Question de M. SOMON Laurent (Somme - Les Républicains) publiée le 02/02/2023
M. Laurent Somon attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire au sujet des conditions de contrôle des normes des services de l'État. Dans un secteur en crise et sous tension en main d'oeuvre, affrontant les aléas climatiques, les crises sanitaires et la volatilité des prix des cours agricoles, l'accompagnement des services de l'État dans l'application des règlementations changeantes est indispensable. La multiplication des normes et les protocoles administratifs applicables aux exploitations tant pour la gestion des terres que des personnels en cette période de transition écologique est source d'une gestion administrative qui dépassent la capacité matérielle de certaines exploitations. Le taux de suicide chez les agriculteurs est plus élevé que dans le reste de la population française. Le 23 novembre 2021, le Gouvernement instaure un plan d'accompagnement des agriculteurs en difficulté qui doit permettre une mobilisation collective. Il lui demande de bien vouloir lui préciser les mesures que les services de contrôle de l'État mettent en oeuvre pour accompagner le monde agricole dans cette période de sur-normalisation des activités avec des procédures de contrôles adaptées aux difficultés d'une population sous tension.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 15/06/2023
Une politique publique de lutte contre les suicides en agriculture a été définie et ce pour la première fois au niveau interministériel, avec la feuille de route du 23 novembre 2021 sur la « Prévention du mal-être en agriculture ». Celle-ci faisait suite au rapport, en décembre 2020, du député Olivier Damaisin, « Identification et accompagnement des agriculteurs en difficulté et prévention du suicide », missionné par le Premier ministre le 21 février 2020, et reprend pour une large part les recommandations formulées par la commission des affaires économiques du sénat, dans le rapport du 17 mars 2021 des sénateurs Henri Cabanel et Françoise Férat, « Suicides en agriculture : mieux prévenir, identifier et accompagner les situations de détresse ». Les multiples situations de crise que connaît l'agriculture, du fait des événements sanitaires (grippe aviaire), climatiques (sécheresse) ou géopolitiques (guerre en Ukraine), comme l'ampleur des mutations et des tensions auxquelles est confrontée l'agriculture française, ont conduit le ministre chargé de l'agriculture, sous l'égide de la Première ministre, à inscrire les développements de cette feuille de route dans le cadre de la préparation du pacte d'orientation et d'avenir pour l'agriculture annoncé par le Président de la République le 9 septembre 2022 à Terres de Jim, dont la concertation est actuellement en cours. La mise en oeuvre de cette feuille de route a été engagée dès le 3 février 2022, avec la nomination d'un coordinateur national, Daniel Lenoir, inspecteur général des affaires sociales, et la publication d'une circulaire des ministres chargés de l'agriculture, de la santé, des solidarités et du travail, installant une nouvelle gouvernance tant au niveau national que départemental. Au niveau national, un comité de pilotage réunissant l'ensemble des parties prenantes s'est réuni quatre fois en 2022. Un comité de suivi et de coordination interministériel permet par ailleurs de coordonner l'intervention des administrations, des agences et des services publics, notamment les services publics professionnels que sont les chambres d'agriculture et la mutualité sociale agricole (MSA). Au niveau départemental, les préfets ont été chargés de mettre en place des comités chargés de déployer de façon coordonnée la prévention de mal-être et la prise en charge des agriculteurs comme des salariés de l'agriculture, ainsi que de leurs proches. À la fin de l'année 2022, et conformément à l'engagement du Gouvernement, le dispositif couvrait la totalité des départements, en métropole comme dans les outre-mer. L'une des priorités mises en oeuvre en 2022 a été la structuration sur l'ensemble du territoire national d'un réseau des sentinelles en agriculture, en lien avec la stratégie nationale de prévention des suicides portée par le ministère chargé de la santé. Ces réseaux de sentinelles sont constitués de personnes volontaires et formées pour détecter les personnes en mal-être en vue de les conseiller et de les orienter vers des services de prise en charge. Sur la base d'une « Charte des sentinelles en agriculture » adoptée par les instances nationales de pilotage, les comités départementaux sont chargés de structurer et de développer ce réseau, qui existait déjà en fonction d'initiatives locales. L'un des objectifs de l'année 2023 est de développer et finaliser la mise en place de ce réseau de prévention et de détection du mal-être. D'autres dispositifs de la feuille de route ont été engagés comme par exemple : - la promotion du numéro « agri-écoute » porté par la MSA et son articulation avec le numéro national de prévention du suicide (3114) ; - l'amélioration des modalités de prise en charge des accompagnements psychologiques ; - l'élargissement de l'accès à l'aide à la relance des exploitations agricoles (AREA), mis en place par voie de décret le 5 août 2022 ; - l'assouplissement des possibilités d'étalement des cotisations agricoles. Ces actions très concrètes s'inscrivent dans le cadre d'un plan d'actions décliné en sept chantiers prioritaires qui visent à agir sur les causes multifactorielles du mal-être en agriculture. Au vu du bilan de cette première année de mise en oeuvre de ce plan présenté au comité national de pilotage du 29 mars 2023, le ministre chargé de l'agriculture a tenu à réaffirmer l'engagement de l'ensemble du Gouvernement dans cette cause nationale que constitue la lutte contre le risque suicidaire en agriculture et a confirmé la poursuite de ces travaux qui seront désormais menés par Olivier Damaisin, nommé nouveau coordinateur national interministériel à compter d'avril 2023. La mission de ce nouveau coordinateur est de poursuivre, dans une démarche à la fois interministérielle et décloisonnée, les actions initiées au cours de la première année de mise en oeuvre de cette feuille de route. Il est notamment chargé de veiller à l'effectivité et au caractère opérationnel de la gouvernance mise en place auprès de chaque préfet de département pour établir, à partir d'un diagnostic territorial, une feuille de route locale, en appuyant son action sur les services centraux et territoriaux concernés et en lien étroit avec l'ensemble des acteurs institutionnels et associatifs engagés dans cette démarche porteuse d'enjeux et qui répond aux attentes profondes des milieux agricoles. En fonction de l'avancement des travaux engagés et des constats qu'il aura pu faire sur le terrain auprès des comités départementaux au cours de ses premiers mois de mandat, le nouveau coordinateur pourra proposer aux ministres des évolutions de la feuille de route et, le cas échéant, des orientations nouvelles permettant s'étendre et d'approfondir la prévention du mal-être en agriculture.
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