Question de M. PLA Sebastien (Aude - SER) publiée le 02/02/2023
M. Sebastien Pla souhaite rappeler l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la question n°23372 du 17/06/2021 par laquelle il l'interpelle au sujet des très fortes menaces d'anthropie qui pèsent sur la mer Méditerranée, lesquelles s'accélèrent avec le changement climatique, en faisant peser des risques majeurs sur tout l'écosystème marin et côtier.
Seule mer au monde entourée de trois continents, la Méditerranée est bordée de régions très urbanisées qui concentrent plus de 500 millions d'habitants et qui accueillent 360 millions de touristes par an (soit 27 % du tourisme mondial).
« Hot spot » de biodiversité, l'espace méditerranéen est aussi une des régions au monde comprenant le plus grand nombre d'espèces endémiques, plus du tiers des 7 300 espèces inscrites sur la liste rouge de l'union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Et pourtant, l'institut de recherche pour la conservation des zones humides méditerranéennes vient de publier un rapport particulièrement alarmant faisant état d'un effondrement sur les 30 dernières années des populations de vertébrés du bassin méditerranéen : « baisse de 20 % entre 1993 et 2016,et même de 52 % dans les écosystèmes marins (pélagiques et côtiers) et de 28 % dans les écosystèmes d'eau douce (zones humides et rivières) ». Sur les 775 espèces étudiées, 300 sont en déclin, comme le thon rouge ou encore l'ange de mer, en danger critique d'extinction.
Cette mer est donc en grave danger du fait de ces facteurs cumulés, la surpêche n'est pas la seule menace pesant sur la faune méditerranéenne. L'urbanisation, les pollutions, l'agriculture intensive, les barrages, l'artificialisation des cours d'eau et le changement climatique ont des conséquences tout aussi désastreuses sur la biodiversité. Il souligne ainsi que le phoque moine de Méditerranée, l'espèce de phoque la plus rare au monde, a ainsi quasiment disparu en raison du bétonnage et du développement touristique des côtes.
Il lui rappelle que, déjà, un rapport établi au nom de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) relevait que « la Méditerranée est victime des pollutions passées, elle est atteinte par les pollutions présentes (polychlorobiphényles (PCB), pollutions chroniques avec les dégazages d'hydrocarbures, pollutions liées à la présence des résidus de plastiques ou des métaux lourds dans les rejets fluviaux (plomb, mercure, cadmium
), pollutions par les nitrates et les phosphates dues à l'insuffisance d'épuration des eaux usées, pollutions émergentes pharmaceutiques et cosmétiques qui ont des effets reprotoxiques) et sera soumise à l'horizon d'une génération à une pression de pollution d'origine anthropique de plus en plus forte dont les conséquences seront démultipliées par les effets attendus du changement climatique. » (rapport d'information Sénat n° 652 (2010-2011) « La pollution de la Méditerranée : état et perspectives à l'horizon 2030 » OPECST).
Ainsi, pointe-t-il avec force, cette poussée démographique le long des littoraux, couplée avec des structures d'assainissement insuffisantes et avec la multiplication de pollutions sur l'ensemble du bassin va conduire à l'atteinte d'un « point de non-retour à l'horizon 2030 » et ce, alors même que la population bordant la Méditerranée devrait encore augmenter de 182 millions d'ici 2050.
Il lui demande donc s'il compte, à la lumière de cette étude conduite par l'institut de recherche pour la conservation des zones humides méditerranéennes, mobiliser en urgence ses homologues européens et encourager, dans le cadre des programmes de coopération entre Nord et Sud, à la création d'une « agence de protection de l'environnement et de promotion du développement durable en Méditerranée » ainsi que le préconise le rapport de l'OPECST, établi voilà plusieurs années.
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Réponse du Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires publiée le 24/08/2023
La Convention pour la protection du milieu marin et du littoral de la Méditerranée (Convention de Barcelone), et ses sept protocoles adoptés dans le cadre du Plan d'action pour la Méditerranée, est le principal instrument juridique régional de protection contre les différentes sources de pollution et de préservation de la diversité biologique de la Méditerranée. Six centres d'activités régionales (CAR) contribuent à appliquer les dispositions de la Convention et des différents protocoles : le Programme coordonné de surveillance continue et de recherche en matière de pollution dans la Méditerranée (MED POL) basé à l'Unité de coordination à Athènes (Grèce), le Centre régional méditerranéen pour l'intervention d'urgence contre la pollution marine accidentelle (REMPEC), basé à La Valette (Malte), le Centre d'activités régionales Plan Bleu (CAR/PB) basé à Marseille (France), qui produit des études prospectives pour sensibiliser les acteurs et décideurs méditerranéens sur les questions d'environnement et de développement durable de la région, le Centre d'activités régionales du Programme d'actions prioritaires (CAR/PAP), basé à Split (Croatie), qui accompagne les pays méditerranéens pour mettre en oeuvre des politiques de développement durable sur leur littoral, le Centre d'activités régionales pour les Aires spécialement protégées (CAR/ASP), basé à Tunis, qui appuie les pays de la région pour identifier créer et gérer des ASP et préparer des plans de gestion (Tunisie), et le Centre d'activités régionales pour la consommation et la production durables (MedWaves), basé à Barcelone (Espagne) qui accompagne les pays riverains de la Méditerranée à mettre en oeuvre des politiques d'économie circulaire. Cette architecture institutionnelle permet d'offrir un appui aux pays de la région pour prévenir et répondre aux épisodes de pollutions telluriques et marines mais également pour mettre en oeuvre des politiques publiques plus protectrices de l'environnement. Par ailleurs, la Stratégie à moyen terme (SMT) 2022-2027 du Plan d'Action de la Méditerranée (PAM) prévoit plusieurs dispositions contribuant à la mise en oeuvre de l'Accord de Paris, de la Décennie d'action des Nations Unies pour les Objectifs de développement durable, de la Décennie des Nations Unies pour la Restauration des écosystèmes et la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable et du Cadre mondial de la biodiversité post-2020 (objectifs de Kunming Montréal en cours d'intégration) et des négociations qui s'ouvrent sur la pollution plastique. La France est la première contributrice au budget du PAM (3,8 M pour l'exercice 2022-2023, soit le tiers de son budget global). Cette stratégie à moyen terme est complétée par une stratégie méditerranéenne spécialement consacrée au développement durable : la SMDD. La Stratégie méditerranéenne pour le développement durable 2016-2025 fournit un cadre politique intégratif pour toutes les parties prenantes (États, collectivités, secteur privé, partenaires du PAM) afin d'adapter les engagements internationaux aux conditions régionales, guider les stratégies nationales et stimuler la coopération régionale pour la réalisation des objectifs de développement durable. Deux importantes initiatives phares de la SMDD sont directement gérées par le PNUE/PAM - Secrétariat de la Convention de Barcelone, à savoir le « Prix de la ville respectueuse de l'environnement » et le « prix d'entreprise méditerranéen pour l'innovation environnementale ». Les autres initiatives phares de la SMDD menées par des partenaires du PAM sont : le Fonds d'affectation spéciale pour les aires marines protégées (AMP) de la Méditerranée ; le réseau des gestionnaires d'aires marines protégées en Méditerranée « MedPAN » ; la « liste verte » de l'UICN des aires protégées et conservées ; la plateforme d'échange d'outils de connaissance sur l'urbanisme durable « Med Urban Tools » et le réseau d'experts du changement climatique et environnemental en région méditerranéenne « MedECC ». La Commission méditerranéenne du développement durable (CMDD), chargée du pilotage de la SMDD, doit en élaborer la nouvelle version. La France a accueilli la dernière reunion de la CMDD en juin 2023 à Marseille. En outre, la France s'est engagée dans diverses initiatives visant à renforcer la protection de l'environnement de la région méditerranéenne avec la décision de mise en place, aux côtés de l'Union Européenne, d'une zone de contrôle des émissions de soufre (SECA, Sulphur Emission Control Area) en Méditerranée. Approuvée lors de la COP de la Convention de Barcelone qui s'est tenue à Antalya en décembre 2021, cette zone SECA a été adoptée lors de la 79ème session du Comité de la protection du milieu marin (MEP 79) de l'OMI en décembre dernier. Elle s'étendra sur toute la Méditerranée dès le 1er mai 2025 et entraînera l'obligation, pour tous les navires qui entreront dans cette mer, d'utiliser un combustible dont la teneur en soufre ne dépasse pas les 0,1% en masse, soit cinq fois moins que sur les autres mers du globe. En plus d'un impact écologique positif non négligeable, cette nouvelle zone SECA aura également des répercussions positives sur la qualité de l'air et la santé des populations riveraines de la Méditerranée. La France se mobilise également pour lancer des travaux sur une zone NEPA lors de la COP23 en Slovénie en décembre prochain, qui viserait à encadrer les rejets d'oxydes d'azote. La France a également lancé, lors du Congrès de l'Union internationale de protection de la nature qui s'est tenu à Marseille en septembre 2021, le Plan d'action pour une Méditerranée exemplaire d'ici 2030 (PAMEx). Le PAMEx qui rassemble 12 pays se structure autour de 20 actions concrètes, dans 4 domaines : protection de la biodiversité, gestion d'une pêche durable, réduction des pollutions, améliorer les transports. La Facilité Financière d'Investissement Local (PLIFF), mécanisme financier de mise en oeuvre du PAMEx hébergé à Marseille, a pour objectif de lever 1 milliard de financements sur les deux prochaines années, dont 30% d'origine publique. Le dispositif institutionnel prévu par la convention de Barcelone et ses protocoles permet de sensibiliser les Etats parties à la Convention aux effets du réchauffement climatique dans la région, promeut la mise en oeuvre de politiques de développement durable et définit des actions pour réduire et limiter les phénomènes de pollution (air, marine, terrestre). L'action développée par le PAM, renforcée récemment par la mise en place du PAMEx, apporte des réponses concrètes aux divers points soulevés par le rapport de l'OPECST. Elle doit évidemment être renforcée, ce qui est le souhait également des institutions onusiennes. Dans ce contexte, la création d'une nouvelle agence régionale s'avère particulièrement complexe dans le cadre institutionnel existant et serait de nature à engendrer le risque de dupliquer des missions déjà existantes.
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