Question de M. BENARROCHE Guy (Bouches-du-Rhône - GEST) publiée le 17/11/2022
Question posée en séance publique le 16/11/2022
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour le groupe Écologiste Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guy Benarroche. Ma question s'adressait à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Après tergiversations et revirements, la France a accueilli le navire Ocean Viking qui errait depuis une vingtaine de jours au large de nos côtes. Tant mieux.
Enfin arrivés, ces migrants ont été pris en charge humainement et avec dignité et ont fait l'objet d'entretiens successifs avec les agents de la police aux frontières (PAF), de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) et parfois avec les agents en charge de la sécurité du camp.
J'ai pu observer dimanche, sur place, dans cette zone d'attente temporaire, ces entretiens, l'absence d'avocats, l'absence de traducteurs sur place, les bureaux ouverts aux quatre vents mettant à mal la confidentialité, l'absence de compréhension par le demandeur d'asile de ce qui se passait.
Ce contexte dégradé ne permet pas d'émettre un avis.
Les premiers entretiens de l'Ofpra ont débuté dimanche, ils sont aujourd'hui terminés. Hier, le ministre de l'intérieur a rappelé que le sort était fixé pour 148 personnes 44 mineurs non accompagnés (MNA), 60 personnes acceptées, 44 refusées.
Avez-vous des éléments sur la situation des 86 autres personnes rescapées ?
Hier, le ministre de l'intérieur a fait des révélations troublantes. Au sujet des 44 personnes s'étant vu refuser le droit d'entrée au titre d'une demande d'asile, il a annoncé : « Elles seront évidemment reconduites. [
] J'ai pris contact dès hier avec mes homologues étrangers, à la demande de la Première ministre et du Président de la République. »
Quelle étrange chronologie annoncée par le ministre !
Vous le savez, les migrants qui se voient refuser l'entrée au titre de la demande d'asile doivent en recevoir notification et ont droit à un recours suspensif. Tant que tous ces délais ne sont pas expirés ou que le juge administratif n'a pas statué de manière définitive, ces migrants sont légalement toujours considérés comme demandeurs d'asile.
Avant un refus définitif, tout contact avec leurs pays d'origine constitue une violation des conventions de Genève, un manquement grave au respect de la Convention européenne des droits de l'homme et, pis que tout, ils pourraient faire courir de nouveaux risques pour ces personnes.
Madame la ministre, pouvez-vous justifier ces contacts précipités et contraires au droit avec ces pays ? (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales publiée le 17/11/2022
Réponse apportée en séance publique le 16/11/2022
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Guy Benarroche, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence du ministre de l'intérieur, retenu à l'Assemblée nationale cet après-midi.
Comme vous le savez, le 11 novembre dernier, la France a pris la décision d'accueillir ce bateau qui naviguait en Méditerranée, avec à son bord 234 migrants secourus en mer depuis plus de quinze jours. Parmi eux se trouvaient 44 enfants, qui ont déjà été accompagnés en foyer d'accueil.
La décision d'accueillir l'Ocean Viking a été prise à titre exceptionnel. La France a rempli son devoir avec une triple exigence d'humanité, de sécurité et de fermeté.
Concernant la situation de ces 234 migrants, je peux vous indiquer que, pour le moment, les démarches de l'Ofpra, tout comme les procédures devant le juge des libertés et de la détention ne sont pas toutes terminées.
Il nous est donc difficile, à ce stade, de vous communiquer des chiffres définitifs. Je vous confirme néanmoins que, à leur arrivée, toutes les mesures ont été prises afin d'apporter l'assistance sanitaire et médicale nécessaire aux passagers. Ceux-ci ont ensuite été placés dans une zone d'attente.
Chacun d'entre eux fait l'objet d'un entretien individuel de sécurité avec les services spécialisés ainsi que d'un entretien administratif, comme vous l'avez rappelé, avec l'Ofpra. Ceux qui peuvent obtenir l'asile seront accueillis partout en Europe, ce qui prouve bien, comme l'a dit la Première ministre il y a quelques instants, que la solution est européenne et nous tenons à remercier nos partenaires de cette solidarité.
La France a d'ailleurs demandé la tenue dans les tout prochains jours d'une réunion européenne à un niveau ministériel afin de traiter des suites de cette affaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour la réplique.
M. Guy Benarroche. Madame la ministre, je n'ai pas eu de réponse à mes deux questions. Je le répète, accueillir dignement, c'est accueillir dans les règles et dans le respect des procédures.
Accueillir dignement, ce n'est pas se réjouir et se féliciter d'avoir fait preuve d'humanité et, en même temps, publier des arrêtés préfectoraux interdisant les distributions de repas à Calais, après avoir été contraint de mettre en place des points d'eau.
Accueillir, enfin, c'est secourir en Méditerranée, comme dans la Manche et comme dans les Alpes ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)
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