Question de M. ARNAUD Jean-Michel (Hautes-Alpes - UC) publiée le 25/02/2021
M. Jean-Michel Arnaud attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la prise compte des spécificités montagnardes dans le futur plan stratégique national.
Si l'éligibilité des surfaces pastorales est confortée, la méthode de déclaration et de contrôle reste en débat. L'actuelle méthode repose sur l'expertise de l'agriculteur qui applique une classe de prorata aux surfaces qu'il déclare. Cette dernière a fait ses preuves mais la France expérimente à ce jour un dispositif de télédétection. Celui-ci reste limité car il exclut systématiquement toute surface en pente ou toute ressource fourragère sous couvert arboré.
Aussi, la méthode d'identification des pratiques bénéfiques pour l'environnement et le climat ne s'applique pas automatiquement au pastoralisme. La France adosse ces primes à la certification « Agriculture Biologique » ou encore à « Agriculture à haute valeur environnementale ». Pour les systèmes pastoraux, dont les pratiques sont analogues à celles des cahiers des charges « Agriculture biologique », le coût de la certification et l'absence de débouchés commerciaux réellement rémunérateurs restent des freins majeurs. Par ailleurs, la certification HVE paraît tout aussi inadaptée. Pourtant les bénéfices de ces systèmes, majoritairement ancrés sur des espaces classés sont multiples et reconnus. Ainsi, il convient de réfléchir à d'autres méthodes pour ne pas exclure le pastoralisme, précurseur en matière d'agro-écologie.
Étant donné la mise en place du plan national stratégique, il lui demande quelle est la position gouvernementale en ce qui concerne la particularité montagnarde au sein du futur plan stratégique national.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 14/04/2021
Réponse apportée en séance publique le 13/04/2021
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, auteur de la question n° 1542, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur trois points.
Tout d'abord, il y a la prise en compte de la différence « montagne » dans le futur plan stratégique national.
Nous constatons que l'éligibilité des surfaces pastorales sera subordonnée à une méthode de déclaration et de contrôle qui reste en débat. L'actuelle repose sur l'expertise de l'agriculteur, qui applique une classe de prorata aux surfaces qu'il déclare. Cette méthode a fait ses preuves en France, mais elle est aujourd'hui en évolution, et je crois savoir que vous expérimentez à ce jour un dispositif de télédétection en vigueur chez nos voisins espagnols et dénommé le Lidar. Il s'agit d'une technique de mesure à distance capable d'identifier le couvert végétal en place.
Certes, ce système paraît simple, mais son utilisation est limitée, car il exclut systématiquement toute surface en pente ou toute ressource fourragère sous couvert arboré. L'Association nationale des élus de la montagne (ANEM), notamment, a manifesté son opposition à cette nouvelle méthode. Comment allez-vous prendre en compte les spécificités géographiques des surfaces agricoles montagnardes ? Ne pensez-vous pas qu'une dérogation soit nécessaire pour les territoires de montagne ?
Ensuite, en cette période d'actualité singulière, avec les gels sévères que connaît le territoire national, j'ai pris acte avec beaucoup de satisfaction de la prise en compte rapide des calamités agricoles. Cela étant, je souhaiterais connaître les dispositions que vous envisagez de prendre pour faire face immédiatement aux besoins de trésorerie auxquels seront confrontés les exploitants arboricoles dès le mois d'octobre, après que les premières recettes des saisons précédentes auront été effectivement liquidées. J'aimerais également savoir quelles mesures vous envisagez pour accompagner, au-delà de la prise en compte des calamités agricoles, la filière tout entière, c'est-à-dire y compris la filière industrielle je pense aux stations de conditionnement et aux emplois saisonniers adossés , particulièrement touchée par cette crise de l'arboriculture.
Enfin, j'appelle votre attention sur la nécessité de travailler dare-dare, si vous me permettez l'expression, sur les réserves collinaires pour faire en sorte, notamment, que les mesures administratives permettant les autorisations soient allégées, à l'instar de ce qui se passe pour les éoliennes.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Arnaud, je vais commencer par la question sur les réserves collinaires, en saluant ma collègue chargée de la biodiversité, la secrétaire d'État Bérangère Abba, avec qui nous échangeons très régulièrement sur le sujet.
Soyez convaincu de notre approche pragmatique, notamment sur ces autorisations de prélèvement. Vous le savez, un important travail a été fait par nos services, à la demande des parlementaires, d'ailleurs, pour pouvoir finaliser ce fameux décret sur les débits d'usage de l'eau, une fois que les réserves ont été faites. Cela répond précisément à votre interrogation. En fait, la situation n'était pas acceptable. Même quand le projet avait été bien mené, avec toutes les concertations requises, le préfet prenait son arrêté de prélèvement sur une base juridique tellement fragile que, neuf fois sur dix, l'acte tombait quand il était attaqué. C'était désespérant pour tout le monde.
Courageusement, nos ministères, à la demande des parlementaires, je le répète, ont enfin rédigé ce décret, qui est aujourd'hui au Conseil d'État et qui pourra donc être signé dans les prochaines semaines. Cela sera une véritable avancée, attendue depuis à peu près dix ans par les acteurs de terrain. J'en profite de nouveau pour remercier ma collègue Bérengère Abba.
S'agissant des soutiens à l'arboriculture, la question est d'arriver au moment où la perte de revenus sera ressentie, c'est-à-dire surtout à partir de la mi-juin, avec un pic cet été. Pour la viticulture, en revanche, c'est dans un an. Aussi, les dispositions que nous sommes en train de mettre en place doivent prendre en compte cette réalité.
Il n'en reste pas moins que, d'ici là, il y a des sujets à traiter, comme vous l'avez très bien dit, et nous sommes en train de le faire. Ce sont notamment les mesures de chômage partiel ou autres pour accompagner celles et ceux qui en ont besoin.
Évidemment, nous avons bien en tête que l'impact est non seulement sur la production, mais aussi sur l'aval. Vous avez parlé des installations de conditionnement. J'y insiste, nous sommes en train d'y travailler, et je vous laisse imaginer le défi que cela représente, ainsi que les montants en jeu. Face à ce drame, nos outils habituels, faute d'être gréés, ne fonctionnent pas ; donc il nous faut tout réinventer. Nous essayons de le faire le plus rapidement possible, mais, si nous voulons être efficaces, il faut prendre le temps de la concertation.
Enfin, sur le Lidar, je vous rassure, c'est une expérimentation dont nous tirerons les conclusions, le moment venu, pour voir comment améliorer le système. Qu'est-ce qui est faisable ? Où cela peut-il être appliqué ? Nous le ferons avec méthode et pragmatisme. Je pense avoir démontré que c'était le type d'approche que je privilégiais.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour la réplique.
M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions. Je vous invite dans mon département, dans la vallée de la Durance et le Buëch, afin que vous puissiez vous rendre compte de la situation, même si je sais que vous en êtes conscient. Nous pourrons à l'occasion aussi parler de pastoralisme. Après votre déplacement dans la vallée Auvergne-Rhône-Alpes, je vous convie en région Sud Provence-Alpes-Côte d'Azur, dès que possible, pour soutenir le moral de nos agriculteurs et de nos arboriculteurs.
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