pour des raisons économiques évidentes, un approvisionnement de proximité ; le coût du transport sur de longues distances s'avérant rapidement prohibitif au regard de la valeur unitaire du produit. Le premier volet du dispositif du plan de soutien exceptionnel contre les scolytes, annoncé par le ministre de l'agriculture et de l'alimentation lors du Conseil supérieur de la forêt et du bois du 8 octobre 2019, vise à limiter l'impact de cette crise sur le marché du bois, dans un contexte de saturation des débouchés dans les trois régions concernées, en soutenant la commercialisation des bois scolytés vers des régions où les industriels connaissent à l'inverse des tensions d'approvisionnement. Ce dispositif présente, en outre, l'intérêt de contribuer au renforcement de la structuration de la filière bois entre les acteurs de l'amont (production de bois et exploitation forestière) et ceux de l'aval (unités de transformation du bois et de production énergétique à partir de biomasse). Dans un esprit louable de solidarité de filière les dirigeants de plusieurs unités de cogénération ont pris la décision de faire évoluer le mix-produits d'approvisionnement, dans les limites contractuelles, tant au regard des engagements commerciaux pris avec leurs fournisseurs privés, que des limites inscrites dans les plans d'approvisionnement validés dans le cadre d'appels d'offres lancés par la commission de régulation de l'énergie (tarifs de rachats). L'évolution du mix-produit peut cependant, dans certains cas, être limitée par des considérations techniques. S'agissant des produits connexes de scieries, valorisés par les industries du panneau de process et du papier, leurs marchés se rétrécissent rapidement sous l'effet conjugué de la montée en puissance du recyclage du bois de récupération. Le recyclage des papiers et cartons augmente également de manière régulière. De manière conjoncturelle, la reprise lente du secteur de la construction après la crise covid-19 limite le retour des unités industrielles vers leur niveau optimal de production. Leurs capacités de stockage s'avèrent par ailleurs limitées. Le secteur papetier et celui de l'industrie du papier d'emballage et du carton connaissent une situation relativement comparable et peinent à retrouver une production « de croisière ». S'agissant plus particulièrement du papier graphique, la diminution tendancielle de la consommation de papier constatée depuis plusieurs années (de l'ordre de - 2 % par an) réduit progressivement ce débouché. Au regard de ces évolutions conjoncturelles et structurelles, si des réponses existent, elles s'inscrivent davantage dans le moyen et le long terme. À moyen terme, amplifier le développement de débouchés énergétiques semble une voie à privilégier. À ce titre, le renforcement du fonds chaleur inscrit dans la programmation pluriannuelle de l'énergie publiée le 21 avril 2020 devrait y contribuer. À plus long terme, il paraît indispensable d'encourager la mise en uvre de projets de recherche et développement pour de nouveaux débouchés orientés vers la bioéconomie.
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