Question de Mme MERCIER Marie (Saône-et-Loire - Les Républicains) publiée le 01/12/2022

Mme Marie Mercier attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur l'incongruité de notre échelle de valeurs en matière de protection des mineurs. Pour éviter de nouveaux drames, comme celui qui s'est produit le 17 novembre 2022 boulevard des Italiens à Paris, les opérateurs - Dott, Lime et Tier - ont annoncé interdire leur utilisation aux mineurs dès le lundi 28 novembre 2022. Ils vont désormais demander à leurs clients de scanner leur carte d'identité : l'interdiction des trottinettes aux mineurs reposait jusqu'ici sur une simple déclaration. Nous ne pouvons que nous féliciter d'être en capacité de poser des limites aux mineurs pour leur propre sécurité... mais tel n'est pas le cas en réalité.
Elle rappelle qu'elle a fait voter une disposition à l'unanimité au Sénat, désormais inscrite dans la loi n° 2020-936 du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales. Cette disposition permet d'instaurer le contrôle d'accès des mineurs aux sites pornographiques gratuits. Elle institue une nouvelle procédure destinée à obliger les éditeurs de ces sites pornographiques à mettre en place un contrôle de l'âge de leurs clients : d'abord le président de l'autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) leur adresse une injonction de se mettre en conformité avec la loi, puis il peut saisir le président du tribunal judiciaire de Paris afin qu'il ordonne aux opérateurs de rendre impossible l'accès à ces sites qui ne pourront donc plus être consultés depuis la France. Il s'agit là d'une grande avancée en matière de protection des mineurs. Que ce soit sur un ordinateur ou sur leur smartphone, les mineurs peuvent en effet de nos jours très facilement visionner des contenus pornographiques disponibles gratuitement en ligne, avec des conséquences indéniables sur leur développement affectif, psychologique et sexuel. Ainsi, le lundi 13 novembre 2021, 5 sites pornographiques parmi les plus regardés ont été sommés par l'Arcom de se plier à la loi. Les mises en demeure restées sans effet malgré les constats d'huissiers, l'Arcom a décidé de saisir le président du tribunal judiciaire de Paris. Le mardi 6 septembre 2022, la justice française a examiné la demande de blocage de ces 5 sites, et le jeudi 8 septembre 2022, elle a enjoint l'Arcom de rencontrer un médiateur pour renouer le dialogue avec les 5 sites pornographiques dans le but de trouver un moyen d'empêcher leur accès aux mineurs. Si on peut considérer que les sites visés usent de manœuvres dilatoires pour éviter un blocage par la justice, l'Arcom a dû se ranger à la décision et s'est pleinement engagée dans le processus de médiation. Mais peut-être faudrait-il demander aux opérateurs de trottinettes de se saisir de la question pour mieux protéger nos enfants ! Aussi elle veut savoir la réaction du Gouvernement face à cette situation rocambolesque qui perdure, le nombre de petites victimes de la pornographie en augmentation constante, avec ses conséquences sur l'âge adulte.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 06/04/2023

La loi n° 2020-936 du 30 juillet 2020 incrimine le fait de diffuser un message à caractère pornographique susceptible d'être vu par un mineur y compris lorsque ce dernier déclare être âgé de 18 ans (article 227-24 du code pénal) et renforce les pouvoirs de l'autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) pour faire cesser l'accès aux sites à caractère pornographique lorsqu'ils sont consultables par des mineurs. Elle a été complétée par le décret n° 2021-1306 du 7 octobre 2021 qui prévoit, notamment à son article 3, que l'Arcom peut adopter des lignes directrices concernant la fiabilité des procédés techniques permettant de s'assurer que les utilisateurs souhaitant accéder au contenu pornographique d'un service de communication au public en ligne sont majeurs. Le 27 septembre 2022, un rapport sur l'industrie de la pornographie a été déposé à la présidence du Sénat par la délégation des droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat. Il recommande notamment d'assermenter les agents de l'Arcom afin de leur permettre de constater eux-mêmes les infractions des sites pornographiques accessibles aux mineurs, de confier à l'Arcom un pouvoir de sanction administrative à l'encontre de ces derniers, de leur imposer l'affichage d'un écran noir tant que l'âge de l'internaute n'a pas été vérifié, de définir dans les lignes directrices de l'Arcom des critères exigeants d'évaluation des solutions techniques de vérification de l'âge et d'imposer des systèmes de vérification d'âge selon le principe du double anonymat. Une réflexion est actuellement en cours, à la suite du dépôt de ce rapport, pour renforcer la protection des mineurs face aux images pornographiques sur internet. Elle s'inscrit toutefois dans un contexte où plusieurs décisions sont attendues. Conformément aux dispositions de l'article 23 de la loi du 30 juillet 2020, le président de l'Arcom a en effet mis en demeure cinq sites pornographiques de se conformer à l'obligation légale d'empêcher l'accès des mineurs à leurs contenus puis a saisi le président du tribunal judiciaire (TJ) de Paris afin d'obtenir selon la procédure accélérée que ces derniers mettent fin à l'accès à ce service. Dans ce cadre, le TJ de Paris a ordonné une médiation entre les parties. Cette médiation n'a pas abouti et l'affaire est en cours. Le gouvernement fera des propositions sur ce sujet dans le projet de loi en cours de préparation qui portera adaptation du droit national aux règlements "digital service act"et"digital market act".

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