Question de M. MÉDEVIELLE Pierre (Haute-Garonne - Les Indépendants) publiée le 09/03/2023

M. Pierre Médevielle attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la délocalisation de l'usine Latécoère implantée sur la zone d'activités de Montredon à Toulouse.

Inaugurée il y a à peine cinq ans et qualifiée alors d'« usine du futur » ou encore d'« usine 4.0 », celle-ci n'abritera plus aucun emploi industriel fin 2024. C'est ce qu'a annoncé début février 2023 la direction de ce groupe historiquement toulousain, mais dont l'actionnaire majoritaire est aujourd'hui Searchlight Capital Partners, un fonds d'investissement américain. Les machines ultra-modernes du site de Montredon, sur lesquelles travaillent encore aujourd'hui 110 personnes, vont quant à elles « s'envoler » vers les sites à bas coût du groupe en République tchèque et au Mexique.

Une première série d'interrogations concerne prioritairement l'avenir des salariés de ce site. Si la direction a indiqué que tous les personnels concernés par cette restructuration seraient reclassés, le flou demeure toujours quant à la réalité et aux détails de ces reclassements. Il espère que la direction du groupe Latécoère ne tardera pas à préciser ses intentions…

Mais cette délocalisation, qui illustre, malheureusement une nouvelle fois, le recul de notre souveraineté industrielle à la faveur d'une désindustrialisation qui frappe notre pays depuis plusieurs décennies, soulève également d'autres questions.

Ainsi, en 2016 et 2017, alors que le groupe Latécoère, faute de solution immobilière, menaçait (déjà) de quitter l'agglomération toulousaine, Toulouse Métropole l'a assisté dans sa recherche de foncier. La ville de Toulouse lui a finalement cédé une parcelle de 3 hectares pour la somme très avantageuse de 45€ du m². En parallèle, afin d'ériger sur ce terrain une « usine du futur », Latécoère a bénéficié du programme stratégique de l'État baptisé … « Usine du futur » et a reçu 5,4 millions d'euros. À ces millions de l'État, viennent s'ajouter près de 800 000 € de fonds européens gérés et versés par la région Occitanie.

Ces dispositifs, qu'ils soient nationaux ou locaux, ont pour finalité le développement économique et la création ou le maintien d'emplois dans nos territoires. Des objectifs évidemment louables que nous sommes nombreux à partager. Mais, force est de constater que les expériences malheureuses se multiplient. Et la région toulousaine, qui a déjà connu pareilles déconvenues récemment dans le secteur des microconducteurs ou de l'industrie pharmaceutique, n'est pas un cas isolé dans notre pays.

Aussi, il lui demande dans quelle mesure l'État ne pourrait pas envisager de mettre en oeuvre des mécanismes de remboursement de ces aides publiques lorsque les objectifs affichés de développement de l'activité et de créations d'emplois ne sont manifestement pas poursuivis ou atteints à terme.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme publiée le 05/04/2023

Réponse apportée en séance publique le 04/04/2023

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Médevielle, auteur de la question n° 490, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

M. Pierre Médevielle. Madame la ministre, ma question concerne la délocalisation de l'usine Latécoère implantée sur la zone d'activités de Montredon, à Toulouse.

Inaugurée voilà à peine cinq ans, et qualifiée alors d'« usine du futur », celle-ci n'abritera plus aucun emploi industriel fin 2024. C'est ce qu'a annoncé, début février 2023, la direction de ce groupe historiquement toulousain, mais dont l'actionnaire majoritaire est aujourd'hui Searchlight Capital Partners, un fonds d'investissement américain.

Les machines ultramodernes du site de Montredon, sur lesquelles travaillent encore aujourd'hui 110 personnes, vont quant à elles s'envoler vers les sites à bas coût du groupe en République tchèque et au Mexique.

Nous nous inquiétons bien évidemment en priorité de l'avenir des salariés de ce site, mais cette délocalisation soulève également d'autres questions.

Ainsi, en 2016 et 2017, alors que le groupe Latécoère, faute de solution immobilière, menaçait déjà de quitter l'agglomération toulousaine, Toulouse Métropole l'avait assisté dans sa recherche de foncier.

En parallèle, Latécoère a bénéficié du programme stratégique de l'État baptisé « Usine du futur », recevant à ce titre 5,4 millions d'euros, ainsi que près de 800 000 euros de fonds européens gérés et versés par la région Occitanie.

Les expériences malheureuses se multiplient. La région toulousaine, qui a déjà connu pareilles déconvenues récemment dans le secteur des microconducteurs ou de l'industrie pharmaceutique, n'est pas un cas isolé dans notre pays.

Aussi, madame la ministre, l'État pourrait-il envisager de mettre en oeuvre des mécanismes de remboursement de ces aides publiques ou des délais d'engagement lorsque les objectifs affichés de développement de l'activité et de créations d'emplois ne sont manifestement pas visés ou atteints à terme ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme. Monsieur le sénateur Médevielle, notre droit permet la restitution d'aides en cas de fraude ou, au titre de l'article L. 773-2 du code de commerce, lorsque le tribunal constate qu'une entreprise de plus de 1 000 salariés n'a pas respecté ses obligations légales de recherche d'un repreneur.

Dans ce cas, les personnes publiques peuvent, dans un délai d'un an à compter de ce jugement, demander remboursement de tout ou partie des aides pécuniaires en matière d'installation, de développement économique ou d'emploi attribuées à l'entreprise au cours des deux années précédant le jugement, au titre de l'établissement concerné par le projet de fermeture.

Nous accordons des aides aux investissements, à l'issue d'une instruction rigoureuse sur le projet et son porteur, surtout quand nous sommes en concurrence avec d'autres pays d'implantation possibles. Ces aides s'inscrivent dans le cadre de nos priorités industrielles stratégiques. Elles sont conditionnées à la réalisation effective de l'investissement et nous sommes attentifs au maintien en France des équipements financés.

Concernant le cas spécifique de Latécoère, l'entreprise a reçu des aides publiques ces dernières années, notamment à la suite de la crise du covid-19, à travers l'activité partielle et les prêts garantis par l'État (PGE). Elle a aussi été lauréate en 2021 du plan France Relance au titre des actions de soutien au secteur aéronautique pour un projet multi-sites.

Nous regrettons vivement la décision prise par l'entreprise concernant le site de Toulouse-Montredon et lui avons clairement fait savoir. Nous sommes également en train d'analyser finement les investissements effectivement financés par France Relance et le devenir de ces équipements.

Par ailleurs, un travail est cours avec Latécoère, afin que l'entreprise prenne des engagements fermes et clairs pour ne pas dégrader davantage son empreinte industrielle en France.

Le Gouvernement, et notamment mon collègue Roland Lescure, ministre délégué en charge de l'industrie, suit ce dossier de près. Nous nous attachons à vérifier l'effectivité des investissements liés aux aides et des engagements de cette entreprise. Soyez assurés de notre attachement au renforcement de notre tissu industriel.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Médevielle, pour la réplique.

M. Pierre Médevielle. Madame la ministre, je suis ravi de constater que le Gouvernement est mobilisé. Nous avons effectivement rencontré M. Lescure et suivons de près les négociations. J'espère que nous aurons de bonnes nouvelles pour les 110 salariés, que je ne vois pas partir en Tchécoslovaquie ou en Turquie. Mon souhait est que l'entreprise soit au moins sanctionnée.

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