Question de Mme JASMIN Victoire (Guadeloupe - SER) publiée le 09/02/2023
Mme Victoire Jasmin attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les montages juridiques de certains centres de santé dentaire. Une enquête réalisée par des journalistes pour l'émission Cash investigation diffusée le 8 décembre 2022 révèle que des chirurgiens-dentistes qu'ils emploient sont très fortement incités à faire croître le chiffre d'affaires de ces structures, y compris par des moyens illicites tels que la facturation de soins non réalisés ou des soins inutiles, allant jusqu'à provoquer des mutilations sur les patients. L'enquête révèle ensuite que les fondateurs de certaines grandes enseignes de centres de santé dentaires, et tout particulièrement « Dentego », ont imaginé des mécanismes très efficaces pour faire remonter les fonds de ces centres vers des sociétés commerciales, dont ils seraient parallèlement propriétaires, situées à l'étranger. Ces mécanismes leurs permettent de contourner les dispositions du code de la santé publique qui imposent que les centres de santé soient (pour la plupart d'entre eux) gérés par des organismes à but non lucratif. Il apparait que cette maximisation du chiffre d'affaires et des profits, y compris par des moyens frauduleux, poursuit un seul et unique but d'enrichissement personnel. Compte tenu de la moralité douteuse de certains de ces acteurs, nous pouvons nous interroger sur le fait de savoir si ces sociétés ne contournent pas tout autant les règles fiscales et sociales de notre pays. Ces pratiques sont inquiétantes en ce qu'elles donnent l'impression d'être incontrôlées et incontrôlables. Pour preuve, l'inconfort manifeste du directeur général de l'assurance maladie lorsqu'il est interrogé par les journalistes de l'émission et l'annonce, quelques jours avant la diffusion de l'émission, du contrôle de seulement 10 centres de santé dentaire, sur près de 1 000. Aussi, elle souhaite savoir si les autorités concernées étaient informées de ces faits. Elle souhaite savoir si des investigations ont été engagées par l'administration fiscale sur les centres de santé dentaires « Dentego » et souhaite connaître, outre la proposition de loi visant à améliorer l'encadrement des centres de santé en cours d'examen, les mesures envisagées par le Gouvernement pour juguler cette financiarisation, et les abus qu'elle implique, préjudiciable aux patients et à la collectivité.
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Transmise au Ministère de la santé et de la prévention
Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 06/04/2023
Le développement des centres de santé participe à l'objectif d'amélioration de l'accès aux soins de premier recours pour tous et partout sur le territoire et figure à ce titre parmi les politiques prioritaires du Gouvernement. Pour autant, le ministère de la santé et de la prévention mène, avec ses partenaires, une politique ferme de lutte contre les pratiques déviantes de certains centres afin de garantir la qualité et la sécurité des soins dans ces structures et le respect des règles spécifiques relatives à leur statut. Ainsi, dès 2018, plusieurs recommandations de la mission de contrôle de l'Inspection générale des affaires sociales diligentée pour donner suite aux dérives observées lors de l'affaire « Dentexia » ont donné lieu à des modifications législatives dans le cadre de l'ordonnance du 12 janvier 2018 relative aux conditions de création et de fonctionnement des centres de santé. Ses dispositions prévoient notamment que les manquements relatifs à la conformité des centres puissent faire l'objet de mesures de la part des agences régionales de santé (ARS) au même titre que ceux liés à la qualité et la sécurité des soins. De plus, la fermeture des centres figure désormais parmi les mesures correctrices pouvant être adoptées, qui se limitaient jusqu'alors à leur suspension. La transmission d'un engagement de conformité préalable à l'ouverture du centre est également prévue. Le ministère de la santé et de la prévention a par la suite adopté un plan d'action global pour lutter contre les divers manquements observés, notamment ceux liés à la qualité et la sécurité des soins. Dans ce cadre, le nombre et la coordination des contrôles et inspections des centres dentaires ont été renforcés. De plus, une campagne de communication à destination des patients sur les pratiques à adopter pour une bonne prise en charge bucco-dentaire a été largement diffusée. Ces actions ont été complétées par l'adoption de diverses mesures dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 permettant notamment le déconventionnement des centres par l'Assurance maladie et l'adoption par le directeur général de l'ARS de sanctions administratives financières en cas de manquement. La mise en uvre de ce plan d'action s'est notamment traduite par la réalisation d'inspections du réseau de centres dentaires Dentego menées conjointement par les ARS et les services de l'Assurance maladie et de l'inspection du travail avec le concours des services nationaux de lutte contre la fraude. Les résultats de cette action font actuellement l'objet d'une analyse juridique et fiscale. En complément de ces actions, le ministère de la santé et de la prévention est favorable à l'amélioration de l'encadrement des centres de santé telle que prévue par la proposition de loi déposée par la présidente de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, adoptée en première lecture à l'unanimité par le Sénat. Ce texte, qui vise à lutter contre les dérives lucratives de certains centres, pourrait notamment soumettre les centres de santé dentaires et ophtalmologiques à l'agrément du directeur général de l'ARS pour dispenser des soins. La proposition de loi prévoit également l'interdiction d'exercer une fonction dirigeante au sein de l'une de ces structures pour toute personne ayant un intérêt, direct ou indirect, avec des entreprises privées délivrant des prestations rémunérées à son gestionnaire. La certification des comptes du gestionnaire par un commissaire aux comptes et leur transmission au directeur général de l'ARS et aux organismes de sécurité sociale est également prévue.
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