Question de M. DECOOL Jean-Pierre (Nord - Les Indépendants-A) publiée le 03/11/2022

M. Jean-Pierre Decool attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique à propos des arnaques bancaires. Plusieurs faits avérés font état d'une démarche de la part des services « fraude » des banques. Les clients de la banque sont appelés sur leur portable pour les avertir de mouvements anormaux sur leur compte. Confiants puisque l'interlocuteur dispose du portable et du numéro de carte bancaire, les clients acceptent légitimement d'annuler ces opérations et de faire opposition. Il leur est demandé de procéder à ces actions sur leur portable par des validations de demandes d'annulation qui impliquent finalement le paiement et le débit de la somme. Il s'agit donc d'opérations strictement frauduleuses. Or il se trouve que certaines banques refusent le remboursement des sommes prélevées, considérant que la victime a donné son accord pour annuler ces dépenses. Pourtant l'article L. 133-19 du code monétaire et financier prévoit que la responsabilité du client n'est pas engagée « si l'opération de paiement non autorisée a été effectuée en détournant, à l'insu du payeur, l'instrument de paiement ou les données qui lui sont liées ».
Il lui demande s'il entend intervenir auprès des banques pour que la législation soit appliquée.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 08/12/2022

La lutte contre les fraudes et arnaques, notamment en ligne, fait l'objet d'une vigilance particulière du Gouvernement. Suivant le rapport de l'Observatoire de la Sécurité des Moyens de Paiement (OSMP), qui a notamment pour mission d'assurer le suivi de la mise en œuvre des mesures adoptées par les établissements bancaires émetteurs, les commerçants et les entreprises pour renforcer la sécurité des moyens de paiement, la fraude aux transactions scripturales s'est élevée à 1,242 milliards d'euros en 2021, pour 7,5 millions d'opérations frauduleuses, soit un recul de 3,8 % par rapport à 2020. Le renforcement de la sécurisation, notamment par la généralisation progressive depuis 2019 des règles d'authentification forte pour les transactions à distance, a permis de faire décroître de 1,9 % le montant total de la fraude sur les cartes françaises. Contre ces pratiques dommageables aux utilisateurs des services de paiement, les administrations et autorités de contrôle sont entièrement mobilisées, notamment dans le cadre de la « Task-force nationale de lutte contre les arnaques ». Cette force opérationnelle pilotée par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) favorise la coopération de l'ensemble des services engagés et travaille au renforcement de l'efficacité des actions engagées contre ces fraudes. Dans ce cadre, la Task-force a lancé un appel à la vigilance et a diffusé un guide à destination des professionnels et particuliers pour se prémunir contre les fraudes et les arnaques notamment dans le secteur financier (https://www.economie.gouv.fr/files/2021-03/guide-des-arnaques-task-force.pdf). Dans les arnaques dites du « faux conseiller bancaire », une personne, se présentant comme le conseiller bancaire du consommateur, prétend alerter ce dernier sur des opérations de paiement « anormales », présentées au débit de son compte bancaire et lui demande d'agir directement sur son téléphone ou de lui donner des informations confidentielles afin d'annuler ces opérations de paiement frauduleuses, alors que dans les faits, il les valide. Il est d'autant plus difficile pour le consommateur de se rendre compte qu'il s'agit d'une arnaque que le numéro téléphonique qui s'affiche comme celui de son correspondant est celui de l'établissement bancaire, voire la ligne directe de son conseiller bancaire, et que le faux conseiller dispose, en amont, d'informations exactes et précises, de nature à dissiper les doutes des victimes. Aux termes du point II de l'article L. 133-19 du Code monétaire et financier (CMF), la responsabilité du payeur victime de l'arnaque n'est pas engagée si l'opération de paiement non autorisée a été effectuée en détournant, à l'insu du payeur, l'instrument de paiement ou les données qui lui sont liées. Cependant, les victimes de ce type de fraude peuvent rencontrer des difficultés à se faire rembourser par leur banque, au motif que les règles d'authentification renforcée du paiement ont été respectées et qu'elles ont manqué de vigilance en communiquant leurs données personnelles. En effet, si, en application de l'article L. 133-18 du CMF, la banque est tenue de rembourser le montant de l'opération non autorisée, la réglementation précise que le payeur supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si ces pertes résultent d'un agissement frauduleux de sa part ou s'il n'a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave à ses obligations en tant qu'utilisateur de la carte de paiement, notamment celle de préserver la sécurité de ses données de sécurité personnalisées (point IV de l'article L. 133-19 précité). Le cas échéant, les établissements bancaires sont tenus de communiquer à la Banque de France, par écrit, les raisons pour lesquelles ils soupçonnent une fraude de l'utilisateur du service de paiement (alinéa 1er de l'article L. 133-18 du CMF). La Cour de cassation, lorsqu'elle fait application de ces dispositions, considère qu'il convient d'apprécier in concreto si l'utilisateur de la carte de paiement n'aurait pas pu avoir conscience du caractère frauduleux de l'opération (Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 24 novembre 2021, 20-13.767). De plus, la Cour rappelle non seulement qu'il appartient à la banque de rapporter la preuve que l'utilisateur, qui nie avoir autorisé une opération de paiement, a agi frauduleusement ou n'a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave à ses obligations, mais encore que cette preuve ne peut se déduire du seul fait que l'instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont liées ont été effectivement utilisés (Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 9 mars 2022, 20-12.376). Les pratiques des banques font actuellement l'objet d'une attention toute particulière des autorités de contrôle. La DGCCRF et l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) coordonnent en effet étroitement leurs actions respectives. Enfin, au niveau européen, la Commission européenne a lancé le 10 mai 2022 une consultation sur la révision de la 2ème directive européenne sur les services de paiement (DSP 2), dont sont issues les dispositions du Code monétaire et financier susmentionnées. Cette démarche vise notamment à faire un bilan sur la mise en œuvre de la DSP 2 en matière de sécurité des moyens de paiement utilisés en ligne, de protection des services de paiements contre les fraudes et de renforcement des droits des utilisateurs.

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