Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 12/01/2023
M. Jean Louis Masson attire l'attention de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur le fait que l'Arménie et l'Ukraine sont victimes d'une agression du même type. En effet, un conflit armé oppose l'Ukraine à la Russie et un autre conflit au moins aussi grave oppose l'Arménie à l'Azerbaïdjan, pays soutenu massivement par la Turquie. Or les pays occidentaux se désintéressent totalement de l'Arménie. Pour se donner bonne conscience, ils se bornent à exprimer une réprobation verbale et hypocrite sans rien faire de concret. Pire encore, ils encouragent même les exactions et les crimes de guerre dont sont responsables l'Azerbaïdjan et la Turquie car l'Union européenne et la France passent de nombreux contrats commerciaux avec ces deux pays ; en particulier, les achats de produits énergétiques ont plus que doublé. De plus, ces deux pays dont le comportement est dictatorial et criminel sont même intégrés dans le projet européen de coopération politique. C'est une véritable honte qui ne fait honneur ni à la France ni à l'Union européenne. Dans le même temps, la France s'associe à un véritable blocus économique contre la Russie et elle fournit à l'Ukraine des armes, ainsi que de nombreux soutiens matériels et financiers. Si, comme certains le prétendent, la Russie est une dictature, que dire alors de la Turquie et de l'Azerbaïdjan qui sont bien pires. La Turquie a déjà commis un premier génocide contre les Arméniens et son attitude actuelle prouve qu'un second génocide ne lui déplairait pas. Sur tous les fronts, la Turquie est un facteur de guerre, on le voit d'ailleurs très bien dans ses interventions contre les Kurdes. Là aussi, la complaisance de l'Occident à l'égard de la Turquie incite ce pays à continuer ses pratiques génocidaires à l'encontre des Kurdes. Il lui demande donc pour quelle raison la France devient progressivement cobelligérante du conflit en Ukraine alors que par son inaction, elle cautionne implicitement l'agression ignoble dont les Arméniens sont victimes de la part des Turcs et des Azerbaïdjanais. L'absence d'explications claires sur ce point ne pourrait qu'accréditer l'idée selon laquelle l'engagement massif des pays occidentaux dans la guerre en Ukraine est plus motivé par la volonté de déstabiliser la Russie que par celle de défendre l'Ukraine.
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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 09/03/2023
La France conduit une politique étrangère guidée par la volonté de défendre à la fois les intérêts de la nation, les valeurs et les principes fondamentaux garantissant la paix et la sécurité internationale, au premier rang desquels ceux de la Charte des Nations Unies. C'est à ce titre qu'elle est pleinement mobilisée pour soutenir l'Ukraine dans la défense légitime de sa souveraineté et l'aider à mettre en échec l'agression illégale, injustifiée et injustifiable conduite par la Russie. Contrairement à la propagande diffusée par Moscou, le soutien que la France, comme ses partenaires d'ailleurs, apporte à l'Ukraine ne répond à aucun des critères juridiques pouvant être qualificatif de co-belligérance. Son engagement est également total pour parvenir à une paix juste et durable dans le Caucase du sud. Lors de l'offensive azerbaïdjanaise des 13 et 14 septembre 2022, la France a immédiatement saisi le Conseil de Sécurité des Nations unies, dénoncé la violation de l'intégrité territoriale de l'Arménie et appelé au retour des forces azerbaïdjanaises à leurs positions initiales. Par ailleurs, et comme elle l'a fait depuis le déclenchement de la guerre du Haut-Karabagh en 2020, la France a affirmé clairement que les crimes de guerre devaient être jugés et leurs auteurs punis. La réunion organisée par le Président de la République à Prague le 6 octobre 2022, en marge du Sommet de la Communauté politique européenne en présence du premier ministre arménien, Nikol Pachinian, du président de l'Azerbaïdjan, Ilham Aliev, et du président du Conseil européen, Charles Michel, a permis d'obtenir un accord pour l'envoi temporaire d'une mission de la Politique de sécurité et de défense commune (PSDC) civile qui s'est déployée pour deux mois en territoire arménien. Elle a contribué à faire baisser la tension sur le terrain et le nombre d'incidents significatifs a diminué à cette frontière. Les résultats obtenus ont convaincu les Etats membres de pérenniser cette présence et l'UE a décidé, le 23 janvier, de l'envoi d'une mission d'observation de plein exercice pour deux ans. Cette mission est aujourd'hui déployée et compte cent personnels. Son chef d'Etat-major des opérations est français. La France a également dénoncé, publiquement et dans les enceintes pertinentes comme le Conseil de sécurité des Nations Unies, le blocage du corridor de Latchine en cours depuis le 12 décembre. Elle est mobilisée au quotidien et entretient des contacts au plus haut niveau avec les deux pays pour trouver une solution rapide et négociée à la situation actuelle. Elle a également mobilisé les ressources nécessaires pour répondre aux besoins humanitaires du Haut-Karabagh et se tient prête à renforcer encore ce soutien lorsque la circulation par le corridor permettra d'acheminer davantage de ressources. Comme Nikol Pachinian l'a lui-même souligné : aucun pays ne fait davantage que la France pour l'Arménie. Enfin, il paraît nécessaire de rappeler que si l'accord conclu par la Commission européenne avec l'Azerbaïdjan s'inscrit dans une volonté de diversifier les approvisionnements énergétiques de l'Europe, il ne bénéficie en aucun cas directement à la France, qui n'importe pas de gaz azerbaïdjanais.
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