Question de M. BONNECARRÈRE Philippe (Tarn - UC) publiée le 14/07/2022

M. Philippe Bonnecarrère interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer quant à la limitation de la protection juridique accordée à un fonctionnaire par la loi no 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Il résulte en effet de ce texte que la collectivité publique est tenue de protéger le fonctionnaire contre les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne … Il arrive malheureusement assez fréquemment qu'un fonctionnaire de police soit victime en service d'un accident de la circulation dont l'auteur n'a bien entendu pas agi volontairement. Dans ces conditions la protection fonctionnelle n'est pas accordée à l'agent public. Dans les réponses de rejet effectuées par votre ministère, il est fait référence au fait que le dommage subi doit être motivé par les fonctions exercées par l'agent. Cette dernière mention s'appliquerait en réalité à un accident résultant d'un fait non intentionnel puisque c'est bien dans le cadre de ses fonctions que l'agent public a été victime. Au-delà de cette interprétation de jurisprudence, force est de reconnaître que le texte de la loi est bien limitatif aux atteintes volontaires. Il est assez facile d'imaginer que l'administration a le souci de ne pas systématiquement se substituer à la responsabilité dans le cas précis des compagnies d'assurances des auteurs d'un accident de la circulation. Il n'y a pourtant pas d'enjeux matériels puisqu'à supposer que l'administration au titre de la protection fonctionnelle -si elle était élargie à des faits non intentionnels- serait certes alors tenue d'indemniser son agent mais elle continuerait à bénéficier de la subrogation complète dans les droits de la victime en application toujours de la loi du 13 juillet 1983. Il ne s'agit finalement que d'une question de savoir qui fait l'avance de trésorerie entre l'agent public et l'administration. Compte tenu du caractère relativement limité de cet aspect des choses, il pourrait être de bonne politique à la fois en terme de ressources humaines mais aussi de respect de la difficile mission des fonctionnaires de police d'envisager une extension de la protection fonctionnelle aux faits dont serait victime un agent public y compris lorsque l'atteinte a été involontaire. Il lui demande donc s'il envisage ou non une évolution des dispositions légales applicables à cette situation.

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Réponse du Ministère de l'intérieur et des outre-mer publiée le 01/12/2022

Le dispositif de la protection fonctionnelle est régi par les articles L. 134-1 et suivants du code général de la fonction publique et, en ce qui concerne les personnes concourant à la sécurité intérieure, les articles L. 113-1, R. 113-1 et R. 113-2 du code de la sécurité intérieure et par le décret no 2017-97 du 26 janvier 2017. S'agissant de la protection fonctionnelle dans le cas d'atteintes involontaires dont seraient victimes les fonctionnaires du ministère de l'intérieur et des outre-mer, il apparaît qu'aux termes de l'article L. 134-1 du code général de la fonction publique : « L'agent public ou, le cas échéant, l'ancien agent public bénéficie, à raison de ses fonctions et indépendamment des règles fixées par le code pénal et par les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui l'emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire, dans les conditions prévues au présent chapitre ». En outre, aux termes de l'article L. 134-5 du même code : « La collectivité publique est tenue de protéger l'agent public contre les atteintes volontaires à l'intégrité de sa personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu'une faute personnelle puisse lui être imputée. Elle est tenue de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté ». En application de ces dispositions, la protection fonctionnelle ne peut être octroyée que si l'agent a fait l'objet d'une attaque en raison de ses fonctions ou de sa qualité de fonctionnaire ou d'agent public (CE, no 260617, 9 mai 2005, Afflard ; CE, 6 novembre 1968, Morichère, no 70283 ; CE, 6 novembre 1968, Benejam, n o 70282 ; CE, 10 janvier 1969, Grafmüller, no 72743 ; CAA Bordeaux,  9 décembre 2015, n o 14BX02427). Il en résulte que la loi exclut expressément les atteintes involontaires du champ de la protection fonctionnelle. Toutefois, dans un contexte de forte mobilisation de nos forces de l'ordre, le ministre de l'intérieur et des outre-mer accorde la plus haute importance à la protection de ces agents dans le cadre de leurs missions et veille à son renforcement. Il est attaché à la mise en œuvre d'un dispositif dont les modalités répondent à l'exigence de mesures adaptées et proportionnées aux faits en cause. Ainsi, les agents victimes d'atteintes non intentionnelles peuvent être indemnisés, par l'État, en utilisant des mécanismes distincts : – lorsque les atteintes résultent d'un accident de la circulation reconnu imputable au service, les dispositions de la loi n o 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation leur ouvrent un droit à l'indemnisation. Les intéressés peuvent alors obtenir réparation des préjudices subis lors de cet accident, en fonction des responsabilités retenues, soit par l'assureur adverse, soit par le service d'assurance automobile du ministère de l'intérieur et des outre-mer (SAAMI), service à compétence nationale institué par arrêté du ministre de l'intérieur et des outre-mer du 4 septembre 2020 et rattaché au sous-directeur du conseil juridique et du contentieux relevant de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques, dont la saisine peut être effectuée à l'adresse suivante : assurance-automobile-mi@interieur.gouv.fr. – lorsque les atteintes résultent d'un accident de service (hors accident de la circulation), la responsabilité sans faute de l'Etat au titre de l'obligation qui lui incombe de garantir ses agents contre les risques qu'ils courent dans l'exercice de leurs fonctions peut être engagée. Les articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et le droit à indemnisation consacré par la jurisprudence du Conseil d'Etat (CE, 4 juillet 2003, Moya-Caville, n o 211106 ; CE, 1er juillet 2005, Brugnot, n o 258208) permettent la réparation complète des préjudices patrimoniaux ou extra-patrimoniaux subis par les fonctionnaires de police ou les militaires de gendarmerie du fait d'une atteinte involontaire à leur intégrité, dont les éventuels frais de justice. L'ensemble des informations s'agissant de ces mécanismes peuvent par ailleurs être consultés par les agents sur l'intranet de la police nationale et de la gendarmerie nationale. En outre, concernant les fonctionnaires actifs de police, un numéro vert (0800 95 0017) permet de prendre attache auprès d'une équipe d'assistance accompagnant les policiers victimes et assurant le relais avec les services administratifs concernés. Compte tenu de l'existence de ces dispositifs permettant l'indemnisation des préjudices subis par les fonctionnaires concernés, une évolution législative n'apparaît pas nécessaire.

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