Question de M. BONNECARRÈRE Philippe (Tarn - UC) publiée le 14/07/2022
M. Philippe Bonnecarrère attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargée de l'économie sociale et solidaire et de la vie associative, sur le « microcrédit » à caractère solidaire.
Depuis bien longtemps les collectivités locales ont été amenées, via les centres communaux d'action sociale (CCAS), à mettre en place des politiques de « microcrédit » ou « de prêt solidaire » dans des situations très spécifiques.
Il s'agit généralement de personnes qui, par leurs revenus, ne peuvent pas justifier d'un financement par les voies classiques. Ces personnes peuvent être victimes d'accidents de vie à l'exemple d'une personne qui travaille, avec un faible salaire, des charges importantes, voire une situation de surendettement et dont le véhicule nécessaire à son activité est victime d'une panne mécanique.
La pratique montre que pour des montants de l'ordre de 1 000 à 2 000 €, une personne ou une famille peut être gardée « dans le circuit » de la société et faire face ensuite à toutes ses échéances.
Les « microcrédits » correspondent donc à des situations d'exception, souvent en très petit nombre pour les communes concernées et chaque fois avec un examen social très individualisé.
Une commune n'utilise le microcrédit par le biais de son CCAS qu'après échec de toutes les solutions de financement par les établissements bancaires, voire sur des programmes de solidarité de telle ou telle banque ou encore après avoir vérifié l'intervention ou non d'une assistante sociale du département ou d'un organisme social.
À l'heure présente, en mai 2022, les directions départementales des finances publiques soutiennent qu' « un prêt solidaire correspond à la procédure de microcrédit personnel qui est un crédit bancaire permettant d'accompagner les personnes en difficultés financières qui ne peuvent accéder au système bancaire classique ».
Dans la mesure où ce prêt solidaire est analysé comme ayant les effets d'un prêt bancaire, l'administration soutient qu'un CCAS ne peut pas se substituer à un organisme de crédit.
Une telle position qui ne permet plus aux communes, via leur CCAS, de régler des problèmes modestes mais essentiels pour les personnes concernées est tout à fait regrettable.
Il lui demande donc de bien vouloir donner des instructions afin d'avoir une interprétation moins stricte d'une prétendue concurrence avec les établissements bancaires.
Les opérations concernées ne font pas concurrence aux banques et si le CCAS est amené à intervenir, c'est justement parce que telle ou telle banque ne le fait pas et que d'autre part, le CCAS de la commune concernée aura fait une étude spécifique justifiant du caractère exceptionnel.
Dans le cas d'une commune ayant 2 695 habitants, 2 prêts solidaires ont été accordés par le CCAS depuis 2016, soit un prêt par période triennale !
La commune se voit opposer la règle précitée pour un troisième microcrédit en 2022. Il est pour le moins excessif qu'au regard d'une utilisation aussi pondérée du mécanisme et aussi pertinente, une commune se voit ainsi interdire de résoudre des problèmes humains douloureux.
La question posée vise donc à permettre aux situations humaines douloureuses de trouver une solution honorable dans la société française de 2022.
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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 06/07/2023
L'accès au crédit des personnes les plus vulnérables constitue une composante essentielle de la politique d'inclusion bancaire et un point de préoccupation majeure du Gouvernement. Le microcrédit constitue un dispositif permettant à des publics exclus du système bancaire conventionnel d'accéder à une solution de financement afin de mener à bien un projet d'insertion et de bénéficier dans ce cadre d'un accompagnement, favorisant leur rebond. La politique publique dédiée au microcrédit s'inscrit ainsi à la charnière de l'aide à la création d'entreprise, de l'insertion professionnelle et de l'inclusion financière. Son financement est assuré par le Fonds de cohésion sociale, créé par la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale et géré par BPI France, qui fait l'objet d'un abondement annuel par l'Etat et qui permet de garantir les prêts octroyés aux bénéficiaires du microcrédit. Le microcrédit intègre deux versants : i) dans son versant professionnel, il vise à financer les projets de création, développement et reprise d'entreprises dont les effectifs ne dépassent pas trois salariés ; ii) dans son versant personnel, le financement est alloué à des personnes physiques afin de leur permettre de mener à bien un projet d'insertion. Dans une large majorité de situations, le prêt est souscrit afin de contribuer à la réalisation d'un projet de mobilité. Les flux de microcrédit professionnels ont évolué de 588 millions d'euros en 2021 à 723 millions en 2022, soit une hausse de 23%, avec 74 988 microcrédits professionnels accordés en 2022 soit une progression de près de 43%. S'agissant du microcrédit personnel, les flux sont relativement stables avec 69 millions décaissés en 2022 contre 70 millions en 2021. Le nombre de nouveaux microcrédits personnels accordés est en baisse de 8%, avec 19 572 nouveaux projets financés en 2022 contre 21 357 en 2021. Le microcrédit, dont le régime juridique est précisé aux articles L. 511-6, R. 518-58, R. 518-59, R. 518-60, R. 518-61 du code monétaire et financier, se distingue du crédit bancaire classique à trois égards : - outre le crédit en tant que tel, le dispositif inclut un accompagnement et un suivi de l'emprunteur depuis la phase d'instruction jusqu'à la mise en oeuvre du projet. Il s'agit d'un vecteur essentiel de pérennisation des projets accompagnés ; - le microcrédit bénéficie d'un soutien public dans l'objectif d'assurer la solvabilisation des projets. L'Etat prend en charge une certaine quotité du risque de crédit en octroyant une garantie partielle au montant souscrit, cette quotité s'élevant actuellement à 50% du montant ; - le dispositif repose sur un circuit de distribution spécifique, dans la mesure où ce sont des associations sans but lucratif ou des fondations reconnues d'utilité publique habilitées par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) (article L. 511-6 du code monétaire et financier (CMF) qui procèdent à celui-ci en partenariat avec les établissements bancaires qui financent les opérations. Il s'agit en l'espèce d'un régime dérogatoire au monopole bancaire prévu à l'article L. 511-5 du CMF. Ces entités peuvent ainsi selon leur modèle économique allouer directement des prêts aux bénéficiaires ou constituer des intermédiaires dans la relation d'affaires nouée avec des établissements financiers. Si ces entités octroient directement des prêts garantis par le Fonds de cohésion sociale, elles doivent de manière impérative, conformément au 5° de l'article L. 511-6 du code monétaire et financier disposer d'une habilitation, cette dernière n'étant pas requise si le rôle de l'association est circonscrit à des activités de conseil et d'appui au montage du dossier de demande de financement de l'emprunteur. Afin de clarifier l'interprétation de ces points complexes de réglementation ainsi que de garantir une doctrine homogène et partagée, le ministre veillera à ce qu'une démarche de sensibilisation et d'information soit prochainement engagée auprès de l'ensemble des services mobilisés dans sa mise en oeuvre.
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