Question de M. CHARON Pierre (Paris - Les Républicains) publiée le 22/09/2022
M. Pierre Charon attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications sur le démarchage téléphonique abusif.
Jamais le démarchage téléphonique ne nous a semblé aussi agressif. Ce harcèlement doit cesser. Pourtant, le législateur a tenté d'endiguer ce phénomène. La loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a mis en place le service d'opposition Bloctel qui permet à chacun d'inscrire son numéro pour s'opposer à tout démarchage, à l'exception des partis politiques, des instituts de sondage, des associations et des entreprises avec lesquelles le consommateur a une relation commerciale. Or, près de la moitié des personnes ayant utilisé ce service n'ont pas constaté de baisse des appels commerciaux.
Le 24 juillet 2020, la France renforce son arsenal législatif par l'adoption d'une nouvelle loi, loi n° 2020-901 visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux, qui devait mettre fin à ces abus. Le texte vise à en améliorer l'efficacité par de nouvelles obligations fixées aux professionnels du démarchage téléphonique et un relèvement des sanctions en cas de manquement.
Malgré ces nouvelles règles, force est de constater que cela n'est toujours pas suffisant et que nombre d'entreprises ne les respectent pas.
Les contrôles devraient être significativement renforcés, ce qui n'est pas le cas. Ainsi, il devient urgent de changer de logique pour passer au consentement du destinataire de la publicité : s'il n'a pas dit « oui », c'est « non » comme cela est déjà le cas en Allemagne, au Portugal ou, plus récemment, au Royaume-Uni pourtant peu favorable à la régulation et qui a fait la preuve de son efficacité, sans déséquilibrer le marché.
Pire encore, ces multiplications d'appels téléphoniques ont ouvert la porte à de très nombreuses tentatives d'arnaques au compte personnel de formation (CPF).
Certes, depuis le 1er avril 2022 sont entrées en vigueur de nouvelles règles visant à protéger la population du démarchage téléphonique abusif mais elles ne concernent que les courtiers en assurance, celles-ci nécessitent d'obtenir un accord verbal de la personne pour continuer la conversation. De plus, il sera impossible de souscrire à un contrat uniquement par téléphone.
Face aux échecs successifs de Bloctel, de la loi du 24 juillet 2020, il lui demande ses intentions pour imposer le consentement préalable du consommateur pour toute prospection commerciale par téléphone.
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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 27/07/2023
Dans le souci de protéger les consommateurs, notamment les plus fragiles d'entre eux, d'un démarchage téléphonique intempestif et intrusif, le code de la consommation interdit cette pratique à l'égard de ceux qui sont inscrits sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique BLOCTEL et punit d'une amende de 75 000 euros pour une personne physique et de 375 000 euros pour une personne morale la violation de cette interdiction. Ce dispositif compte aujourd'hui plus de 5 millions d'inscrits et plus de 10 millions de numéros de téléphone sont enregistrés sur BLOCTEL. Dans le cadre des débats parlementaires de la loi n° 2020-901 du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux, le législateur a rejeté l'adoption d'un régime de consentement préalable des consommateurs pour le démarchage téléphonique, dit « opt-in ». La plus grande efficacité d'un système "d'opt-in", en termes de protection des consommateurs contre le démarchage téléphonique abusif, n'est pas démontrée, s'agissant tout particulièrement des sollicitations émanant d'opérateurs installés à l'étranger et pourrait avoir des conséquences dommageables sur les emplois dans les centres d'appels situés sur le territoire national. C'est pourquoi, le législateur a jugé préférable de renforcer le dispositif BLOCTEL en vigueur, permettant au consommateur de s'opposer gratuitement au démarchage téléphonique. A cet égard, la loi n° 2020-901 du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux est venue renforcer le dispositif BLOCTEL. Ce texte aggrave, afin de les rendre plus dissuasives, les sanctions encourues en cas de non-respect du dispositif d'opposition au démarchage téléphonique. Il introduit également une interdiction sectorielle du démarchage téléphonique dans le secteur de la rénovation énergétique où les abus étaient particulièrement graves ces dernières années, et ce, même à l'égard des personnes qui n'ont pas inscrit leurs numéros sur Bloctel. La loi renvoie à des décrets le soin de fixer les modalités d'application de plusieurs de ses dispositions. Ainsi, le décret n° 2021-1528 du 26 novembre 2021 relatif aux conditions de reconduction tacite de l'inscription sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique et à la nature des données essentielles devant être rendues publiques par le gestionnaire de cette liste, est paru au JORF 28 novembre 2021.Ce décret détermine la nature des données essentielles de l'activité exercée par le gestionnaire de la liste d'opposition au démarchage téléphonique devant être rendues publiques dont « le nombre de réclamations déposées par les consommateurs ». C'est dans ce cadre que le gestionnaire actuel de la liste d'opposition au démarchage téléphonique, WORLDLINE, publie ces données essentielles, incluant le nombre de signalements déposés par les consommateurs, sur le site internet BLOCTEL : https://www.bloctel.gouv.fr/donnees-essentielles. Outre ce décret, un autre décret déterminant les jours et horaires ainsi que la fréquence auxquels la prospection commerciale par voie téléphonique non sollicitée peut avoir lieu, y compris en vue de la fourniture de journaux, de périodiques ou de magazine est paru le 14 octobre 2022 au Journal officiel (Décret n° 2022-1313 du 13 octobre 2022), à la suite de la consultation du conseil national de la consommation (CNC). Ce décret est entré en vigueur le 1er mars 2023 et encadre mieux le démarchage téléphonique des consommateurs qui est ainsi autorisé uniquement du lundi au vendredi, de 10 heures à 13 heures et de 14 heures à 20 heures. Il est, en revanche, interdit le samedi, le dimanche et les jours fériés. La prospection commerciale par voie téléphonique en vue de la fourniture de journaux, de périodiques ou de magazines entre également dans le champ d'application du décret. Cet encadrement s'applique aussi bien aux personnes non inscrites sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique BLOCTEL qu'à celles inscrites mais sollicitées dans le cadre d'un contrat en cours. Toutefois, il ne s'applique pas si le consommateur a donné son consentement exprès et préalable pour être appelé. Le professionnel, ou une personne agissant pour son compte, peut alors solliciter par voie téléphonique le consommateur consentant en dehors de ces jours et de ces plages horaires. Ce décret précise également qu'un consommateur ne peut pas être sollicité par voie téléphonique à des fins de prospection commerciale plus de quatre fois par mois (période de trente jours calendaires) par le même professionnel ou par une personne agissant pour son compte. Il convient de noter que cet encadrement de la fréquence des appels inclut les tentatives d'appels du professionnel envers un même consommateur. Enfin, lorsque le consommateur refuse ce démarchage au cours de la conversation téléphonique, le professionnel s'abstient de le contacter ou de tenter de le contacter avant l'expiration d'une période de soixante jours calendaires révolus à compter de ce refus. La violation de ces règles est sanctionnée de l'amende administrative prévue à l'article L. 242-16 du code de la consommation (75 000 euros d'amende pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale). Cette même loi du 24 juillet 2020 prévoit également que tout professionnel qui contacte par téléphone une personne en vue de la réalisation d'une étude ou d'un sondage respecte des règles déontologiques rendues publiques et élaborées par les professionnels du secteur. Ces règles ont été précisées dans une charte professionnelle relative à la réalisation d'études et de sondages par téléphone, publiée le 17 octobre 2022 par Syntec Conseil, organisation représentative des professionnels des études et des sondages, au lien hypertexte suivant : https://syntec-conseil.fr/actualites/charte-professionnelle-relative-a-la-realisation-detudes-et-de-sondage-par-telephone-octobre-2022/. Cette charte précise également les jours et horaires ainsi que la fréquence auxquels les appels sont autorisés, rendant inutile de prendre le décret prévu, en tant que de besoin, pour préciser ces différents points. De plus, toujours en application de la loi du 24 juillet 2020, les fédérations professionnelles concernées par la prospection commerciale par voie téléphonique ont rédigé conjointement un code de bonnes pratiques déterminant les règles déontologiques applicables au démarchage téléphonique conformément à la loi n° 2020-901 du 24 juillet 2020 sans qu'il soit nécessaire d'y apporter des précisions par voie règlementaire (la loi précitée renvoie à un décret seulement en tant que de besoin). Ce code de bonnes pratiques est rendu public, notamment, sur le site du MEDEF, au lien hypertexte suivant : https://www.medef.com/uploads/media/default/0019/99/14409-codedeonto-bonnes-pratiques-demarchagetel-fevrier-2022.pdf Par ailleurs, après l'interdiction de prospection commerciale par voie téléphonique en matière de rénovation énergétique, la loi n° 2022-1587 du 19 décembre 2022 visant à lutter contre la fraude au compte personnel de formation et à interdire le démarchage de ses titulaires, face aux pratiques dénoncées et constatées dans le domaine de la formation professionnelle, a créé une nouvelle interdiction de sollicitation téléphonique dans ce secteur d'activités. La DGCCRF poursuit une action répressive résolue pour sanctionner les professionnels qui ne respectent pas leurs obligations légales et, de manière plus générale, les pratiques délictuelles qui s'y rattachent. Ainsi, en 2022, sur 2124 établissements contrôlés, 60% étaient en anomalie, ces contrôles ont donné lieu à l'émission de 3,4 Meuros d'amendes à l'encontre des professionnels. Les sanctions prononcées sont publiées sur le site de la DGCCRF et sur ses comptes notamment « twitter » et « facebook », dans le cadre de sa politique du « name and shame » pour mieux informer les consommateurs sur les sociétés sanctionnées et renforcer l'effet dissuasif des sanctions. Ces publications sont également reprises sur le site internet bloctel.gouv.fr. Le Gouvernement est pleinement conscient que pour beaucoup de nos concitoyens, les appels téléphoniques, non désirés et répétés, effectués à tout moment de la journée, dans le but de leur vendre un produit ou de leur fournir un service qu'ils ne souhaitent pas, constituent une véritable nuisance. Il continuera donc à agir pour renforcer la lutte contre ces pratiques.
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