Question de Mme GACQUERRE Amel (Pas-de-Calais - UC) publiée le 30/03/2023
Mme Amel Gacquerre attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances sur les violences faites aux femmes.
Le 9 mars 2023, à Béthune, une mère de famille de 48 ans a été victime de féminicide, tuée à son domicile, par son ancien compagnon, sous les yeux de sa fille.
Il y a près d'un an, toujours dans le Béthunois, deux enfants âgés de 4 et 7 ans étaient assassinés, brûlés dans une voiture par leur père qui n'avait pas supporté la séparation avec son ex- conjointe.
Ces deux drames récents, parmi de nombreux autres malheureusement, ont un point commun : le criminel était connu des services de police et de gendarmerie.
À Béthune, la femme tuée par son ex-conjoint avait porté plainte pour menace de mort, 8 mois avant son assassinat. Trop souvent, les délais allongés entre le dépôt d'une plainte pour violences et la réponse du Parquet placent la victime dans une situation de danger durant laquelle de nombreux conjoints ou ex-conjoints violents passent à l'acte. Pour sécuriser la situation des femmes qui portent plainte, il est impératif de fixer un délai maximal entre le dépôt de plainte et la réponse du Parquet, qu'il s'agisse d'un classement sans suite ou d'une condamnation.
Selon le collectif « Féminicides », 31 femmes ont été tuées par leur conjoint depuis le début de l'année 2023. La plupart des auteurs avaient fait l'objet de dépôt de plainte, voire même de condamnations. Selon les chiffres 2021 du ministère de l'intérieur, 25 femmes sur les 125 tuées cette année-là avaient porté plainte avant leur agression. Concrètement, cela représente 20 % des victimes.
Il faut le reconnaître, l'État a sensiblement augmenté les moyens alloués à la lutte contre les violences conjugales : ordonnances de protection, bracelet anti-rapprochement, aide universelle d'urgence, formation des gendarmes
L'égalité homme/femme fait elle aussi l'objet d'avancées significatives. Néanmoins, force est de constater qu'aujourd'hui, la réponse pénale est insuffisante.
Dans les Hauts-de-France, le nombre de féminicides est bien supérieur à la moyenne nationale. Alors que la France compte 8,4 victimes pour 1 000 habitantes, les départements du Nord et du Pas-de-Calais en comptent 11,2.
Si la lutte contre les violences intrafamiliales est une compétence d'État, il est essentiel d'adapter la lutte aux réalités locales, de territorialiser les politiques et d'augmenter les moyens mobilisés.
Elle souhaite savoir quels outils et quels moyens supplémentaires elle compte mettre en oeuvre pour lutter plus efficacement contre les violences faites aux femmes, notamment dans les territoires les plus touchés par ce fléau, par exemple dans les Hauts-de-France.
Elle lui demande également quelles réponses peut-elle apporter afin de renforcer la réponse pénale et si elle compte encadrer davantage et réduire le délai entre le dépôt de plainte et la réponse du Parquet.
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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 17/05/2023
Réponse apportée en séance publique le 16/05/2023
M. le président. La parole est à Mme Amel Gacquerre, auteure de la question n° 552, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances.
Mme Amel Gacquerre. Madame la ministre, le 9 mars dernier, à Béthune, Nadège, une mère de famille de 48 ans a été victime de féminicide, tuée à son domicile par son ancien compagnon, sous les yeux de sa fille âgée de 12 ans.
Il y a près d'un an, toujours dans le Béthunois, deux enfants âgés de 4 ans et 7 ans étaient retrouvés morts, dans une voiture incendiée par leur père. Ce dernier n'avait pas supporté la séparation.
Ces deux drames récents dans le Pas-de-Calais, parmi de nombreux autres malheureusement, ont un point commun : l'auteur des crimes était connu des services de police et de gendarmerie.
Force est de constater que les dispositifs de protection des victimes et la réponse pénale sont insuffisants à ce jour.
À Béthune, la femme tuée par son ex-compagnon avait porté plainte pour menace de mort, huit mois avant son assassinat. Selon le collectif « Féminicides par compagnons ou ex », trente et une femmes ont été tuées par leur conjoint depuis le début de l'année 2023. La plupart des auteurs avaient fait l'objet de dépôt de plainte, voire de condamnations.
Trop souvent, les délais allongés entre le dépôt d'une plainte pour violences et la réponse du Parquet placent la victime dans une situation de danger durant laquelle nombre de conjoints ou d'ex-conjoints violents passent à l'acte.
Pour sécuriser la situation des femmes qui portent plainte, il serait notamment impératif de fixer un délai maximal entre le dépôt de plainte et la réponse du Parquet, qu'il s'agisse d'une condamnation ou d'un classement sans suite.
Il faut le reconnaître, l'État a sensiblement augmenté les moyens alloués à la lutte contre les violences conjugales. Or le nombre de violences conjugales augmente toujours et les inégalités territoriales demeurent.
La région des Hauts-de-France est la plus touchée par les féminicides. Il est essentiel d'adapter la lutte aux réalités locales, de territorialiser les politiques et d'augmenter les moyens mobilisés.
Madame la ministre, quels outils et moyens supplémentaires comptez-vous mettre en oeuvre rapidement pour lutter efficacement contre les violences faites aux femmes, notamment dans les territoires les plus touchés par ce fléau, notamment les Hauts-de-France ?
Que prévoyez-vous pour renforcer la protection des victimes et améliorer la réponse pénale afin d'éviter de nouveaux drames ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Gacquerre, depuis 2017, le Gouvernement a lancé une mobilisation générale de l'État, en lien avec les associations et les collectivités pour lutter contre le fléau des violences intrafamiliales.
Le Gouvernement a lancé en mars le déploiement du « pack nouveau départ », qui a vocation à apporter une réponse coordonnée, rapide et individualisée aux besoins des victimes de violences conjugales, en vue de les aider à quitter leur conjoint violent. Ces victimes seront aussi mieux détectées grâce à un réseau d'acteurs de première ligne sensibilisés et formés.
Il permettra une priorisation de l'accès aux aides et dispositifs de droit commun dans une logique de coupe-file. Il comprendra notamment la possibilité d'une aide financière d'urgence. Le pack nouveau départ sera élargi à la France entière d'ici à la fin de l'année 2025.
Le 8 mars, le Gouvernement a présenté le plan « Toutes et tous égaux ». Ce plan comporte plusieurs mesures pour lutter contre le fléau des violences intrafamiliales dans les territoires, notamment le déploiement de pôles spécialisés dans chaque juridiction, ainsi que le renforcement de la formation des magistrats et de l'ensemble des acteurs de première ligne en matière de lutte contre les violences intrafamiliales.
En cas de danger grave et imminent pour les victimes, une ordonnance de protection immédiate pourra être délivrée sous vingt-quatre heures.
Par ailleurs, le fichier de protection des victimes de violences intrafamiliales sera enrichi progressivement des données relatives à la victime pour mieux la protéger.
Enfin, chaque département sera doté d'une structure médico-sociale de prise en charge globale des femmes victimes de tous types de violences, adossée à un centre hospitalier, afin de généraliser le recueil de plaintes.
Le Gouvernement consacre des moyens budgétaires et humains sans précédent à la lutte contre les violences conjugales. Le budget du ministère de l'égalité entre les femmes et les hommes a été multiplié par deux en cinq ans.
Pour autant, madame la sénatrice, il nous faut poursuivre dans cette voie et accélérer la mise en place des dispositifs d'aides. Il importe que nous progressions ensemble sur cette question.
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