Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 12/01/2023

M. Jean Louis Masson rappelle à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité les termes de sa question n°03406 posée le 27/10/2022 sous le titre : " Demande de consultation d'une facture ou du grand livre des comptes d'une collectivité territoriale ", qui n'a pas obtenu de réponse à ce jour. Il s'étonne tout particulièrement de ce retard important et il souhaiterait qu'elle lui indique les raisons d'une telle carence.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 26/01/2023

Le droit à l'information des élus est consacré à l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales (CGCT) qui dispose que « tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ». Il s'applique de manière identique aux conseillers départementaux (article L. L3121-18 du CGCT), aux conseillers régionaux (article L. 4132-17 du CGCT), aux conseillers communautaires (article L. 2121-13 par renvoi de l'article L. 5211-1 du CGCT) ainsi qu'aux conseillers municipaux d'une commune membre d'un établissement public de coopération intercommunale qui ne sont pas conseillers communautaires (article L. 5211-40-2 du CGCT). Afin de répondre à une demande d'information, il revient au maire, d'une part, d'apprécier si cette communication se rattache à une affaire de la commune et fait l'objet d'une délibération du conseil municipal et, d'autre part, de s'assurer qu'aucun motif d'intérêt général ne fait obstacle à la communication (CE ass., 27 mai 2005, Commune d'Yvetot, n° 265494). En cas de non-respect du droit à l'information des élus, ces derniers ont la possibilité d'exercer un recours en excès de pouvoir contre la délibération concernée dans les délais de droit commun (CE, 27 oct. 1989, de Peretti c/ Commune de Sarlat, n° 70549). A tout le moins, le maire ne peut placer les conseillers municipaux « dans une situation moins favorable que les habitants ou contribuables de la commune, [ni porter] atteinte aux droits et prérogatives particulières qu'à titre individuel ils tiennent de leur qualité de membre du conseil municipal » (CE, ass., 9 nov. 1973, Commune de Pointe-à-Pitre, n° 80724). Toutefois, lorsque la communication d'un document, et en particulier une facture, le grand livre budgétaire ou le journal chronologique de la mairie, ne se rattache pas à une affaire de la commune qui fait l'objet d'une délibération du conseil municipal, les élus peuvent formuler une demande auprès du maire sur le fondement du droit commun à l'accès aux documents administratifs. Le droit à l'accès aux documents administratifs est régi par le code des relations entre le public et l'administration (CRPA), dont l'article L. 311-2 aux termes duquel le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés. Il ne concerne pas des documents préparatoires. L'article L. 311-6 du même code précise que certains documents administratifs ne sont pas communicables, entre autres si leur communication porte atteinte à la protection de la vie privée, du secret médical ou du secret des affaires. Dans le respect de ces dispositions, l'article L. 2121-26 du CGCT a consacré le droit pour toute personne physique ou morale « (…) de demander communication des délibérations et des procès-verbaux du conseil municipal, des budgets et des comptes de la commune et des arrêtés municipaux ». La communication de ces documents peut être obtenue aussi bien du maire que des services déconcentrés de l'Etat. La commission d'accès aux documents administratifs (CADA), dans un avis n° 20170039 du 23 février 2017, a rappelé que ce droit comprenait un droit à communication « des pièces annexées à ces documents, y compris les pièces justificatives des comptes, [...]. Il résulte de la jurisprudence du Conseil d'État (10 mars 2010, commune de Sète, n° 303814) que les limites éventuelles à ce droit d'accès ne sont pas à rechercher dans les exceptions énumérées à l'article L. 311-6 du [CRPA]  ». De même, dans un autre avis n° 20122788 du 26 juillet 2012, la CADA a précisé que le grand livre budgétaire (ou grand livre des comptes) peut être communiqué « à tout moment, aucune disposition ne subordonnant sa communication au vote du compte administratif ou à l'obtention du quitus de la chambre régionale des comptes », et ce sous réserve de la protection de la vie privée, du secret médical et du secret des affaires. Le journal interne de la mairie (ou journal chronologique) « [qui est] un document ayant essentiellement pour but de retracer les actions des services municipaux dans le cadre de leurs missions de service public (…) est communicable à toute personne qui en fait la demande, […], sous réserve de l'occultation d'éventuelles mentions protégées par (…) la loi, en particulier les mentions intéressant la vie privée ou comportant un jugement de valeur sur de tierces personne ». Concernant la communication de factures, le ministre de l'intérieur a indiqué que « s'agissant du droit pour les conseillers appelés à approuver le compte administratif d'obtenir communication de factures, la cour administrative d'appel de Nancy, par décision du 30 septembre 2004 (n° 01NCO1105), a considéré qu'en l'espèce les documents demandés étaient de nature à leur permettre d'apprécier la portée du compte administratif ; par suite, le refus de communiquer les documents demandés constituait une irrégularité de nature à entraîner l'annulation de la délibération du conseil municipal approuvant le compte administratif » (réponse à la question écrite n° 20772, JO Sénat du 23 mars 2006, page 864). Par ailleurs, dans un avis du 7 juillet 2022, la CADA a rappelé que l'application du régime spécifique d'accès aux documents des communes prévu pour les conseillers municipaux à l'article L. 2121-26 du CGCT, non concerné par les restrictions posées par l'article L. 311-6 du CRPA, « ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d'autres fondements, tels que le secret de la vie privée ou le secret industriel et commercial (CE, 17 mars 2022, n° 449620) ». La commission en a alors déduit que « les factures afférentes à un marché public conclu par une commune, en tant que pièces justificatives des comptes, eu égard à l'intérêt qui s'attache à la communication des informations qu'elles contiennent pour satisfaire à l'objectif fixé par le législateur en matière d'information sur la gestion communale, sont communicables sur le fondement des dispositions précitées du CGCT, sous réserve toutefois de l'occultation des mentions couvertes par le secret industriel et commercial ».  

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