Question de M. PACCAUD Olivier (Oise - Les Républicains-R) publiée le 16/02/2023

M. Olivier Paccaud attire l'attention de M. le ministre des armées sur les faibles capacités d'abris souterrains destinés à protéger la population en cas de conflit armé nucléaire.

L'invasion de l'Ukraine par son voisin russe il y a tout juste un an a rappelé à tout un chacun que l'Europe n'était pas à l'abri d'une nouvelle guerre sur son sol. Les intimidations velléitaires, les sous-entendus menaçants et persistants provenant du Kremlin prouvent qu'elle pourrait un jour éclater sous sa forme la plus ravageuse, à savoir celle d'une guerre atomique. Considérer ce risque et prendre des mesures pour s'en prémunir n'a donc rien d'incongru.

Or, en 2017, la France comptait à peine un millier d'abris sur son sol, pour la plupart bâtis dans les années 1980. 600 de ces structures étaient de nature militaire et environ 400 autres étaient des abris civils privés. Rapportés à la population, ces chiffres confèrent à notre pays un taux de protection contre le risque nucléaire d'une insigne faiblesse puisqu'il est à peine supérieur à 0 % ! Ce constat est d'autant plus alarmant que nos voisins se sont montrés bien plus préventifs : en Allemagne et en Norvège près de 40 % de la population dispose d'un abri où se réfugier en cas de danger, ce taux grimpe à 70 % en Finlande et atteint même 104 % en Suisse où la construction d'abris est une obligation légale.

Ainsi, notre pays est cruellement sous-équipé en la matière alors même que ces structures présentent un intérêt de protection civile majeur et s'avèrent essentielles pour protéger la population, non seulement contre d'hypothétiques conflits armés mais également en cas de catastrophes naturelles ou industrielles.

Aussi il lui demande si, d'une part, le Gouvernement est en mesure de quantifier le nombre d'abris opérationnels en France et de donner des indications précises quant à leur répartition sur le territoire et d'autre part, si afin d'anticiper la réapparition du risque d'attaques nucléaires, il est envisagé d'accroitre le nombre d'abris militaires et de favoriser la construction d'abris privés.

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Transmise au Première ministre


Réponse du Première ministre publiée le 25/05/2023

Depuis 1964, la dissuasion nucléaire protège en permanence la France de toute menace d'agression d'origine étatique contre ses intérêts vitaux, quelle qu'en soit la forme. Cette force de frappe, capable d'être engagée à tout instant par le Président de la République, fait peser sur tout État qui voudrait s'en prendre à notre pays, et notamment à notre territoire et à sa population, une menace de représailles dont les conséquences seraient absolument inacceptables pour cet agresseur. Ainsi, nos forces nucléaires, par leur crédibilité opérationnelle et technique et par la permanence de leur disponibilité et de leur posture, dissuadent tout pays doté de l'arme atomique d'envisager une attaque avec ce type d'armes contre notre pays. Plus largement, elles nous protègent d'attaques qui viseraient nos intérêts vitaux au moyen d'armes conventionnelles ou par des armes de destruction massive, chimiques ou bactériologiques. Fondamentalement donc, la dissuasion nucléaire vise à empêcher la guerre. Ce concept et l'investissement constant consenti par la France depuis plus de soixante ans dans ses forces nucléaires pour le rendre parfaitement crédible, nous distinguent de nos partenaires européens dont certains, comme le mentionne la question, ont fondé une partie de leur défense sur la construction d'abris antiatomiques. Les mesures à prendre en cas d'accident industriel d'exploitation nucléaire, sans commune mesure avec les effets d'une arme atomique, sont décrites dans le Plan national de réponse à accident nucléaire ou radiologique majeur. Ce document fixe, d'une part, le cadre général du plan, l'organisation générale de la conduite de crise de l'État et la stratégie de réponse ; d'autre part, il constitue un guide d'aide à la décision en fonction de huit types de situation : une situation d'incertitude, un accident d'installation conduisant à un rejet immédiat et court, un accident d'installation conduisant à un rejet immédiat et long, un accident d'installation pouvant conduire à un rejet différé et long, un accident de transport de matières radioactives avec rejet potentiel, un accident à l'étranger pouvant avoir un impact significatif en France, un accident à l'étranger ayant un impact peu significatif en France et un accident en mer. Ce plan comprend une stratégie spécifiquement consacrée à la protection de la population. Cette stratégie de protection de la population en cas de menace ou de rejet radioactif vise à limiter son exposition à un niveau aussi faible que raisonnablement possible. En phase d'urgence, cette stratégie repose sur trois mesures principales dont le choix de la mise en oeuvre, l'aire géographique d'application et le séquençage dépendent de la situation : l'évacuation, qui vise à soustraire dans les meilleurs délais la population aux risques liés à des rejets importants et longs, si possible avant que le rejet ne débute ou tant qu'il est de faible intensité ; la mise à l'abri, qui a vocation à être mise en oeuvre dans tous les cas où le rejet intervient rapidement et est de courte durée, ainsi qu'en séquences ponctuelles liées à des évolutions du rejet et de la situation météorologique ; et la prise d'iode stable, qui complète ces mesures en cas de rejet d'iodes radioactifs. Dans un deuxième temps, l'exposition de la population aux dépôts au sol résultant d'un rejet est limitée en procédant à l'éloignement de celle-ci des zones les plus contaminées et en interdisant le plus tôt possible la consommation et la commercialisation des denrées produites dans les territoires contaminés. Cette stratégie de protection des populations repose aussi sur la capacité à alerter les populations et toute personne se trouvant dans les périmètres affectés, à les informer efficacement des consignes de sécurité et à assurer une communication continue, ainsi que sur la maîtrise de l'ordre public, la mise en oeuvre de contrôles de zone et des flux par les forces de l'ordre et la prise en charge sanitaire.

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