Question de M. PLA Sebastien (Aude - SER) publiée le 06/04/2023

M. Sebastien Pla interroge Mme la ministre de la transition énergétique sur ses intentions concernant les chaudières à gaz à usage domestique ou collectif.
Il lui rappelle que le gaz alimente 40% des foyers en France soit une maison sur trois et un logement sur deux en collectif, représentant près de 12 millions de ménages et que toute mesure qui viserait une interdiction à court terme de l'installation de nouvelles chaudières fonctionnant au gaz dans les logements, et notamment dans un premier temps dans les maisons individuelles, serait un contresens écologique au moment même où les chaudières affichent leur compatibilité avec le gaz vert et renouvelable destiné à les alimenter.
Il lui précise en effet qu'une solution électrique comme les pompes à chaleur coûte environ 10 000 euros de plus qu'une chaudière gaz performante, avec une durée de vie moindre et des coûts de maintenance non maitrisés. Les ménages aux revenus modestes, qui sont souvent ceux occupant les logements les moins bien isolés, seront donc dans l'incapacité d'installer des pompes à chaleur (dont le coût évolue fortement avec la puissance) adaptées à leurs besoins et pourraient être incités à prolonger au maximum la durée de vie de leur chaudière, voire à basculer sur du chauffage à effet Joule, contribuant à les précariser davantage.
Il lui indique qu'après la mise en oeuvre de l'interdiction de la pose des chaudières au fioul domestique au 1er juillet 2022, l'exclusion des chaudières gaz risque à l'évidence de réduire encore davantage le bouquet de solutions à disposition des ménages.
En outre, le recours à des solutions de remplacement des chaudières gaz par des pompes à chaleur n'est pas systématiquement réalisable et va se heurter à de nombreuses contraintes techniques et réglementaires : difficultés d'installation des unités extérieures, nuisances sonores, diamètres des canalisations de distribution de l'eau de chauffage, dimensionnement du réseau électrique ...
Il estime donc qu'outre les conséquences sur le pouvoir d'achat, la mise en oeuvre d'une telle mesure aurait des effets contre-productifs sur la résilience du système énergétique, la lutte contre le réchauffement climatique et le renforcement de notre souveraineté énergétique alors même que la chaudière gaz est 100% compatible (sans frais d'adaptation) avec les gaz renouvelables, et qu'elle contribue de ce fait à la décarbonation du bâtiment.
Il s'ensuit que la dynamique de développement du biogaz, seule filière de production d'énergies renouvelables atteignant ses objectifs et apportant des externalités positives aux territoires ruraux pour les agriculteurs, l'économie circulaire, les emplois locaux et l'indépendance énergétique du pays pourrait être définitivement stoppée.
Il lui demande donc de bien vouloir lui préciser ses intentions sur ce sujet précis, et si notamment elle envisage d'accélérer la décarbonation des usages énergétiques en valorisant la complémentarité des énergies, les solutions innovantes et la place du gaz, de plus en plus renouvelable, dans le secteur du bâtiment.

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Réponse du Ministère de la transition énergétique publiée le 20/04/2023

Depuis le 1er juillet 2022, les équipements neufs installés pour le chauffage ou la production d'eau chaude sanitaire dans les bâtiments d'habitation ou à usage professionnel, neufs ou existants, doivent respecter un plafond d'émissions de gaz à effet de serre. Peuvent ainsi continuer à être installés dans les bâtiments, les nouveaux équipements alimentés par de l'électricité tels que les pompes à chaleur, y compris hybrides, de la biomasse, de l'énergie solaire ou géothermique, du gaz, dès lors qu'ils respecteront le plafond d'émission fixé par le décret relatif au résultat minimal de performance environnementale des équipements de chauffage et de production d'eau chaude sanitaire. Les bâtiments peuvent également être raccordés à des réseaux de chaleur. Par ailleurs, le projet de réglementation environnementale 2020, dit « RE2020 », constitue une avancée environnementale importante en excluant les chaudières gaz des bâtiments neufs depuis 2022 en maison individuelle et à partir de 2025 en logement collectif. Toutes les solutions gaz ne sont pas exclues : des solutions hybrides de type pompe à chaleur hybride au gaz (au besoin couplées à des panneaux solaires thermiques) pourront passer les seuils d'émission de gaz à effet de serre de la RE2020 si elles sont performantes. Les exigences incluses dans la RE2020 sont cohérentes avec la stratégie nationale bas carbone (SNBC), en particulier en ce qui concerne la décarbonation de la chaleur dans les bâtiments. La trajectoire sur laquelle s'appuie la SNBC se base sur une part de logements chauffés au gaz en 2050 inférieure à 15% pour atteindre la neutralité carbone. En effet le potentiel de production de gaz totalement décarboné est limité et doit être utilisé à bon escient et en priorité vers les secteurs où le gaz est peu substituable. Aussi l'exclusion du gaz et autres énergies carbonées n'induirait pas un développement excessif du chauffage électrique. En effet la RE2020 prévoit aussi de contraindre fortement la consommation d'énergie primaire non renouvelable, ce qui empêche l'utilisation de systèmes électriques peu performants (radiateurs électriques) au profit de systèmes plus vertueux tels que les pompes à chaleur, les chaudières biomasse, les réseaux de chaleur urbain (les réseaux de chaleur français sont alimentés à plus de 60 % par des énergies renouvelables, chiffre en constante croissance), les panneaux solaires thermiques, la géothermie. Dans les bâtiments existants, le Gouvernement encourage également le remplacement des systèmes de chauffage fossiles par des équipements de chauffage renouvelable, comme les pompes à chaleur aérothermiques ou géothermiques ou les chauffages au bois performants, là où c'est techniquement possible. Le Gouvernement accompagne le secteur du bâtiment dans sa transition énergétique par la réglementation et les aides aux ménages et aux professionnels, et accorde une attention particulière aux ménages modestes ou en situation de précarité énergétique via des aides à la rénovation renforcées (coup de pouce chauffage CEE et aide MaPrimeRénov'). En ce qui concerne les aspects de souveraineté énergétique et industrielle si une part importante des chaudières à gaz est fabriquée en France, il faut rappeler que d'une part tout le gaz fossile est importé et que d'autre part, la France dispose déjà d'un tissu industriel conséquent dans le domaine des chauffages décarbonés, dont les chaudières biomasse mais aussi les pompes à chaleur. De plus le Gouvernement travaille en lien avec les acteurs de la filière pompes à chaleur pour renforcer notre capacité industrielle dans ce secteur pour les années à venir. Le Gouvernement travaille également au développement du biogaz pour injection dans le réseau, énergie renouvelable qui a atteint les objectifs fixés par la Programmation Pluriannuelle de l'Énergie. Il convient de rappeler les ordres de grandeur en jeu : nous avons consommé 450TWh de gaz en 2022 (dont les deux tiers pour chauffer des bâtiments) et nous avons actuellement une capacité d'injection dans le réseau de 10TWh de biogaz, avec un gisement global de biomasse qui sera limité et fortement sollicité par ailleurs, y compris par l'industrie de la biochimie ou pour décarboner des secteurs qui n'ont que peu d'alternatives comme l'aviation ou le maritime. Réduire notre consommation globale de gaz n'est donc pas incompatible avec un développement fort du biogaz, au service des secteurs et pour le cas où les alternatives au gaz sont limitées. Nous devons faire les deux afin de sortir au plus vite des énergies fossiles, décarbonner notre économie et renforcer notre souverainté énergétique. Enfin concernant une éventuelle interdiction progressive de la vente de chaudières gaz neuves, une telle décision ne pourrait s'envisager qu'après une concertation large et documentée avec les parties prenantes et dimensionnée précisément en tenant compte de l'ensemble des enjeux techniques et économiques associés, afin de ne laisser aucun ménage dans l'impasse et de donner suffisamment de visibilité aux professionnels.

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