Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 09/02/2023
M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, sur les profits des concessionnaires autoroutiers.
La presse s'est faite l'écho des conclusions d'un rapport de l'Inspection générale des finances sur « le modèle économique des sociétés concessionnaires autoroutiers », que le Gouvernement n'a pas jugé utile de publier.
Ce rapport confirmerait le caractère particulièrement profitable des concessions autoroutières, soulignant, toujours selon la presse, « une rentabilité très supérieure à l'attendu », allant « contre le principe de rémunération raisonnable ». La rentabilité des concessions ASF-Escota et APRR-Area près du deux tiers du réseau concédé atteindrait 12 %, soit un taux bien supérieur à celui estimé lors de la privatisation en 2006.
En conséquence, le rapport préconiserait « un réalignement de la rentabilité » sur le niveau initialement défini « dans l'hypothèse où l'État souhaiterait initier un contentieux sur la surrentabilité des concessions », et esquisserait trois scenarios, la fin anticipée des concessions en 2026, « une baisse des tarifs des péages en 2022 », de près de 60 %, ou le prélèvement par l'État de plus de 63 % de l'excédent brut d'exploitation de ces deux concessionnaires (ce qui équivaudrait à 55,4 Mds€).
La menace d'une résiliation qui semble être la voie privilégiée par les auteurs du rapport pourrait inciter ces sociétés « à accepter une réduction par avenant des tarifs, qui représenterait pour elles un moindre mal. »
Alors que le terme des concessions approche, l'inspection générale des finances indique que « le pouvoir de négociation de l'État concédant vis-à-vis des sociétés concessionnaires d'autoroutes doit être renforcé » et que cette fin « demande à être préparée, en particulier en qui concerne la remise en état des réseaux ».
Il conviendrait que le Parlement soit associé à ces travaux.
Ce rapport confirme, malheureusement, les nombreuses alertes, notamment de l'auteur de la question, sur le caractère particulièrement défavorable pour les usagers et pour l'État des contrats passés entre ce dernier et les concessionnaires autoroutiers. L'absence de publication de ce rapport par le Gouvernement est regrettable et éloquente.
Aussi, il souhaiterait connaître les suites qu'il compte donner aux recommandations de ce rapport.
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Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports publiée le 25/05/2023
Le rapport conjoint de l'inspection générale des finances (IGF) et du Conseil général de l'Environnement et du Développement durable (CGEDD) a été commandé par l'Etat en juillet 2020 dans le cadre du contentieux naissant concernant l'indexation de la taxe d'aménagement du territoire (TAT), instituée par la loi de finances pour 2020. L'objectif premier de ce rapport consistait à préparer des éléments d'argumentation à destination du Gouvernement et de l'Administration, lui permettant de se défendre dans le cadre de ce contentieux. Les principaux éléments d'analyse visaient ainsi à documenter l'impact sur l'équilibre économique des concessions autoroutières de la mesure fiscale mise en oeuvre. Pour ces raisons, le rapport n'avait initialement pas vocation à être rendu public. Pour autant, le Gouvernement a non-seulement transmis ce rapport aux rapporteurs généraux des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat mais aussi demandé à le mettre en ligne sur internet en toute transparence. Conformément à l'objectif recherché, le rapport établit des calculs de rentabilité des sociétés concessionnaires le conduisant à estimer l'impact de la mesure, facilitant la défense de l'Administration dans le cadre du contentieux. Le jugement de première instance, intervenu le 22 janvier 2023, a d'ailleurs conclu au rejet des requêtes de l'ensemble des sociétés. Le Gouvernement a pris toute la mesure des recommandations issues de ce rapport. Au plan économique, l'Autorité de régulation des transports (ART), dont l'une des missions est de suivre la rentabilité du secteur, a émis dans ses deux rapports sur l'économie générale des concessions de 2020 et 2023, des avis nuancés sur le sujet. Ainsi, afin d'éclairer le plus complètement possible la question de la rentabilité des concessions et des suites que le concédant pourrait y donner, le Conseil d'Etat a été saisi récemment par le Gouvernement. Une fois les conclusions du Conseil d'Etat sur la rentabilité des sociétés concessionnaires connues, le concédant en tirera toutes les conséquences. Par ailleurs, concernant la préparation de la fin des concessions autoroutières historiques, l'Etat travaille d'ores et déjà à définir précisément la notion de bon état en fin de concession et les obligations des sociétés dans ce cadre. Ce travail s'est traduit par des dispositions spécifiques lors des derniers avenants signés le 30 janvier dernier avec les sociétés APRR-AREA et SANEF-SAPN et a vocation à être intégré dans l'ensemble des contrats historiques à l'occasion des prochains avenants. Enfin, ces travaux de court terme sur les contrats existants ne doivent pas obérer une vision stratégique à l'horizon de l'échéance des concessions autoroutières historiques. Comme l'a annoncé le ministre délégué chargé des transports, lors de son audition commune avec le ministre de l'Economie le 22 mars dernier à l'Assemblée nationale, seront prochainement lancées des « assises » relatives aux réseau actuellement concédé auxquelles ont vocation à prendre part notamment des parlementaires, des économistes, l'ART et des organisations non gouvernementales. Ce sera l'occasion d'interroger le devenir de ce réseau, prenant en compte les enjeux de la décarbonation de la route, de résilience au changement climatique, d'aménagement du territoire et les besoins des usagers.
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