Question de Mme VOGEL Mélanie (Français établis hors de France - GEST) publiée le 19/01/2023

Question posée en séance publique le 18/01/2023

M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

Mme Mélanie Vogel. Il avait seulement 13 ans et toute la vie devant lui. Pourtant, le 7 janvier dernier, Lucas s'est donné la mort. Pourquoi, en 2023 en France, un gamin homosexuel en arrive-t-il à se suicider ? Parce que – et, croyez-moi, je sais trop bien de quoi je parle –, à n'envisager qu'une vie de moqueries, de rejet, d'exclusion et de haine, on en arrive parfois à ne plus envisager de vie du tout.

C'est donc avec beaucoup d'émotion, mais aussi avec beaucoup de gravité, que je voudrais m'adresser aujourd'hui à toutes celles et à tous ceux, y compris au Gouvernement, dont les propos ont nourri et nourrissent ces violences ; à toutes celles et à tous ceux qui ont marché avec La Manif pour tous, qui ont raconté que nos familles étaient contre-nature, que nos droits étaient d'égoïstes caprices, que respecter les mineurs trans, c'était de l'idéologie, qu'apprendre aux élèves le respect de la diversité, c'était de la propagande, que moi, j'étais un problème lorsque je publie des photos avec ma compagne, précisément pour donner à voir à des adolescents comme Lucas un avenir dans lequel ils peuvent avoir une place et – pourquoi pas ? – devenir un jour un élu de la République ; à toutes celles et à tous ceux qui, par homophobie, par transphobie, parfois par simple cynisme électoraliste, nous prennent pour des boucs émissaires.

Si le suicide de jeunes LGBT vous peine, si vous voulez réellement que cela s'arrête, commencez par le commencement ! Faites votre examen de conscience ! Dites-nous que vous vous êtes trompés, que ce drame vous a fait comprendre quelque chose : que nous étions non pas une idéologie, un argument de campagne, mais des humains ?

Lucas, Dinah, Luna auraient pu être vos enfants, vos petits-enfants. Et leurs harceleurs aussi. Les enfants entendent et répètent ce que les adultes racontent. L'école est dans la société. Elle est traversée par ses débats, nourrie par ses haines et pétrie par sa violence.

Aurez-vous pour la famille de Lucas, pour ses amis, l'humilité de changer ? (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE, RDSE et RDPI.)


Réponse du Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse publiée le 19/01/2023

Réponse apportée en séance publique le 18/01/2023

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

M. Pap Ndiaye, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Vogel, quand un enfant met fin à ses jours, il n'y a pas de mots pour dire l'émotion, le chagrin, la douleur. Il n'y a pas de mots… (La voix de M. le ministre laisse transparaître sa vive émotion.) Que voulez-vous que je vous dise ?

J'adresse mes pensées les plus émues à ses parents, à ses proches, à ses amis.

Ce drame montre à quel point la lutte contre le harcèlement scolaire, la lutte contre l'homophobie – parce que, oui, l'homophobie tue ! – doit demeurer une priorité du Gouvernement.

L'orientation sexuelle est souvent un point d'appui des auteurs de harcèlement. C'est vrai aussi d'autres caractéristiques, comme l'apparence physique, l'origine, la condition sociale. Au-delà de la généralisation du programme de lutte contre le harcèlement à l'école (pHARe), sur laquelle j'aurai peut-être l'occasion de revenir, nous agissons pour changer les représentations qui alimentent les haines.

En matière d'homophobie et d'égalité entre les femmes et les hommes, la prévention passe en particulier par l'éducation à la sexualité. C'est pour cela que, dès le mois de septembre dernier, j'ai pris des mesures pour rendre effectifs ces enseignements, qui, admettons-le, ne sont pas correctement assurés aujourd'hui. J'ai eu l'occasion de m'en entretenir récemment avec les sénatrices Annick Billon, Laurence Cohen, Laurence Rossignol et Alexandra Borchio Fontimp.

Enfin, pour lutter contre l'homophobie à l'école, j'ai décidé, comme je l'ai annoncé hier, de généraliser au cours des prochaines semaines des groupes de sensibilisation, de prévention et d'action contre les LGBTphobies dans chaque académie. Je suivrai cela personnellement.

Nous avons encore – c'est vrai, madame la sénatrice – du chemin à parcourir. La question du harcèlement, de même que celle de l'homophobie, concerne tout le monde. L'éducation nationale est pleinement engagée en la matière. Vous pouvez compter sur moi. (Applaudissements.)

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