Question de Mme ESPAGNAC Frédérique (Pyrénées-Atlantiques - SER) publiée le 13/01/2022

Mme Frédérique Espagnac attire l'attention de Mme la ministre de la mer sur la baisse de plus d'un tiers des quotas de sole décidée par la Commission européenne. Cette décision était dans les tiroirs depuis plusieurs mois. Pourtant rien n'a été anticipé. Ce n'est qu'à la mi-décembre 2021 que le compromis européen a été trouvé autour des quotas de pêche. C'est pour les poissons plats que la baisse est la plus conséquente : une baisse de 36 %, dès 2022. C'est une catastrophe pour de nombreux professionnels basques, landais et girondins. Pour la plupart des pêcheurs du golfe de Gascogne, la sole, c'est 50 % de leur chiffre d'affaires. Si on enlève 36 % de ces 50 %, « ça fait quand même un sacré trou ! » D'autant plus que pour les patrons de pêche, les pertes iront au-delà du poisson plat. Quand ils pêchent un kilo de sole, ils pêchent aussi un kilo de poissons divers, dont certains ne sont pas soumis à des quotas. Donc ils vont perdre également 36 % sur ces poissons divers. C'est le « coup de grâce » pour beaucoup d'entre eux. Les directeurs du port de pêche du littoral se disent eux aussi très inquiets, car la sole représente pour certains la moitié du chiffre d'affaires de la criée. Ils estiment les pertes entre 1,5 et 2 millions d'euros. Certes, ils savaient qu'il y aurait une baisse, mais ils pensaient que ce serait lissé sur plusieurs années. Si ça avait été étalé sur deux ou trois ans, ils auraient pu anticiper. Là, ils n'ont pas d'issue de secours. Même si des aides compensatoires devraient être versées par le fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (Féamp), les directeurs de criée n'ont aucune assurance et ne savent pas à ce jour s'ils seront inclus dedans. Concernant les pêcheurs, si le montant n'est pas à la hauteur, de nombreuses exploitations seront en danger. En effet, selon un pêcheur luzien, le montant de ces aides promises par l'Union européenne n'est pas suffisant pour compenser les pertes. Certes ils sont rassurés, mais aujourd'hui, on leur propose 70 % de leur chiffre d'affaires journalier. Le calcul des aides part sur une mauvaise estimation des frais fixes. Il manque 15 % pour que ces aides soient en fait acceptables. De plus, il faut savoir que, en 2020, les pêcheurs ont attendu plus d'une année avant de toucher les aides liées à la crise sanitaire. Leur situation financière est très précaire. Enfin, les pêcheurs en responsabilité souhaitent qu'une nouvelle étude soit menée sur la disparition des stocks de sole. Il a été laissé à penser qu'il y avait eu de la surpêche, or ces derniers disent avoir toujours respecté les quotas en France. Il y a donc un problème de gestion. Ça peut être le réchauffement climatique, la qualité des eaux… Il faut comprendre d'où cela vient et arrêter de considérer les pêcheurs comme une variable d'ajustement. Elle lui demande quels seront les montants des indemnisations versées au titre du Feamp pour les pêcheurs et les criées, si les coûts fixes seront pris en compte à leur juste valeur, si le décret portant sur ces compensations inclut un délai de paiement de ces aides et enfin si le Gouvernement va diligenter une étude afin de comprendre les causes de cette évolution du nombre de soles dans la zone afin d'œuvrer en faveur d'une plus grande durabilité de cette espèce emblématique du golfe de Gascogne.

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Réponse du Ministère de la mer publiée le 19/01/2022

Réponse apportée en séance publique le 18/01/2022

Mme le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, auteure de la question n° 2038, adressée à Mme la ministre de la mer.

Mme Frédérique Espagnac. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la baisse de plus d'un tiers, décidée par la Commission européenne, des quotas de pêche de sole.

Cette décision était dans les tiroirs depuis plusieurs mois. Pourtant, rien n'a été anticipé et ce n'est qu'à la mi-décembre 2021 que le compromis européen a été trouvé autour des quotas de pêche. C'est pour les poissons plats que la baisse est la plus importante, avec une diminution de 36 %, applicable dès 2022. C'est une catastrophe pour de nombreux professionnels, basques, landais et girondins notamment.

Pour la plupart des pêcheurs du golfe de Gascogne, la sole représente en effet 50 % du chiffre d'affaires. Si l'on enlève 36 % de ces 50 %, cela fait tout de même un sacré « trou » ! D'autant que, pour les patrons de pêche, les pertes iront au-delà du poisson plat : quand ils pêchent un kilo de sole, ils pêchent aussi un kilo de poissons divers, dont certains ne sont pas soumis à des quotas. Donc, ils vont perdre également 36 % sur ces poissons divers. C'est le coup de grâce pour beaucoup d'entre eux.

Les directeurs de port de pêche du littoral se disent eux aussi très inquiets, car la sole représente pour certains la moitié du chiffre d'affaires de la criée. Ils estiment les pertes entre 1,5 million et 2 millions d'euros. Ils savaient qu'il y aurait une baisse, mais ils pensaient que celle-ci serait lissée sur plusieurs années. Ils n'ont donc pas d'issue de secours.

Même si des aides compensatoires devraient être versées par le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (Feamp), les directeurs de criée n'ont aucune assurance et ne savent pas, à ce jour, s'ils seront concernés.

Quant aux pêcheurs, si le montant n'est pas à la hauteur, de nombreuses exploitations seront en danger. En effet, selon un pêcheur luzien, le montant des aides promises par l'Union européenne ne suffit pas pour compenser les pertes. Certes, ils sont rassurés aujourd'hui ; on leur propose 70 % de leur chiffre d'affaires journalier. Néanmoins, le calcul des aides procède d'une mauvaise estimation des frais fixes : il manque 15 % pour que ces aides soient acceptables.

Madame la ministre, quels seront les montants des indemnisations versées au titre du Feamp pour les pêcheurs et les criées ? Les coûts fixes seront-ils pris en compte à leur juste valeur ? Le décret portant sur ces compensations inclut-il un délai de paiement de ces aides ? Enfin, le Gouvernement va-t-il diligenter une étude afin de comprendre les causes de l'évolution du nombre de soles dans la zone du golfe de Gascogne pour œuvrer en faveur d'une plus grande durabilité de cette espèce ?

Mme le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annick Girardin, ministre de la mer. Madame la sénatrice Frédérique Espagnac, vous avez raison, le 13 décembre dernier, la pêche de trois poissons importants pour le golfe de Gascogne – le bar, le lieu jaune et la sole – a été abordée à Bruxelles.

Il faut d'abord préciser que j'ai obtenu, pour le bar, espèce à forte valeur ajoutée, une augmentation des quotas. Ensuite, pour le lieu jaune, une baisse de 20 % était prévue et nous avons obtenu la reconduction du quota. Il y a donc aussi eu des points positifs à cette rencontre.

Pour la sole, malheureusement, le résultat peut être décevant, mais il était prévisible. En effet, le plan de gestion signé en 2019, avec l'accord de la filière et connu de tous, prévoyait une baisse automatique de 37 % des quotas, compte tenu de l'état du stock.

J'ai donc dû négocier l'accompagnement de la pêche. Je sais combien les efforts demandés aux pêcheurs sont importants, mais je ne peux pas vous laisser dire que rien n'a été fait. J'étais en réunion avec la profession, en juillet dernier, à Royan. Nous avions alors créé un groupe de travail sur la sole et défini les arguments que nous allions utiliser à Bruxelles : si possible, éviter l'entrée en vigueur automatique prévue – cela n'a pas été possible, car c'est la règle qui avait été définie, ce n'est pas moi qui l'avais signée et les professionnels étaient au courant – et, sinon, définir un plan d'accompagnement, financé par le Feamp. C'est là le plus important.

Ce plan se traduit par la mise en place d'un dispositif d'arrêt temporaire coconstruit avec les professionnels. Nous avons souhaité que les conditions d'attribution soient très larges, les plus généreuses possible ; vous pourrez le constater avec les pêcheurs. Seront concernés les pêcheurs très touchés par la baisse des quotas, si la sole représente au moins 10 % de la valeur de leur pêche. Nous avons également souhaité que ce plan soit réactif et puisse couvrir la totalité de la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2022.

Vous avez parlé de la filière aval, qui est toujours une préoccupation pour moi. Cette filière pourra être épaulée par des mesures de plus long terme, des investissements du plan de relance et du Feamp.

Mme le président. Veuillez conclure.

Mme Annick Girardin, ministre. Quant à l'état écologique des stocks, la réponse sera apportée dans le cadre de notre travail sur le plan pour une pêche durable.

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