Question de M. GONTARD Guillaume (Isère - GEST) publiée le 16/02/2023
M. Guillaume Gontard interroge M. le ministre de la santé et de la prévention sur les pratiques douteuses du groupe AVEC et de son fondateur et président. Réunissant 400 établissements et employant 12 000 salariés, notamment dans la santé et le médico-social, ce groupe risque la faillite suite aux agissements de son patron.
Pendant des années, AVEC a connu une croissance effrénée. Selon un ancien cadre du groupe, le président « est comme un gamin qui jouerait au Monopoly ». Son but ? Bâtir un empire qui deviendrait « too big to fail ». Un empire étroitement contrôlé par ses proches et lui-même : le conseil d'administration est exclusivement composé de membres de sa famille et de salariés du groupe, donc subordonnés.
Pour faire grossir son groupe, il semble avoir l'habitude de vider la trésorerie des établissements qu'il contrôle. La clinique mutualiste de Grenoble, acquise en 2020, en a fait les frais : le groupe AVEC lui doit déjà 6,5 M€ et récupère chaque année 1 % du chiffre d'affaires, ce qui est illégal pour un établissement de santé privé d'intérêt collectif (ESPIC). Toutes les dépenses sont rognées : des lignes téléphoniques sont coupées, les astreintes des médecins ne sont pas payées, un bloc opératoire a été privé d'électrocardiogramme pendant 15 jours. La santé des patients est en danger.
Partout en France, les mêmes pratiques se répètent : fournisseurs et employés ne sont pas payés, taxes et loyers ne sont pas honorés. Ces retards de paiement mettent des centaines de personnes en difficulté. Ces dernières années, les procédures judiciaires s'accumulent pour impayés et non-respect des normes.
Le 12 janvier 2023, le président du groupe AVEC a été mis en examen pour prise illégale d'intérêts et détournement de fonds publics. Mais il peut toujours contrôler son groupe indirectement. Si la justice doit continuer son travail, l'État ne peut rester attentiste. En octobre 2022, la Première ministre assurait à un député qu'il n'y aurait « aucune complaisance, aucune facilité, aucune naïveté des pouvoirs publics vis-à-vis de ce groupe ». Il lui demande ce que compte faire le Gouvernement.
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Réponse du Ministère auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargé de l'organisation territoriale et des professions de santé publiée le 03/03/2023
Réponse apportée en séance publique le 02/03/2023
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, auteur de la question n° 435, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.
M. Guillaume Gontard. Ma question porte sur les pratiques douteuses du groupe Avec, dirigé par M. Bernard Bensaid. Réunissant 400 établissements et 12 000 salariés, notamment dans la santé et le médico-social, ce groupe risque la faillite à la suite des agissements de son patron.
Pendant des années, Avec a connu une croissance effrénée. Selon un ancien cadre du groupe, M. Bensaid « est comme un gamin qui joue au Monopoly », cherchant à bâtir un empire qui deviendrait too big to fail, un empire étroitement contrôlé par lui-même et ses proches : le conseil d'administration est exclusivement composé de membres de sa famille et de salariés sous son influence.
Pour faire grossir son groupe, M. Bensaid semble avoir l'habitude de vider la trésorerie des établissements qu'il contrôle. La clinique mutualiste de Grenoble, acquise en 2020, en a fait les frais : le groupe Avec lui doit déjà 6,5 millions d'euros et récupère chaque année 1 % du chiffre d'affaires, ce qui est illégal pour un établissement de santé privé d'intérêt collectif (Espic). Toutes les dépenses sont rognées : des lignes téléphoniques sont coupées, des astreintes de médecins ne sont pas payées, un bloc opératoire a été privé d'électrocardiogramme pendant quinze jours. La santé des patients est en danger.
Partout, en France, les mêmes pratiques se répètent : fournisseurs et employés ne sont pas payés, taxes et loyers ne sont pas honorés. Ces retards de paiement mettent des centaines de personnes en difficulté. Les procédures judiciaires pour impayés et non-respect des normes s'accumulent.
Le 12 janvier 2023, M. Bensaid a été mis en examen pour prise illégale d'intérêts et détournement de fonds publics. Mais il contrôle son groupe indirectement. En octobre dernier, la Première ministre assurait qu'il n'y aurait « aucune complaisance des pouvoirs publics vis-à-vis de ce groupe ». Si la justice doit continuer son travail, l'État ne peut rester attentiste. À Grenoble, les syndicats de la clinique demandent la nomination d'un administrateur provisoire.
Ma question est donc simple, madame la ministre : le Gouvernement compte-t-il accepter cette demande ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur, la situation financière et les pratiques de gestion du groupe Avec font actuellement l'objet d'un suivi rapproché de l'État, en particulier des services des ministères de la santé et des solidarités, afin d'avoir la vision la plus claire possible de son organisation juridique et de sa situation financière, notamment à la suite des retards de paiement de salaires dans certaines entités du groupe.
Une expertise indépendante a notamment été lancée sur ce point. Le groupe Avec contrôle en effet des établissements de santé, mais également de nombreux organismes privés, titulaires d'autorisation d'exploitation d'établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS), parmi lesquels des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), des résidences autonomie, des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) et des services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad).
S'il ne m'appartient pas de commenter l'enquête pénale en cours, nous pouvons vous assurer que, sur le plan administratif, des actions sont en cours, afin, d'une part, de garantir la continuité d'activité des établissements menacés, d'autre part, de s'assurer de la sécurité et de la qualité des prises en charge.
À titre d'exemple, 13 des 18 Ehpad du groupe Avec ont fait l'objet d'au moins un contrôle en 2022. D'autres contrôles complémentaires sont programmés dans les mois à venir, dans le cadre du plan national d'inspection et de contrôle des 7 500 Ehpad de France en deux ans, engagé à la suite du déclenchement de l'affaire Orpea.
Concernant les établissements sanitaires, les agences régionales de santé (ARS), bien informées des actions en cours, priorisent la continuité des soins dans les établissements concernés.
Par ailleurs, le Gouvernement a d'ores et déjà engagé d'importantes mesures structurelles visant à la moralisation du secteur privé lucratif. À cette fin, l'article 62 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2023 comporte un large panel de nouvelles mesures législatives en ce sens. Celles-ci prévoient des obligations de transparence et de contrôle renforcées pour les établissements et, parallèlement, un renforcement des capacités des autorités de contrôle qui font respecter ces obligations.
Dans la continuité de ces premières actions, d'autres mesures importantes sont actuellement en préparation, visant notamment à préciser les changements importants dans l'activité, l'organisation, la direction ou le fonctionnement des établissements médico-sociaux, et à renforcer les sanctions pénales mentionnées au code de l'action sociale et des familles, en cas de manquement aux obligations fixées par ce dernier.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.
M. Guillaume Gontard. J'entends que vous avez mis en place un suivi rapproché, madame la ministre, mais j'aurais aimé avoir une réponse à ma question : allez-vous déclencher une inspection de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et conclure à la nomination d'un administrateur provisoire ? Cela s'est fait ailleurs, dans d'autres établissements. Car il y a en l'espèce une réelle urgence !
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