Question de M. DEMILLY Stéphane (Somme - UC) publiée le 10/02/2022

Question posée en séance publique le 09/02/2022

M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Stéphane Demilly. L'usage détourné du protoxyde d'azote, connu sous le nom de gaz hilarant, est un phénomène identifié depuis des années.

Cependant, depuis quelques mois, cet usage connaît une recrudescence exponentielle, notamment chez les jeunes, y compris et surtout chez les mineurs. Il faut dire qu'il est très facile de s'en procurer sur internet, et ce sans aucun contrôle !

Faites le test sur des sites d'achat en ligne, y compris les plus connus, et vous constaterez avec quelle facilité on peut se procurer des cartouches de protoxyde d'azote pour quelques dizaines d'euros.

C'est d'une simplicité déconcertante. Cette facilité d'acquisition contraste d'ailleurs avec les complications physiques que ces inhalations peuvent engendrer.

Une récente étude de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), qui constate une augmentation de près de 200 % de la consommation de ce produit en une année, nous alerte sur les troubles constatés chez les consommateurs réguliers : troubles neurologiques, troubles hématologiques, troubles psychiatriques et troubles cardiaques, sans compter les potentiels déficits moteurs ou les risques immédiats comme l'asphyxie, la perte de connaissance, les brûlures causées par ce gaz froid ou encore les vertiges et les chutes.

Les signalements de cas graves par les centres d'addictologie sont inflationnistes.

Une loi tendant à prévenir les usages dangereux du protoxyde d'azote a été promulguée au mois de juin dernier, et je remercie mes collègues Valérie Létard, au Sénat, et Valérie Six, à l'Assemblée nationale, de l'avoir défendue.

Mme Françoise Gatel. Très bien !

M. Stéphane Demilly. Ce texte interdit de vendre ou d'offrir à un mineur du protoxyde d'azote, sous peine d'une amende de 3 750 euros. Ce nouvel arsenal législatif n'endigue malheureusement pas la vente sur internet, comme je vous l'ai dit.

La loi française ne peut pas encadrer la commercialisation de produits de consommation courante sur des sites internet étrangers.

De plus, à ce jour, les décrets d'application prévoyant l'encadrement des volumes de vente ne sont toujours pas publiés. Sans ces décrets, la loi ne peut pas produire ses effets !

Face à cette recrudescence de la consommation de protoxyde d'azote et face à la gravité des dommages physiques observés, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour mieux encadrer la vente de ces produits dangereux sur internet ? (MM. Laurent Lafon et Jean-Marie Vanlerenberghe applaudissent.)


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles publiée le 10/02/2022

Réponse apportée en séance publique le 09/02/2022

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles. Monsieur le sénateur, je vous remercie d'évoquer une fois encore ce sujet.

L'étude de l'Anses du mois de novembre dernier que vous avez citée a confirmé les tendances alarmantes que nous connaissions déjà : la hausse des cas de mésusage du protoxyde d'azote, leurs effets toxiques, notamment neurologiques, ainsi que la méconnaissance de ces effets chez les jeunes et les mineurs.

En parler et mener des campagnes de prévention sur ce sujet, comme cela est d'ailleurs prévu dans la loi de la sénatrice Valérie Létard que vous avez mentionnée, fait partie des politiques publiques que nous construisons pour sensibiliser les jeunes et les mineurs aux dangers associés à ces produits. Une augmentation de ces usages chez les mineurs est également constatée.

La loi de Valérie Létard, promulguée le 1er juin 2021, comporte l'interdiction de la vente de protoxyde d'azote aux mineurs, mais aussi aux majeurs dans un certain nombre de lieux où nous savons que la consommation de ce produit est abondante – bars, discothèques, bureaux de tabac – au-delà de quantités raisonnables, c'est-à-dire quand cela laisse à penser qu'un détournement de son usage est probable.

Cette loi dispose également l'interdiction de la vente des dispositifs destinés à l'usage de protoxyde d'azote, ainsi qu'un délit d'incitation à la consommation pour les mineurs, puni de 15 000 euros d'amende, ou encore l'obligation pour les industriels d'indiquer la dangerosité de cet usage sur l'ensemble des contenants.

S'agissant des quantités accessibles, mais aussi des mentions de cette dangerosité, des textes réglementaires – un décret et un arrêt頖 sont en attente de publication. Ils ont fait l'objet d'un travail interministériel important mené par le ministère des solidarités et de la santé, le ministère de l'intérieur et le ministère de l'économie, des finances et de la relance. L'objectif du Gouvernement est de ne pas voir ces textes « retoqués » par l'Union européenne. Il faut que nous soyons en mesure de prouver de façon évidente le caractère nécessaire, non discriminatoire et proportionné des mesures prises.

Sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, que ces textes réglementaires et cette loi ont été notifiés hier à la Commission européenne. (Mme Valérie Létard s'en étonne.) Oui, hier même !

M. Antoine Lefèvre. Il était temps !

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. L'idée est que celle-ci et l'ensemble des États membres puissent émettre leurs remarques et que ces textes puissent avoir plein effet afin d'enfin protéger les jeunes et les mineurs de notre pays. (Mme Valérie Létard et M. Thani Mohamed Soilihi applaudissent.)

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