Question de Mme ROSSIGNOL Laurence (Oise - SER) publiée le 26/01/2023

Question posée en séance publique le 25/01/2023

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

Mme Laurence Rossignol. Ma question s'adresse à Mme la Première ministre.

Lundi dernier, le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE) a rendu son rapport annuel. Ce document confirme la persistance du sexisme à un haut niveau dans notre société, ce qui explique que la condition des femmes reste soumise aux inégalités et aux violences. Cet écosystème sexiste impose aux femmes de toujours devoir s'adapter, esquiver et résister, ce qui leur demande des efforts constants.

À propos d'efforts, le même jour, avec un sens du timing étonnant,…

M. Marc-Philippe Daubresse. Et inédit…

Mme Laurence Rossignol. … le ministre Riester, dans un merveilleux moment de franchise, a déclaré que cette réforme allait exiger des femmes un effort supplémentaire. Je le dis clairement : pour ce qui est des femmes, les efforts, c'est non ! Nous en faisons déjà assez comme ça, tout le temps ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE. – Mme la Première ministre ironise.)

Vous répétez en boucle que la pension minimale passera à 1 200 euros, mais les conditions d'accès à ce niveau de retraite, en particulier l'exigence d'une carrière complète, sont si drastiques que les femmes ne peuvent les remplir : comme elles ont des carrières hachées, elles ne pourront profiter de cette pension à 1 200 euros.

En revanche, si une chose est certaine, c'est que les femmes devront travailler plus longtemps, et plus longtemps que les hommes qui pourtant verront eux-mêmes leur temps de travail s'allonger… En effet, selon les études d'experts, l'accroissement de la durée d'activité sera deux fois plus important pour les femmes nées à partir de 1972 que pour les hommes.

L'ensemble est quelque peu complexe, mais cela prouve que votre réforme accentue les inégalités entre les femmes et les hommes, comme d'ailleurs toutes les réformes censées être neutres.

Puisque nous parlons d'efforts et que les femmes, comme je l'ai souligné, en font déjà beaucoup, madame la Première ministre, vous, faites-en un : vous êtes celle qui peut réaliser un très bel effort, en renonçant à cette réforme injuste pour les femmes. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Mme la Première ministre sourit.)


Réponse du Ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion publiée le 26/01/2023

Réponse apportée en séance publique le 25/01/2023

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Madame la sénatrice Laurence Rossignol, je ne reviendrai pas sur les éléments que j'ai donnés précédemment en réponse à la question de Mme Cathy Apourceau-Poly.

La réforme que nous menons comporte des systèmes de protection pour les femmes. Vous avez du mal à l'entendre ou à le concevoir, manifestement !

Ainsi, même si je ne l'ai pas rappelé tout à l'heure, nous avons veillé à ce que l'âge de suppression de la décote soit maintenu à 67 ans, sans changement par rapport à aujourd'hui. (Mme Laurence Rossignol ironise.)

En effet, comme 20 % des femmes ont une carrière incomplète, l'essentiel des personnes qui travaillent jusqu'à 67 ans sont justement des femmes. Avec la retraite minimum, nous faisons en sorte que les femmes, qui ont les carrières les plus fragiles et les plus hachées, avec les revenus les plus bas, bénéficient de la réforme.

Ainsi, la retraite minimum que nous mettons en place permettra à 200 000 nouveaux retraités par an, soit un départ à la retraite sur quatre, de bénéficier d'une meilleure pension. Les deux tiers de ces bénéficiaires sont des femmes, qui sont les plus exposées à la précarité et aux carrières hachées – sur ce point, je vous rejoins.

Le temps me manque pour décrire ces mécanismes. Mais nous avons fait le choix de revaloriser le minimum contributif majoré, qui est accessible dès 120 trimestres cotisés. Nous avons également fait le choix de revaloriser le minimum contributif de base, accessible à toutes celles et à tous ceux qui ont travaillé, ce qui permet de protéger les plus fragiles.

Mme Laurence Rossignol. Et les carrières complètes ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Nous n'avons pas les mêmes priorités, madame la sénatrice. (Exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE.) Vous parlez des carrières complètes, alors que nous nous adressons justement à celles qui n'ont pas des carrières complètes et qui bénéficieront des revalorisations et des systèmes de protection que nous mettons en place.

Notre priorité est donc de protéger les plus fragiles, celles et ceux qui sont exposés à la précarité et aux difficultés de carrière. Nous y parviendrons avec cette loi.

Je termine en abordant un point pour lequel je suis en accord avec vous. Vous avez cité le rapport du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes. Celui-ci montre que notre système de retraite, que l'on accuse parfois de tous les maux, est aussi le réceptacle d'une vie d'inégalités.

Travaillons sur ces inégalités, faisons en sorte de les résorber, et les retraites seront beaucoup plus justes. Tout le monde en sera satisfait ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

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