Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 23/03/2023
M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur l'exportation à grande échelle de textiles usagés polluants.
Dans un rapport publié le 16 février 2023, la fondation Changing Markets dénonce la triste réalité des envois massifs vers les pays du Sud de vêtements usagés jetés par les consommateurs européens. Le Kenya est ainsi devenu un véritable dépotoir de la « fast fashion », car une partie importante de ces textiles y échoue dans des décharges à ciel ouvert.
Or nombre d'entre eux sont constitués de fibres synthétiques et contiennent du plastique, ce qui en fait des déchets inutilisables, voire extrêmement polluants pour le sol, l'eau et l'air environnants. Selon les calculs de Changing Markets, sur plus de 900 millions de vêtements usagés (dont 150 millions en provenance de l'Union européenne et du Royaume-Uni) expédiés au Kenya en 2021, « on estime que 458 millions de vêtements usagés sont des déchets inutilisables, et que 307 millions d'entre eux sont susceptibles de contenir des fibres plastiques ».
Ce phénomène de « trashion » néologisme formé de « trash » (ordures) et « fashion » (mode) est d'autant plus scandaleux que la convention de Bâle interdit l'exportation de déchets vers les pays ne disposant pas de capacités de retraitement adaptées.
C'est pourquoi il lui demande ce qui peut être envisagé pour tarir ce « déluge de vêtements usagés ».
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Transmise au Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de l'écologie
Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de l'écologie publiée le 29/06/2023
L'industrie textile est l'un des secteur les plus pollants. Elle émet l'équivalent de 4 milliards de tonnes de CO2 équivalent par an. 100 milliards de vêtements sont vendus chaque année dans le monde. Leur production a tout doublé entre 2000 et 2014, notamment en raison du développement de la « fast fahion ». Cette dernière repose sur la fabrication majoritairement hors d'Europe de produits très bon marché, le renouvellement rapide des collections et une durée d'utilisation très courte des vêtements. Quant aux textiles usagés, encore trop peu sont collectés, et la majorité d'entre eux reste exportée à l'étranger, avec le risque de finir dans des décharges sauvages. Face à ces constats, le gouvernement a engagé plusieurs actions de réforme pour accélérer la transition du secteur textile vers une filière durable et circulaire. En premier lieu, le gouvernement a engagé une nouvelle feuille de route de la filière à responsabilité élargie du producteur (REP) des produits textiles sur la période 2023-2028. En s'appuyant sur l'éco-organisme de la filière, cette feuille de route prévoit de collecter deux fois plus de textiles usagés, d'allonger leur durée de vie avec un fonds de financement de la réparation et du réemploi de 250 millions d'euros, ainsi que des obligations de traçabilité des textiles exportés visant à s'assurer qu'ils ne sont effectivement réutilisés ou recyclés. En second lieu, le gouvernement a lancé en 2022 les travaux de construction de l'affichage environnemental des vêtements - ou éco-score - avec l'objectif d'aboutir à une méthode de calcul du score d'impact environnemental et un modèle d'affichage pour la fin de l'année 2023. En mars 2023, le gouvernement a annoncé les 8 critères d'impact environnemental qui devaient être approfondis d'ici l'été, avec notamment la prise en compte de l'impact de la "fast fashion". Enfin, à l'échelle européenne, dans le cadre des négociations en cours sur la révision du règlement sur les transferts transfrontaliers des déchets, la France est favorable à la mise en place de règles plus contraignantes à l'export sur les déchets de textiles.
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