Question de M. DECOOL Jean-Pierre (Nord - Les Indépendants-A) publiée le 22/12/2022
M. Jean-Pierre Decool attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice à propos des professions juridiques dispensées d'obtenir le diplôme du certificat d'aptitude à la profession d'avocat (CAPA) pour s'inscrire au barreau. Le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 relatif à la profession d'avocat, prévoit des équivalences pour les juristes dentreprise. Le décret exclut en revanche, les juristes des cabinets d'expertise comptable. Il lui demande si cette dernière disposition n'est pas contraire à la directive européenne (UE 2018/958) du 28 juin 2018 qui prévoit que « les réglementations nationales organisant l'accès aux professions réglementées ne devraient pas constituer un obstacle injustifié ou disproportionné à l'exercice de ces droits fondamentaux » tels que le libre choix de la profession inscrit dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
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Réponse du Ministère de la justice publiée le 16/02/2023
Selon la directive UE 2018/958, en l'absence de disposition spécifique du droit de l'Union harmonisant les conditions d'accès à une profession réglementée ou d'exercice de celle-ci, il est de la compétence des États membres de décider des professions à réglementer et de la manière de les réglementer, dans les limites des principes de non-discrimination et de proportionnalité. Les mesures nationales susceptibles de gêner ou de rendre moins attrayant l'exercice des libertés fondamentales garanties par le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne doivent ainsi s'appliquer de manière non discriminatoire, se justifier par des objectifs d'intérêt général, garantir la réalisation de l'objectif qu'elles poursuivent sans dépasser ce qui est nécessaire pour l'atteindre. La profession d'avocat est une profession libérale réglementée. L'avocat est en charge d'activités monopolistiques, et notamment la représentation et l'assistance des citoyens devant les juridictions. L'accès à la profession répond donc à des exigences nécessaires et proportionnées au regard des missions d'intérêt général confiées à ce professionnel, dont l'activité participe à l'Etat de droit. Les articles 97 à 98-1 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat aménagent les conditions d'inscriptions particulières en fonction des activités précédemment exercées. Constituant des accès dérogatoires, la Cour de cassation en fait une interprétation restrictive. L'article 98 3° du même décret dispose que les juristes d'entreprise justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle au sein du service juridique d'une ou plusieurs entreprises sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat. La Cour de cassation définit le juriste d'entreprise comme étant celui qui assume de façon autonome et organisée des attributions le plaçant de manière constante au cur de la vie juridique de l'entreprise et rendues nécessaires par la taille de celle-ci, le nombre de ses collaborateurs et employés, la nature juridique de ses prestations, l'engagement de sa responsabilité civile, le recouvrement de ses créances, la mise en uvre de ses diverses obligations de nature contractuelle, administrative, fiscale (Cass. Ch. Mixte, 6 fév. 2004, n° 00-19.107). Le décret n'exclut pas les juristes des cabinets d'expertise comptable et la Cour d'appel de Paris a reconnu la qualité de juriste d'entreprise à un collaborateur de service juridique d'une société d'expertise comptable (Paris, 7 novembre 1991). En revanche, n'est pas pris en considération le temps passé au sein d'un cabinet d'expertise comptable du candidat qui s'est borné à effectuer des prestations juridiques liées à l'activité du cabinet, sans traiter les problèmes d'ordre juridique ou judiciaire concernant l'organisation et le fonctionnement de l'entreprise elle-même et posés par l'activité de celle-ci (Basse Terre, 18 janv 1995). Ces précisions qui s'assurent du niveau de compétence du candidat à la profession d'avocat ne posent aucune discrimination, sont justifiés au regard de la mission d'intérêt général de la profession d'avocat et sont nécessaires et proportionnées à l'objectif poursuivi.
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