Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE) publiée le 29/12/2022
M. Fabien Gay attire l'attention de Mme la ministre de la transition énergétique sur la situation des collectivités territoriales dont les contrats d'achat d'électricité ont été conclus durant les pics d'inflation observés cette année sur les prix de l'énergie.
N'étant plus éligibles aux tarifs réglementés de vente de l'électricité (TRVE) depuis 2019, les collectivités territoriales sont en première ligne face à la crise de l'énergie. En moyenne, celles-ci doivent faire face à un surcoût compris entre 30 % et 300 % de leur facture habituelle.
Cette réalité n'épargne aujourd'hui que les collectivités aux budgets de fonctionnement inférieurs à 2 millions d'euros et dont les effectifs ne dépassent pas 10 agents, qui sont les seules à être couvertes par le bouclier tarifaire.
Dans l'année qui s'est écoulée, les prix de l'énergie ont atteint des proportions sans précédent. Au mois d'août 2022, en plein pic d'inflation, le MWh s'achetait à 1 000 euros sur le marché. Pour de nombreuses collectivités, ce moment concordait avec l'arrivée à échéance de leurs contrats d'achat d'énergie et signifiait, en conséquence, l'obligation pour elles de renégocier rapidement de nouveaux contrats.
Si le Gouvernement avait alors invité les collectivités territoriales à retarder au maximum la signature de ces nouveaux contrats, beaucoup d'entre elles n'ont disposé d'aucune marge de manœuvre pour reculer la signature de leur acte d'achat.
Ainsi, dans un contexte de pic d'inflation, ces contrats ont été conclus sur la base de prix déraisonnables, qui engagent dans le temps les collectivités territoriales sur des dépenses de fonctionnement qui ne reflètent plus le cours actuel des prix de l'énergie. Quant aux quelques collectivités qui sont parvenues à retarder cette échéance, elles sont nombreuses à n'avoir pu le faire que sur une fraction de leurs besoins d'achat.
Alors que les collectivités territoriales sont aujourd'hui contraintes à des arbitrages intenables, ces contrats conclus au prix fort scellent pour des mois voire des années - le bénéfice d'une rente pérenne qui sera perçue par les fournisseurs alternatifs.
En effet, via ces contrats, ces derniers pourront facturer de l'électricité au prix du pic d'inflation et dans le même temps, se fournir au cours actuel du marché ; c'est-à-dire à des prix bien moins élevés. La différence entre ces deux prix n'est ni plus ni moins qu'un bénéfice net engrangé par le secteur privé sur fond de crise de l'énergie, au détriment des collectivités territoriales.
Notons par ailleurs qu'avec la mise en place de l'amortisseur d'électricité en 2023, la prise en charge d'une partie du surcoût des collectivités par l'État reviendra directement à alimenter ce système. Il n'est pas admissible qu'une telle rente prospère sur de l'argent public ; ni sur celui des collectivités territoriales, ni sur celui de l'État.
Il souhaite ainsi savoir quelles interventions du Gouvernement sont prévues pour permettre aux collectivités territoriales de renégocier les contrats d'électricité conclus cet été durant le pic d'inflation énergétique.
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Réponse du Ministère de la transition énergétique publiée le 06/04/2023
Nous faisons actuellement face à la plus grave crise énergétique depuis les chocs pétroliers de 1970 en raison de la guerre en Ukraine qui retire une source d'approvisionnement en gaz aux pays européens, la faible disponibilité du parc nucléaire français et la sécheresse historique de l'été dernier, qui a réduit à un niveau historiquement bas les stocks hydroélectriques. Cette crise de l'énergie a des conséquences directes sur nos approvisionnements énergétiques et sur les coûts de l'énergie. Dans ce contexte, le Gouvernement est pleinement engagé pour sécuriser l'approvisionnement en énergie, baisser les prix de l'énergie et protéger le pouvoir d'achat des Français. Le Gouvernement accompagne ainsi les collectivités locales et a pris des mesures fortes en ce sens dès le début d'année 2022 : Les petites entreprises et collectivités locales, de moins de 10 employés, moins de 2 millions d'euros de recettes et ayant une puissance de contrat souscrite inférieure à 36 kVa sont éligibles aux tarifs réglementés de vente d'électricité (TRVe). A ce titre, plus de 20000 collectivités sont couvertes par le bouclier tarifaire sur l'électricité, mis en place dès le 1er février 2022. Ce bouclier tarifaire a été prolongé en 2023, avec, au 1er février 2023, une hausse des TRVe, sur la base desquels est calculé le bouclier tarifaire, limitée à +15 % TTC en moyenne. Par ailleurs, conformément aux annonces du Président de la République en janvier 2023, les fournisseurs garantiront aux très petites entreprises (TPE), et plus largement à toutes les entités assimilables à une TPE, quel que soit leur statut et quelle que soit leur puissance souscrite, un prix moyen d'électricité de 280 / MWh HT en 2023, soit 28 c/kWh. Les collectivités locales assimilées à des TPE en bénéficieront donc. Si les entreprises et collectivités locales ne peuvent bénéficier du bouclier tarifaire sur le gaz, réservé aux résidentiels, je me permets de préciser que la fin des tarifs réglementés de vente du gaz (TRVg), qui doit intervenir au 30 juin 2023, n'entraine en aucun cas la fin du bouclier tarifaire sur le gaz ou plus généralement des mesures de protection des consommateurs face à la crise énergétique actuelle. En effet, la loi de finances pour 2023 prévoit que celui-ci sera prolongé et, au second semestre 2023, calculé sur la base d'un indice de prix fixé par voie réglementaire. Par ailleurs, le Gouvernement a annoncé en octobre dernier la mise en uvre d'un dispositif d'amortisseur électricité. Doté en loi de finances pour 2023 de 3 milliards d'euros, ce dispositif est effectif depuis le début d'année 2023. Il permet de limiter la hausse des prix de l'énergie pour les consommateurs non éligibles au bouclier tarifaire sur l'électricité, en particulier les petites et moyennes entreprises (PME) et assimilés ainsi que toutes les collectivités territoriales. Ce mécanisme s'appliquera à tous les contrats en cours dès lors que le contrat repose sur un prix de l'énergie supérieur à 180 /MWh. Concrètement l'Etat va prendre en charge, sur 50 % des volumes d'électricité consommés, l'écart entre le prix de l'énergie du contrat et 180 /MWh (soit 0,18 /kWh). Le montant d'aide au titre de l'amortisseur électricité peut être estimé sur le simulateur du Gouvernement (https://www.impots.gouv.fr/simulateur-amortisseur-electricite). Enfin, les collectivités locales bénéficient spécifiquement de la prolongation et de l'amplification du filet de sécurité pour l'année 2023, désormais ouvert également aux départements et régions fragilisés par la crise. Ce filet s'ajoute à « l'amortisseur électricité » susmentionné et couvrira aussi les surcoûts liés au prix du gaz comme de l'électricité. Pour bénéficier du bouclier tarifaire, de l'amortisseur électricité ou de la mesure de plafonnement à 280 /MWh HT (soit 28 c/kWh) en moyenne sur l'année 2023, il n'y a qu'une chose à faire : remplir l'attestation d'éligibilité auprès des fournisseurs ou cocher la case correspondant à votre statut sur l'espace client de votre fournisseur d'énergie. Cette démarche est la même pour les trois dispositifs. Elle permettra au fournisseur de mettre en uvre directement les mesures de baisse de coût de l'électricité dans la facture. Les modalités de remplissage de l'attestation unique sont disponibles sur le site https://www.ecologie.gouv.fr/amortisseur-electricite-entreprises-et-collectivites-des-2023. L'ensemble de ces mesures permettra, pour les contrats signés aux prix les plus élevés, de réduire fortement la facture d'électricité. Je vous invite, dans ce contexte, à suggérer à vos interlocuteurs de faire pleinement jouer le jeu de la concurrence pour rechercher l'offre la plus pertinente en termes de prix et d'indexation. Le Gouvernement vise également à apporter des solutions structurelles à la hausse des prix de l'énergie élevés. D'une part, au plan européen, je porte des réformes et textes qui permettent aux Français payer un prix de l'électricité plus compétitif. D'autre part, le Gouvernement soutient fortement les collectivités dans leurs efforts de sobriété et d'efficacité énergétique : Au travers des dotations d'investissement, l'Etat accompagne les collectivités dans leurs projets de rénovation énergétique des bâtiments afin de faire baisser structurellement les coûts de l'énergie grâce à l'efficacité énergétique. Ainsi, en 2023, les dotations d'investissement aux collectivités territoriales (DSIL, DETR, DPV, DSID) sont maintenues à un niveau historiquement élevé, avec notamment plus de 2 Md ouverts en loi de finances pour 2023. D'autre part, le « fonds vert » permettra de mobiliser au total 2 Md de crédits pour financer des projets portés dans les territoires. Cela complète l'action des dispositifs portés par l'ADEME dont certains, à l'instar du fonds chaleur, peuvent bénéficier aux collectivités territoriales. Par ailleurs, le dispositif des certificats d'économies d'énergie (CEE) prévoit des bonifications via le « Coup de pouce chauffage des bâtiments tertiaires » pour le remplacement des équipements de chauffage ou de production d'eau chaude sanitaire utilisant des énergies fossiles par des dispositifs plus efficaces énergétiquement et utilisant des énergies renouvelables. Celui-ci est en place depuis 2020 et jusqu'à fin 2025. Enfin, parce l'accompagnement des territoires dans leur démarche de sobriété et d'efficacité énergétiques est essentiel, j'ai également ré abondé à hauteur de 220 millions d'euros le programme CEE ACTEE (Action des Collectivités Territoriales pour l'Efficacité Energétique), financé par les CEE. Celui-ci apporte un financement pour de l'ingénierie, de la maîtrise d'uvre, ainsi que l'achat d'équipements de suivi de travaux de rénovation énergétique. Il met en outre à disposition un centre de ressources facilitant le parcours des collectivités (guide, cahier des charges, simulateurs, ) et touche tous les domaines de compétences des territoires.
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