Question de Mme DARCOS Laure (Essonne - Les Républicains) publiée le 26/01/2023
Question posée en séance publique le 25/01/2023
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laure Darcos. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
Monsieur le ministre, le Gouvernement vient de présenter sa réforme des retraites. Or le moins que l'on puisse dire, c'est que les femmes pourraient être les grandes perdantes des mesures à venir. L'étude d'impact le démontre clairement : elles devront travailler en moyenne sept mois de plus, alors que les hommes ne seront astreints qu'à cinq mois supplémentaires.
En outre, de nombreuses femmes pouvaient partir dès 62 ans à taux plein grâce aux trimestres acquis lors de la naissance de leurs enfants. Avec votre réforme, elles devront travailler deux ans de plus pour atteindre le nouvel âge légal de 64 ans et perdront le bénéfice de cette bonification.
Vous aurez beau jeu de souligner que, en travaillant plus longtemps, elles bénéficieront d'une retraite revalorisée. Vous ne manquerez pas de rappeler également qu'elles seront les premières bénéficiaires de la hausse du minimum de pension. Mais de quelle retraite parlons-nous ?
Vous ne l'ignorez pas, la retraite des femmes est de 40 % inférieure à celle des hommes, parce qu'elles sont les premières victimes des inégalités salariales. Vous ne l'ignorez pas non plus, elles ont fréquemment des carrières interrompues par des maternités, qui réduisent la durée de cotisation et font qu'elles sont plus touchées par la décote.
Dans ces conditions, il est indispensable de compenser l'effort supplémentaire demandé aux femmes, de mieux prendre en compte leur maternité, car une réforme des retraites par répartition ne peut se désintéresser de la politique familiale, et d'avancer l'âge de la suppression de la décote.
À ce stade du projet de loi et avant les discussions parlementaires, ces mesures nous paraissent plus équitables que l'allongement de la durée de vie active pour améliorer le taux de pension. Êtes-vous prêt, monsieur le ministre, à corriger ces injustices, qui concernent les femmes et que notre groupe a déjà pointées à plusieurs reprises ?
Sur un sujet aussi grave, nous aurons à cœur de trouver, au sein de la majorité sénatoriale, comme à notre habitude, une solution de compromis acceptable par tous. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Réponse du Ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion publiée le 26/01/2023
Réponse apportée en séance publique le 25/01/2023
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Madame la sénatrice Darcos, vous avez raison sur un point fondamental, à savoir l'inégalité de niveaux de retraite entre les femmes et les hommes.
Aujourd'hui, 50 % des femmes retraitées ont une retraite inférieure à 1 000 euros brut. C'est la conséquence ou l'effet miroir d'une inégalité face au travail et aux salaires. Le mouvement sociologique que nous connaissons d'augmentation du taux d'activité et du taux d'emploi des femmes corrige peu à peu bien trop lentement cette inégalité, qui est simplement le fruit des inégalités professionnelles et de carrière.
La priorité est donc de rétablir l'égalité professionnelle, pour que nous n'ayons pas, au moment des départs à la retraite, à imaginer des systèmes de retraite visant à corriger les inégalités accumulées tout au long de la vie.
Dans notre projet, un effort est demandé à tous les salariés, femmes et hommes, quel que soit leur cadre d'emploi, qu'ils relèvent du privé, du public ou d'un régime spécial.
Nous le savons, l'âge de départ effectif des femmes se rapprochera de celui des hommes, même si, je l'ai dit tout à l'heure, l'âge moyen de départ des femmes restera inférieur à celui des hommes. Nous avons voulu apporter des corrections et des protections. J'ai évoqué la question de la retraite minimum, comme vous l'avez fait vous-même, madame la sénatrice.
Je puis également rappeler que nous intégrerons dans les trimestres pris en compte ceux qui ont été cotisés au titre de l'assurance vieillesse du parent au foyer, ce qui concerne 1,9 million de femmes, notamment parmi les moins favorisées, tant pour l'éligibilité au minimum de pension que pour l'éligibilité au départ anticipé pour carrière longue.
Nous avons certainement encore du travail à faire, notamment autour de la question des aidants. Nous allons créer cette assurance vieillesse pour les aidants, qui sont souvent des femmes.
Nous avons également un travail à accomplir pour harmoniser les droits. Comment expliquer qu'une maternité donne automatiquement droit à quatre trimestres au titre du régime général et à deux trimestres au titre de la fonction publique ?
Avec Mme la Première ministre, j'ai d'ores et déjà demandé au Conseil d'orientation des retraites d'ouvrir un chantier sur ce sujet. J'espère que les débats parlementaires nous permettront d'avancer non seulement sur la question des droits familiaux, de la parentalité et de la maternité, mais aussi sur celle de la réversion.
Le texte, tel qu'il sera adopté, je l'espère, par l'Assemblée nationale, nous permettra certainement de construire des consensus. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour la réplique.
Mme Laure Darcos. J'entends ce que vous dites, monsieur le ministre.
Certes, vous souhaitez d'ores et déjà revaloriser les plus petites retraites. Toutefois, nous parlons également au nom de toutes les femmes qui travaillent depuis longtemps, qui ont de beaux métiers et qui ont connu de formidables moments durant leur congé maternité, dans tous les secteurs d'activité. Je pense notamment aux femmes qui travaillent dans le milieu de l'agriculture.
Je vous invite donc, avec Mme Isabelle Rome, à examiner les rapports d'information et projets de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, pour que nous puissions construire tous ensemble les derniers éléments de cette réforme des retraites. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
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