Question de M. FERNIQUE Jacques (Bas-Rhin - GEST) publiée le 06/04/2023
Question posée en séance publique le 05/04/2023
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour le groupe Écologiste Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Jacques Fernique. Monsieur le secrétaire d'État Hervé Berville, dimanche dernier, vous avez crânement proclamé avoir fait reculer Bruxelles sur l'interdiction du chalutage de fond dans les aires marines protégées.
Non, vous n'avez pas fait plier la Commission européenne : dès le départ, son plan d'action n'était pas contraignant. En affirmant aux pêcheurs que ce plan « condamnerait la pêche artisanale française », dès « demain », vous avez joué un jeu dangereux et aggravé un climat déjà électrique à l'encontre des défenseurs de l'environnement. (Marques d'agacement sur les travées du groupe Les Républicains.)
Il est audacieux de se prévaloir de la cause de la pêche artisanale pour soutenir en réalité le chalutage industriel de fond ! Cela pourrait se comparer à une subvention à Amazon que l'on présenterait comme un soutien aux commerces de proximité...
Nos pêcheurs ont besoin non pas de ce genre de tromperie, mais d'écosystèmes en bon état pour pouvoir continuer à pêcher dans vingt ou trente ans. Vos aires marines protégées sont-elles des supercheries ? Lorsque la Commission européenne a recommandé de mettre un terme au chalutage de fond dans ces espaces, vous avez été pris à votre propre jeu de dupes et vous avez saisi l'occasion pour vous ériger en héros de la pêche artisanale.
Il fallait oser, alors que vous laissez des chalutiers géants détruire la pêche côtière et que vous vous opposez à la demande de nos pêcheurs d'interdire l'usage de la senne démersale près des côtes !
Les pêcheurs sont en colère et refusent la casse sociale. Sans solution durable, l'apaisement ne sera pas possible ; nous ne souhaitons pas qu'un incendie comme celui de l'Office français de la biodiversité, à Brest, se reproduise.
Monsieur le ministre, plutôt que de stigmatiser les défenseurs de l'environnement, comme certains s'y essaient à fond et sur tous les fronts ces derniers temps, quand mettrez-vous en cohérence vos déclarations et vos actes ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer publiée le 06/04/2023
Réponse apportée en séance publique le 05/04/2023
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la mer.
M. Hervé Berville, secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer. Monsieur le sénateur Fernique, je ne sais pas où vous avez pêché ces informations (Sourires.), car elles sont tout simplement fausses.
Je n'ai pas déclaré que la Commission avait reculé. J'ai indiqué qu'elle avait confirmé ce que je vous avais dit ici le 8 mars : il s'agissait d'un plan de communication, et non d'un projet destiné à être traduit en actes législatifs. Écoutez donc ce qui se dit au Sénat !
M. Jacques Fernique. Bien sûr !
M. Hervé Berville, secrétaire d'État. La Commission européenne, devant les parlementaires européens, avait évoqué une intention de traduire, peut-être, ce plan en actes législatifs. Or quand c'est flou, il y a parfois un loup.
M. Marc-Philippe Daubresse. Un loup de mer ! (Sourires.)
M. Hervé Berville, secrétaire d'État. Face à cette ambiguïté, j'ai donc demandé à la Commission européenne, lors du Conseil européen, de confirmer que cette décision serait laissée aux États membres.
Concernant les aires marines protégées, permettez-moi de clarifier les choses. Vous étiez aux responsabilités et vous avez vous-même créé des aires marines protégées entre 2012 et 2014. Tout y était-il interdit ? Non.
Le code de l'environnement prévoit quatorze types d'aires marines protégées, allant de la réserve intégrale, où aucune activité humaine n'est autorisée, à des zones où la pêche est possible. Tous les élus locaux littoraux le savent bien : certaines activités de pêche peuvent être vertueuses et protéger l'habitat marin.
Ma position, celle de l'ensemble des élus locaux des façades littorales, est cohérente : depuis vingt ans, nous avons démontré qu'une pêche côtière artisanale pouvait exister en France. Les pêcheurs à la coquille, les producteurs d'huîtres ou les pêcheurs de langoustines ravagent-ils la planète ? Non ! Or, si une traduction législative avait été adoptée, cela aurait mené à la fin de cette pêche-là.
Nous assumons donc de continuer à défendre la pêche artisanale et côtière et d'autoriser, dans des zones proches de nos côtes, des pratiques de pêche vertueuses et éprouvées. Nous allons continuer à la défendre avec vous, les élus locaux. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP. M. Claude Nougein applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour la réplique.
M. Jacques Fernique. Monsieur le secrétaire d'État, votre communiqué ressemblait tout de même à un communiqué de victoire, comme un poisson d'avril légèrement décalé.
Il va falloir envisager la transition : vous ne pourrez pas rejeter en bloc toute évolution concernant le chalutage de fond dans les aires marines protégées. Ce ne sera pas tenable. Où sont les mesures structurelles pour nos pêcheurs artisanaux,...
M. le président. Il faut conclure !
M. Jacques Fernique. ... afin de garantir une pêche durable et socialement viable ? Défendre le statu quo reviendrait, à terme, à les couler. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
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