Question de M. PERRIN Cédric (Territoire de Belfort - Les Républicains) publiée le 24/06/2021
M. Cédric Perrin attire l'attention de Mme la ministre de la culture sur l'archivage des marchés publics issus de la dématérialisation des procédures de passation de certains marchés publics suite à la réforme du droit de la commande publique.
À la lecture des articles L. 211-1 à L. 211-4 du code du patrimoine, tous les documents produits et reçus dans le cadre du processus des marchés publics, par les collectivités territoriales notamment, ont le statut d'archives publiques.
Par conséquent, c'est aux collectivités territoriales d'en assurer l'archivage et la conservation dans les délais prévus et rappelés dans le référentiel de conservation publié en janvier 2021 par le service interministériel des archives de France.
Cependant, dans la pratique, un grand nombre de collectivités s'interroge sur l'archivage des pièces obligatoirement dématérialisées. En effet, l'investissement dans une solution d'archivage électronique étant assez coûteuse, ces collectivités s'interrogent quant à l'obligation de « re-matérialiser » les documents en les imprimant pour les conserver sous format papier.
C'est pourquoi il lui demande bien vouloir lui préciser les modalités d'archivage des pièces des marchés publics obligatoirement dématérialisées et plus précisément de confirmer ou infirmer si une simple numérisation peut suffire et de l'informer de la valeur probante de ces documents. Il souhaite également connaître les intentions du Gouvernement quant à une possible extension du programme interministériel d'archivage numérique VITAM aux collectivités territoriales.
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Réponse du Ministère de la culture publiée le 02/09/2021
Les durées de conservation des documents issus des processus des marchés publics définies par le référentiel publié sous l'égide du délégué interministériel aux archives de France en 2021 ont été définies dans l'intérêt des collectivités elles-mêmes. Elles sont en règle générale de 5 ans pour les documents liés au processus de passation du marché et de 10 ans pour ceux liés à celui d'exécution. Elles visent à permettre aux collectivités de faire face à d'éventuels contentieux et prennent également en compte : les obligations de conservation portées par les articles R. 2184-12 et R. 2184-13 du code de la commande publique ; le délai de prescription en matière d'action en déclaration de gestion de fait (articles L. 131-2 et L. 231 3 du code des juridictions financières), car certains éléments des dossiers de marché constituent des pièces justificatives de l'opportunité de la dépense et doivent donc être conservés pendant 10 ans à compter du paiement du solde ; s'agissant des marchés de travaux, l'éventualité de l'engagement de la responsabilité du constructeur dans le cadre de la garantie décennale (article 1792 - 4-1 du code civil). La valeur probante des écrits au format numérique, qu'il s'agisse de documents numériques natifs (créés directement sur support électronique) ou de copies numériques de documents dont les originaux sont au format papier, est reconnue par la loi à la condition que soient respectées certaines conditions techniques à même de garantir leur authenticité et leur intégrité. Une collectivité peut envisager plusieurs modes d'archivage qui lui permettent de répondre à ces conditions : conservation dans un système d'archivage électronique répondant aux exigences de la norme Z 42-013 qu'elle met directement en uvre ou élaboré par une autre collectivité avec laquelle elle mutualiserait l'archivage, externalisation auprès d'un tiers-archiveur agréé. Compte-tenu de la durée de conservation relativement limitée des documents de marché public et en fonction des volumes concernés, d'autres solutions (conservation sur le profil d'acheteur lorsque celui-ci y consent, mise en place d'un espace de stockage sécurisé avec notamment accès restreints et recours à un système d'empreintes) peuvent être envisagées mais, dans ce cas, la valeur probante des documents sera moins susceptible d'être reconnue par le juge. La loi reconnaît à la copie fiable, entendue comme reproduction à l'identique de la forme et du contenu de l'original, la même force probante que ce dernier (article 1379 du code civil). Le décret n° 2016-1673 du 5 décembre 2016, pris en application de l'article 1379, vient préciser les conditions permettant à une copie de bénéficier d'une présomption de fiabilité. Aux termes de l'article 1 de ce décret et sous réserve d'une jurisprudence à venir, la rematérialisation ne peut être considérée comme une copie présumée fiable des actes originaux signés électroniquement. En effet, les données qui permettent de vérifier la signature électronique et qui sont partie intégrante de l'original ne peuvent être rematérialisées. La copie numérique de documents originaux au format papier n'est, quant à elle, présumée fiable que si sont respectées certaines conditions techniques détaillées aux articles 2 à 6 du décret. Dans ces deux cas, c'est donc au juge qu'il reviendra de statuer sur la valeur probante des écrits présentés, dont la fiabilité ne peut être présumée. S'agissant du programme interministériel d'archivage numérique Vitam, il accueille au sein de son club d'utilisateurs de plus en plus de collectivités territoriales, conseils départementaux ou communautés d'agglomération, qui envisagent l'implémentation de la solution logicielle Vitam pour leur propre besoin ou dans le cadre d'un projet de mutualisation de l'archivage électronique entre acteurs locaux. Le programme Vitam pilote plusieurs projets, dont l'un vise la mise à disposition d'un service complet d'archivage électronique, associant outil logiciel et hébergement, au profit des ministères porteurs du projet (ministère de la culture, ministère de la transition écologique et ministères sociaux). "Vitam accessible en service" (VaS) sera progressivement ouvert à l'automne aux autres ministères et à leurs opérateurs. Le service est basé sur des outils de l'État (cloud ministériel, accès passant par le réseau interministériel de l'État) et son ouverture aux collectivités territoriales ne peut être envisagée avant que le recul de l'expérience n'ait permis de vérifier l'adaptation de VaS aux besoins de l'État et sa capacité à faire face à une multiplicité d'utilisateurs, de réseaux et d'usages.
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