Question de Mme MONIER Marie-Pierre (Drôme - SER) publiée le 02/03/2023
Mme Marie-Pierre Monier appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les conséquences de la réforme de l'assurance récolte pour les agriculteurs sinistrés à plusieurs reprises au cours des dernières années.
Tel est le cas, en particulier, des producteurs d'abricots des Baronnies qui ont, de 2017 à 2022, été chaque année victimes de gels ayant engendré des pertes importantes sur les récoltes, alors même qu'ils n'avaient connus aucun gel au cours des dix années précédentes.
La conséquence directe pour les agriculteurs pluri-sinistrés est que le niveau potentiel d'indemnisation basé sur la référence historique du rendement de leur culture, calculée en moyenne olympique sur les cinq dernières années, est très faible.
Pour eux, la conséquence de la réforme de l'assurance récolte est qu'ils se retrouvent sans aucune protection possible pour 2023, puisqu'ils n'ont aucun intérêt à souscrire un contrat d'assurance récolte et ne seront que très faiblement couverts par le fonds de solidarité national prévu pour les agriculteurs non assurés.
En outre, il leur est impossible d'ajuster le capital garanti en choisissant des prix réels qui, dans les Baronnies par exemple, seraient supérieurs aux prix plafonnés, car cela les priverait du bénéfice de la subvention « politique agricole commune » (PAC) aux primes et cotisations d'assurance.
Les agriculteurs pluri-sinistrés au cours des cinq dernières années estiment qu'ils devraient pouvoir déclarer un rendement historique basé sur des barèmes départementaux, tels que ceux des calamités agricoles, afin d'avoir une base d'indemnisation plus réaliste.
Aussi, elle lui demande dans quelle mesure il lui est possible de faire évoluer la réglementation en matière d'assurance récolte afin de tenir compte du cas des agriculteurs pluri-sinistrés au cours des dernières années.
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Réponse du Ministère auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargé de l'enseignement et de la formation professionnels publiée le 05/04/2023
Réponse apportée en séance publique le 04/04/2023
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, auteure de la question n° 482, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Mme Marie-Pierre Monier. La réforme de l'assurance récolte a pris effet au 1er janvier de cette année. Du fait de la répétition des événements calamiteux en raison du changement climatique, certains agriculteurs ont été sinistrés à plusieurs reprises au cours des dernières années.
Tel est le cas des producteurs d'abricots des Baronnies qui, de 2017 à 2022, ont été chaque année victimes de gels ayant engendré des pertes importantes sur les récoltes, alors même qu'ils n'avaient connu aucun épisode similaire au cours des dix années précédentes.
Pour ces agriculteurs pluri-sinistrés, la conséquence directe est que la référence historique de production, qui sert de base à tout calcul d'indemnisation, est très faible sur les cinq dernières années, quel que soit le mode de calcul retenu moyenne triennale ou moyenne olympique.
Ils se retrouvent donc sans protection possible pour 2023, puisqu'ils ne seraient que très faiblement couverts, que ce soit par un contrat d'assurance récolte ou par le fonds de solidarité nationale prévu pour les agriculteurs non assurés. En outre, il ne leur est plus possible d'augmenter leur capital garanti en évaluant leur production à un niveau de prix supérieur de plus de 20 % au prix de référence du barème national, car cela les priverait du bénéfice de la subvention politique agricole commune (PAC) sur les cotisations d'assurance.
Cette situation inquiète non seulement les producteurs, mais aussi les organisations professionnelles et les services administratifs départementaux qui craignent, en cas de nouveaux aléas climatiques importants, de ne pouvoir déterminer les taux de perte de récolte demandés pour que les non-assurés puissent être indemnisés.
Madame la ministre, ma question est simple : est-il possible de faire évoluer la réglementation en matière d'assurance récolte afin de prendre en compte les nombreux cas d'agriculteurs pluri-sinistrés au cours des dernières années ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l'enseignement et de la formation professionnels. Madame la sénatrice Marie-Pierre Monier, en ce qui concerne les barèmes de rendement, la réglementation européenne tend à ce que le calcul des indemnisations ait pour référence le rendement historique de chaque exploitant. Il n'est donc pas possible d'avoir recours à des barèmes similaires à ceux qui sont utilisés en cas de calamités agricoles.
La vraie question est celle de la moyenne olympique, définie en application des accords de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Cette disposition permet aux exploitants d'utiliser la moyenne triennale pour les calculs ils ont donc le choix entre deux valeurs de référence et aux assureurs de proposer des garanties non subventionnables permettant de souscrire des contrats pour des rendements assurés plus élevés.
À long terme, le Gouvernement se fait le porte-voix de ces préoccupations relatives à la référence historique auprès des instances européennes.
Dans certaines situations, l'augmentation de la fréquence des aléas climatiques peut conduire à ce que la référence à un potentiel de rendement historique entraîne une dégradation de la référence de production historique, quelle qu'en soit sa définition. C'est pourquoi nous accompagnons l'adaptation des systèmes de production, afin de les rendre plus résilients.
Par ailleurs, l'encadrement réglementaire de l'assurance récolte permet aux exploitants de s'assurer dans la limite d'une valeur de prix définie dans le barème du dispositif. Ce barème correspond aux coûts de production, de manière à indemniser l'exploitant des frais qu'il a engagés. Il ne s'agit pas de l'indemniser au prix de vente sur le marché de la production.
Pour autant, et pour tenir compte de l'évolution des coûts de production, les exploitants ont la possibilité de s'assurer à un prix allant jusqu'à 120 % de la valeur de ce barème tout en bénéficiant de garanties subventionnables.
Enfin, les exploitants qui désireraient s'assurer à une valeur de prix plus élevée peuvent le faire sans perdre le bénéfice des aides à l'assurance en souscrivant à des garanties non subventionnables complémentaires proposées par les assureurs.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour la réplique.
Mme Marie-Pierre Monier. Madame la ministre, vous avez conscience des problèmes et vous savez que tout se joue au niveau européen. Les choses étant très contraintes, on ne peut faire comme on veut. Toutefois, il y va de l'avenir de notre agriculture : on ne peut en rester à la situation actuelle.
Je regrette l'absence, ce matin, du ministre en charge de ce dossier : vous vous occupez d'éducation, alors que ma question relève de l'agriculture. Je sais bien que M. Fesneau est mobilisé sur ce thème, mais il faut agir et ce que vous avez proposé ne suffit pas. Comme je l'ai souligné, ce ne sont pas seulement les producteurs, mais aussi les professionnels et les services départementaux qui s'inquiètent de la réglementation actuelle.
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