Question de M. DOSSUS Thomas (Rhône - GEST) publiée le 10/02/2022

M. Thomas Dossus attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur la destruction et la bétonisation des jardins d'Aubervilliers.

Depuis septembre 2021, les pelleteuses ont détruit plus de 9 000m² de jardins ouvriers dans la ville d'Aubervilliers pour y préparer l'installation d'une piscine, d'un solarium et d'une gare du futur grand Paris express, dans le cadre des aménagements urbains pour les jeux olympiques et paralympiques de 2024.

Centenaires pour la plupart, ces jardins ont une histoire. Celles des femmes et des hommes qui ont rendu ces endroits vivants, végétalisés et générateurs de mixité sociale.

Les milieux périurbains - et particulièrement Aubervilliers - souffrent d'un déficit alarmant de biodiversité. La ville dispose d'un mètre carré d'espace vert par habitant alors que l'organisation mondiale de la santé en préconise au moins dix.

Par ailleurs, la destruction des jardins contredit sérieusement l'ambition environnementale des jeux olympiques et paralympiques de 2024 pourtant affirmée par le Gouvernement, par l'agence nationale du sport et par le comité d'organisation des jeux.

La destruction de ces parcelles est également une attaque directe contre le vivre ensemble. Ces lieux de rencontre, de travail en commun, de partage étaient l'un des cœurs populaires de la ville. Signe ultime de mépris contre cette histoire, la terre - pourtant saine et fertile - excavée des jardins a été utilisée pour combler des carrières de gypse.

Face à cette destruction de leur patrimoine, les habitantes et habitants se sont mobilisés depuis le début. Recours en justice, désobéissance civile, manifestations, pétitions : le collectif jardins à défendre attire inlassablement l'attention de la société et des institutions sur la disparition programmée des jardins.

Cette mobilisation est d'ailleurs toujours en cours dans sa partie légale. Le contentieux contre le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI) doit encore être jugé au fond, tout comme le recours contre le permis de construire, ainsi que la contestation de la destruction des logements des personnes occupant le site.

Pourtant, malgré ces recours toujours en cours, le 2 février 2022, ce sont les bétonneuses qui ont commencé leur sinistre travail.

Il souhaite savoir si le Gouvernement envisage de mettre un terme à cette bétonisation des jardins, a minima, le temps de la procédure judiciaire. Il souhaite également savoir - dans le cas où les recours donneraient raison au requérants -, si le Gouvernement prévoit une relocalisation des équipements sportifs dans d'autres endroits comme des friches industrielles et quelles mesures il compte prendre pour remettre en état ces jardins avant de les rendre aux habitantes et habitants d'Aubervilliers.

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Transmise au Ministère auprès de la ministre de la transition écologique - Logement


Réponse du Ministère auprès de la ministre de la transition écologique - Transports publiée le 16/02/2022

Réponse apportée en séance publique le 15/02/2022

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, auteur de la question n° 2137, transmise à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement.

M. Thomas Dossus. Monsieur le ministre, depuis septembre 2021, des pelleteuses ont détruit plus de 6 000 mètres carrés de jardins ouvriers dans la ville d'Aubervilliers, pour préparer l'installation d'une piscine et d'un solarium pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Est également prévue, sur ce même jardin, la construction d'une gare du Grand Paris Express.

Centenaires pour la plupart, ces jardins ont une histoire, celle des femmes et des hommes qui ont rendu ces endroits vivants, végétalisés et générateurs de mixité sociale.

Aubervilliers souffre d'un déficit alarmant de biodiversité. La ville dispose d'un mètre carré d'espace vert par habitant, alors que l'Organisation mondiale de la santé en préconise au moins dix. Détruire ces jardins contredit sérieusement l'ambition environnementale des JO de 2024, pourtant affirmée, et surtout affichée, par le Gouvernement, l'ANS, l'Agence nationale du sport, et le comité d'organisation des Jeux.

La destruction de ces parcelles est une attaque directe contre le vivre-ensemble. Ces lieux de rencontre, de travail en commun et de partage étaient l'un des cœurs populaires de la ville. Face à cette destruction de leur patrimoine, les habitantes et habitants se sont mobilisés : recours en justice, désobéissance, manifestations et pétitions. Le collectif de défense des jardins ouvriers d'Aubervilliers attire inlassablement l'attention sur la disparition programmée, mais néanmoins injuste, de ces jardins, parfois au prix de passages prolongés en garde à vue.

Cette mobilisation a pourtant porté ses fruits. Ainsi, depuis que j'ai inscrit cette question à l'ordre du jour, la justice a donné raison à ces militants. Le 10 février dernier, la Cour administrative d'appel de Paris a demandé une modification du PLUi, le plan local d'urbanisme intercommunal, pour qu'il soit limité aux zones strictement nécessaires à la construction de la piscine et de la gare. Il a également constaté que ce chantier portait atteinte à la biodiversité.

Pourtant, malgré cette décision, malgré le fait que le PLUi soit désormais illégal, les bétonneuses n'ont pas arrêté leur sinistre travail. Cette décision de justice appelle à une refonte complète de ce projet, qui porte atteinte au cadre de vie.

Est-il prévu, monsieur le ministre, une relocalisation des équipements en construction dans d'autres endroits ? Quelles mesures seront prises pour remettre en état ces jardins, avant de les rendre aux habitantes et habitants d'Aubervilliers ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports. Monsieur le sénateur, vous interrogez le Gouvernement sur le projet d'aménagement des jardins familiaux du Fort d'Aubervilliers.

Ces jardins comprennent 272 parcelles réparties sur 7 hectares. Le foncier appartient à Grand Paris Aménagement, qui conduit le projet d'aménagement du Fort, en concertation avec les collectivités.

Le centre aquatique impacte dix-neuf jardins depuis 2021 et la gare impactera quinze jardins entre 2024 et 2030. Ce sont 12 % des jardins et des surfaces actuelles qui sont concernés.

Vous affirmez que la destruction des jardins annonce leur disparition programmée. Or il n'en est rien. En ce qui concerne le centre aquatique, des engagements ont été pris par Grand Paris Aménagement et acceptés par la majorité des jardiniers, à savoir la réinstallation sur des parcelles inexploitées et remises en culture sur le site, dans un rayon de 500 mètres, et la reconstitution à terme, en extension du site actuel, au sud-est du Fort, sur des terrains aujourd'hui en friche, avec une redistribution des parcelles permettant à chacune des deux associations gestionnaires de conserver la même surface qu'aujourd'hui.

Par ailleurs, la Société du Grand Paris a récemment adapté l'emprise de sa gare pour limiter l'impact sur les jardins : elle a en partie vocation à devenir un espace public aménagé, tandis que l'autre partie sera restituée.

Ces démarches permettent d'accompagner sur plusieurs années l'évolution des jardins, dont une part non négligeable est aujourd'hui délaissée.

De plus, je vous invite à ne pas opposer les vocations respectives des jardins, de la piscine et de la gare. S'il est prévu que le centre aquatique serve temporairement de piscine d'entraînement pour les Jeux de 2024, il s'agit avant tout d'un équipement pour les habitants d'un département sous-doté, qui en a grandement besoin.

La desserte par le nouveau métro améliorera la mobilité dans un territoire qui comprend de nombreux quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Enfin, je souligne que l'équilibre de ces opérations n'est pas directement remis en cause par l'arrêt du 10 février 2022 de la cour administrative d'appel de Paris, qui n'a identifié d'incompatibilités que pour des espaces excédant les terrains nécessaires au projet.

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