Question de Mme BONNEFOY Nicole (Charente - SER) publiée le 20/04/2023
Mme Nicole Bonnefoy attire l'attention de M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées sur la problématique du manque important de places dans les établissements médico-sociaux en Charente.
En effet, le département de la Charente souffre d'un taux d'équipement de structures d'accueil adaptées de 0,9 % qui correspond à 66 places en institut thérapeutique éducatif et pédagogique (ITEP). Ce taux est inférieur à celui de la région Nouvelle Aquitaine situé à 1,6 % ainsi qu'à la moyenne nationale, à 1,1 %.
La population de la Charente présente pourtant des fragilités plus marquées : le taux d'élèves en situation de handicap psychiques était supérieur de 10 points à la moyenne de l'académie de Poitiers en 2021 (26 % en Charente, 16 % dans les Deux-Sèvres, 13 % en Charente-Maritime et 10 % dans la Vienne, moyenne académique à 16 %).
L'écart entre les besoins de prise en charge adaptée et les places disponibles, outre l'absence d'effectivité des droits à l'éducation et aux soins, fait peser l'accompagnement de ces enfants sur les familles et les services de l'éducation nationale. Ainsi, en 2022, 9 % des notifications pour accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) de la maison départementale des personnes handicapées de la Charente ont été prises faute de places dans des structures adaptées, dont 8 en Itep, et plus d'une centaine d'enfants charentais sont, à ce jour, déscolarisés. Le délai d'attente pour accéder à une place d'Itep atteint deux ans, rendant parfois l'orientation de l'enfant obsolète et réduisant de surcroît le sens de l'orientation par la maison départementale des personnes handicapées de la Charente.
Concernant les instituts médico-éducatifs (IME), des élèves sur liste d'attente sont également en grande souffrance en classe ordinaire et l'expriment par des comportements parfois extrêmement violents. Malgré un taux d'équipement de 6,7 % supérieur à la moyenne régionale ou nationale (4,6 %), la liste d'attente globale sur le département de la Charente est d'une centaine d'élèves souvent sur liste d'attente pendant 2 à 3 ans. Environ 80 jeunes sont maintenus en IME dans le cadre des amendements Creton.
Certains territoires sont éloignés des IME existants ce qui implique de proposer aux jeunes un IME avec internat, solution qui limite les possibilités et allonge encore l'attente pour une entrée en IME. Les délais pour les élèves présentant des troubles du spectre de l'autisme (TSA) sont encore plus longs en raison d'un nombre limité de places sur les sections autisme des IME (ex : 2 élèves TSA du Confolentais sont inscrits depuis six ans à l'IME Delivertoux mais sans place effective).
Aussi, au regard de cette situation alarmante, elle souhaite savoir quelles mesures concrètes le Gouvernement entend mettre en oeuvre pour apporter les solutions adaptées aux jeunes Charentaises et Charentais, et comment il compte créer de nouvelles places dans les établissements médico-sociaux ITEP et IME en Charente.
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Transmise au Ministère auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargé des personnes handicapées
Réponse du Ministère auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargé de l'organisation territoriale et des professions de santé publiée le 07/06/2023
Réponse apportée en séance publique le 06/06/2023
Mme le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, auteure de la question n° 625, transmise à Mme la ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées.
Mme Nicole Bonnefoy. Madame la ministre, la problématique du manque de places dans les établissements médico-sociaux est majeure et a été soulevée ici même à de nombreuses reprises. À ce titre, ma collègue Martine Filleul vous alertait déjà il y a un an et demi ; vous répondiez alors mettre en place des politiques ambitieuses en la matière.
Dans le département dont je suis élue, la Charente, le taux d'équipement en instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (Itep) est largement inférieur à la moyenne nationale, alors même que le taux d'élèves en situation de handicap psychique est de dix points supérieur à la moyenne de l'académie. Ce décalage entre les besoins de la population et la réponse publique laisse place à des situations dramatiques pour les jeunes concernés. Votre objectif d'une école inclusive est louable, mais se heurte à la réalité de l'accompagnement en France.
Malheureusement, vous avez fait le choix de fermer un nombre important de places dans les différentes structures spécialisées avant même de vous assurer que la prise en charge de ces élèves était réalisable dans de bonnes conditions dans le système classique. Ainsi, de nombreuses familles ne disposent d'aucune bonne solution : l'accueil dans des structures classiques est souvent très inadapté. Face à cela, une centaine de jeunes Charentais sans solution sont déscolarisés.
Ces jeunes sont pour la plupart sur des listes d'attente longues de deux ans pour un accès en Itep et de deux à trois ans pour les instituts médico-éducatifs (IME). Pour les jeunes atteints de troubles autistiques, l'attente peut aller jusqu'à six ans. Par ailleurs, cet embouteillage est aggravé par le manque de places d'accueil pour les personnes majeures en handicap qui sont accueillies par les IME.
Les enfants de la République ont tous le droit à l'école. L'idéal républicain n'en est plus un si des élèves sont exclus du système scolaire sur le fondement de leur handicap. Madame la ministre, quelle réponse entendez-vous apporter à ces familles maltraitées et à ces enfants ? Comment comptez-vous créer de nouvelles places dans les établissements médico-sociaux Itep et IME en Charente ?
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé. Madame la sénatrice Nicole Bonnefoy, vous rappelez à juste titre que, dans votre département, le taux d'équipement en Itep est légèrement en deçà de la moyenne nationale. En revanche, pour les IME, le taux est supérieur, avec un taux d'équipement de 7 % contre une moyenne nationale de 4,5 %. Le taux d'équipement charentais en services à domicile est de 4,1 % pour les services d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad) contre une moyenne française de 3,3 %.
Ces chiffres recouvrent des réalités très diverses. Il est vrai que certaines familles doivent attendre plusieurs mois, voire plusieurs années avant de trouver une situation adaptée. Ce n'est pas acceptable.
Pour autant, en 2022 et en 2023, quatorze places en réorientation professionnelle, quatre places pour adultes cérébrolésés et vingt-six pour personnes autistes en service d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés (Samsah) ont été financées. L'offre de répit ainsi qu'un accompagnement spécifique pour les enfants en situation de handicap relevant de l'aide sociale à l'enfance sont également développés. Cela a été possible grâce à l'engagement du conseil départemental aux côtés de l'ARS.
Nous voulons aller plus loin, notamment pour les jeunes adultes relevant de l'amendement Creton, pour les territoires en zone blanche et pour les enfants et adultes autistes. Lors de la Conférence nationale du handicap du 26 avril dernier, le Président de la République a présenté soixante-dix mesures dont la création de 50 000 nouvelles solutions pour les personnes en situation de handicap et pour leurs proches, adaptées au parcours de chacun et dans le respect de ses choix.
Concernant la question des plus jeunes et de leur scolarisation, mon collègue Pap Ndiaye et moi-même travaillons à ce que l'école s'adapte à tous les élèves en situation de handicap et non l'inverse. Dans les mois à venir, la transformation des établissements pour enfants en dispositifs et plateformes ouverts, plus fluides, permettra de répondre aux différentes situations évoquées.
Madame la sénatrice, notre ambition est l'exercice de tous les droits pour tous les citoyens.
Mme le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour la réplique.
Mme Nicole Bonnefoy. Je vous remercie, madame la ministre, pour cette réponse. Vous l'avez dit vous-même : des efforts ont été consentis, en particulier par le conseil départemental et l'ARS pour disposer de places supplémentaires. Or il en manque encore beaucoup. Il est donc important et urgent de trouver des réponses satisfaisantes pour les nombreuses personnes en souffrance et pour leurs familles.
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