Question de M. KAROUTCHI Roger (Hauts-de-Seine - Les Républicains) publiée le 13/01/2022

M. Roger Karoutchi interroge M. le ministre de l'intérieur sur les conséquences de récentes décisions du juge administratif faisant porter aux maires la charge de reloger les familles avec enfants en situation irrégulière, après évacuation d'un immeuble pour lequel a été pris un arrêté de péril imminent et dont le propriétaire est défaillant.
L'article L. 521-3-2 du code de la construction et de l'habitat dispose que le maire qui prend un arrêté de péril imminent sur un immeuble doit assurer le relogement de ses occupants à défaut d'exercice de cette obligation par le propriétaire ou le gestionnaire du bien. C'est une telle situation qui s'est produite en octobre 2020 sur la commune de Clichy dans les Hauts-de-Seine. Parmi les habitants évacués se trouvaient notamment trois familles avec enfants, en situation irrégulière, prises en charge par le 115.
Par un référé-suspension en date du 10 août 2021, confirmé par la non-admission du pourvoi formé contre lui par le Conseil d'État, le 30 décembre 2021, le juge administratif a toutefois estimé que, sur le fondement de la convention internationale des droits de l'enfant de 1989, le maire devait proposer une solution de relogement à ces familles et qu'il ne pouvait en aucun cas se fonder sur le caractère illégal de leur présence sur le territoire national pour décliner sa compétence en la matière.
Bien entendu, nulle famille avec enfants ne saurait être mise à la rue, il en va du respect des droits humains les plus primaires. De tels droits avaient en l'occurrence été respectés à l'endroit de ces familles, prises en charge tout l'hiver par des structures d'accueil. En revanche, alors que la commune de Clichy compte 3 000 personnes en attente d'obtenir un logement social et que, dans toute l'Île-de-France, ce ne sont pas moins de 750 000 noms qui remplissent les listes, il n'est pas souhaitable que l'obligation de relogement de familles en situation irrégulière soit prise en charge par les communes.
Il souhaite ainsi savoir si le gouvernement compte clarifier la répartition des compétences entre les communes et l'État sur ce point dans le sens d'une prise en charge de ces familles par les autorités gouvernementales.

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Transmise au Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales


Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales publiée le 14/04/2022

La police du péril fondée jusqu'au 31 décembre 2020 sur les articles L. 511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation (CCH), relève du maire ou du président d'établissement public de coopération intercommunale en cas de transfert fondé sur l'article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Cette police administrative spéciale permet à l'autorité compétente de prescrire des mesures au propriétaire ou à l'exploitant d'un immeuble : réalisation de travaux, hébergement ou relogement des occupants, condamnation des accès de l'immeuble etc. Spécifiquement aux prescriptions d'hébergement ou de relogement, l'article L. 521-3-2 du CCH dans sa version applicable aux arrêtés de police administrative spéciale notifiés antérieurement au 1er janvier 2021 (date d'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l'harmonisation et à la simplification des polices des immeubles) dispose que « lorsqu'un arrêté de péril pris en application de l'article L. 511-1 (…) [est] accompagné d'une interdiction temporaire ou définitive d'habiter et que le propriétaire ou l'exploitant n'a pas assuré l'hébergement ou le relogement des occupants, le maire ou, le cas échéant, le président de l'établissement public de coopération intercommunale prend les dispositions nécessaires pour les héberger ou les reloger (…) ». Le propriétaire bailleur est dans l'obligation d'héberger ou reloger ses locataires si l'arrêté de péril le lui prescrit. En cas de défaillance, c'est donc, en application des dispositions susmentionnées, l'autorité compétente qui en a la charge. Si l'arrêté de péril a été pris par le maire, c'est bien ce dernier qui doit en assurer l'exécution. Le bénéficiaire du régime de la protection du droit des occupants (droit à l'hébergement ou relogement) dans le cadre de l'exercice des polices administratives spéciales est spécifié à l'article L. 521-1 du CCH qui dispose que « Pour l'application du présent chapitre, l'occupant est le titulaire d'un droit réel conférant l'usage, le locataire, le sous-locataire ou l'occupant de bonne foi des locaux à usage d'habitation et de locaux d'hébergement constituant son habitation principale ». Cette formulation n'a pas changé avec l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2020-1144. La circonstance que le locataire soit en situation irrégulière sur le territoire est donc sans incidence sur l'application du régime de la protection du droit des occupants. En l'espèce, c'est donc bien la commune qui a la charge d'assurer le relogement. L'État peut toutefois apporter son concours à cette dernière, si elle le sollicite, pour faciliter la mise en œuvre de cette compétence.

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